Texte : ‘Fonds spéculatifs du Service National de Santé britannique (NHS)’. Image : Alice Kus

Dans son article intitulé « Comment l’Union européenne rend-elle la privatisation du Service National de Santé britannique (NHS) permanente » « How the EU is making NHS privatisation permanent », The New Statesman analyse les effets du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP en anglais), proposé au sommet du G8, faisant particulièrement référence aux attaques imminentes au sein du Service National de Santé britannique (NHS). « Ceci ouvrira des portes aux fournisseurs privés de santé qui ont réalisé des profits vertigineux aux États-Unis, tout en luttant activement contre toute tentative du Président Barack Obama de fournir une couverture santé gratuite aux citoyens démunis. Prochainement, avec l’aide du gouvernement conservateur et bientôt de l’Union européenne, ces entreprises seront libres de faire de même en Grande-Bretagne.

 

« Linda Kaucher est une éminente experte des ententes commerciales. Elle a considérablement écrit et discouru à ce propos, récemment dans un article de « Chartist », bimensuel social-démocrate britannique, dans lequel elle expose une vérité dérangeante quant aux coulisses de Bruxelles. Si, en apparence, l’Union européenne est un bastion des protections et des droits, son véritable programme est bien plus sombre.

 

Selon elle, « il s’agit d’établir de manière permanente un néolibéralisme dirigé par les sociétés, au sein même de l’Union européenne et à l’échelle internationale, par le biais d’accords commerciaux. Une réaffirmation de la démocratie dans la structure de l’UE ou celle d’états membres est inhibée par le droit commercial international juridiquement contraignant. Elle affirme également que le programme est conduit et réellement contrôlé par des sociétés transnationales, notamment de services financiers ».

 

De quelle manière affecte-t-il le NHS ? La réponse est terriblement simple. L’accord apportera un large soutien aux sociétés qui cherchent à écraser le service de santé. Il fera office de pont transatlantique entre la Loi sur la santé et l’action sociale de la Grande-Bretagne, qui contraint le NHS à se mettre en concurrence pour obtenir des contrats, et les sociétés privées nord-américaines, impatientes d’en amasser les gains.

 

« Selon Linda Kaucher, « [la Loi sur la santé et l’action sociale] remet effectivement les appels d’offres en vigueur, et par conséquent la privatisation et la libéralisation, c’est-à-dire qu’elle s’ouvre aux soumissionnaires transnationaux – un stratagème pour les prestations de soins de santé à l’américaine, priorisant les bénéfices.

 

Les dégâts sont-ils irréversibles ?

 

Absolument rien n’est acquis. Le second tour des négociations a eu lieu en novembre, le troisième se tiendra à Washington, du 16 au 20 décembre. Plusieurs campagnes tentent d’empêcher son exécution. Une pétition en ligne « Exemptez le NHS de l’Accord USA/UE de Libre-Échange » a été clôturée en septembre avec moins de 11 500 signatures. ‘38 dégrées’ fait mieux, non loin d’atteindre son objectif de 650 000 signatures, et Occupy London vient de lancer le groupe Stop the TTIP visant à informer et protester. Cependant, lorsqu’on présente au public une proposition enveloppée du jargon d’affaires et juridique, telles qu’ont été les discussions officielles autour de cet accord, il n’est vraiment pas étonnant qu’elle ne parvienne pas à rassembler le raz-de-marée de protestations qu’elle mérite.

Par ailleurs, les entreprises médiatiques ne se prononcent pas à ce sujet et lorsqu’elles le font, il semble que nous ayons affaire à des faits consumés plutôt qu’à des propositions sur la table des négociations.

 

Leçons de l’Amérique latine

 

« Le 6 novembre 2011, quelques 5 000 personnes se sont réunies à Mar del Plata, en Argentine, pour commémorer le sixième anniversaire du quatrième « Sommet des Amériques ». Le président américain George Bush s’était rendu à l’hôtel argentin en 2005, dans le but de conclure l’accord sur la Zone de Libre-Échange des Amériques (ALCA en espagnol) – qui engloberait toute l’Amérique excepté Cuba [ainsi que la France, le Royaume-Uni et les Pays-Bas, ndlt] –, finalement rejeté par ses homologues latino-américains, menés par feu Nestor Kirchner, alors président du pays hôte. Des changements politiques ont mené à l’émergence de propositions considérées comme des alternatives à l’hégémonie du néolibéralisme et favorables au développement de chaque pays et de la région. Deux projets importants ont vu le jour : l’Union des nations sud-américaines (UNASUR) et l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (ALBA), toutes deux centrées sur l’intégration régionale mais avec deux objectifs distincts. Le projet ALBA est en opposition directe à l’ALCA et radicalement différent de l’UNASUR pour de nombreuses raisons. Ses objectifs sont fondamentalement autant politiques qu’économiques. L’inspiration à l’organisation est largement provenue de l’Alliance Sociale Continentale (ASC), qui réunit plusieurs mouvements ayant résisté au programme de libre-échange néolibéral ». Latin America 2013

 

Si les Parlements peuvent arrêter une guerre contre la Syrie, ils peuvent également arrêter une guerre contre leur propre peuple, à condition que l’opinion publique s’exprime, mobilisant tous les moyens possibles, et soit suffisamment claire.

 

Traduction de l’anglais : Jordana Do Rosário