Hier 29 mai 2018, nous avons su que l’Assemblée Nationale française a rejeté la proposition – à l’instar de beaucoup de parlementaires macronistes- de fixer une date de fin d’utilisation du glyphosate en 2021. Cependant, le gouvernement de Hollande et surtout celui de Macron avait officiellement déclaré son refus de prolonger l’autorisation d’utiliser le glyphosate à partir de 2012, alors que l’Europe devait décider d’interdire ou de revenir à l’utilisation du pesticide le plus répandu du monde (et en France). La Commission européenne était favorable à la prolongation.
D’un autre côté, l’opinion publique tend à refuser le glyphosate de par ses effets cancérigènes et de sa nocivité sur la santé humaine, effets mis en lumière dans un rapport du centre de recherche de la FAO. Cependant, la décision a été prise. La France a continué d’affirmer son opposition, alors que l’Allemagne continuait avec ses tours et ses détours. Lors de la dernière réunion ministérielle européenne sur ce sujet, la majorité des États a opté pour une nouvelle prolongation de l’autorisation jusqu’en 2022. Contrairement à ses arguments passés, la France s’est abstenue mais a annoncé qu’elle pourrait mettre fin, de façon unilatérale, à l’utilisation du glyphosate dans un délai de trois ans. Cette nuit, le Président Macron a agi, de nouveau, différemment à ce qu’il avait promis, en défendant l’idée que l’intérêt de l’agriculture… française (qui est bien européenne, non ?) laissait le temps à l’industrie de trouver d’autres pesticides non préjudiciables à la santé humaine.
A l’inverse, on ne peut pénaliser le capital en l’obligeant à arrêter un produit très rentable sans lui laisser la possibilité temporelle et économique d’inventer un nouveau produit et de faire la transition sans perte de rendement. Pour Macron, en revanche, la protection de la santé humaine n’est pas, au-delà de n’importe quelle rhétorique, un thème prioritaire dès lors que ce sujet entre en conflit avec l’impératif de sauvegarder la rentabilité du capital.
Mais, quelle logique politique, sociale et écologique a-t-elle inspiré les leaders européens considérés comme les « sauveurs » de l’Europe, avec Merkel ? Si nous parlons de « sauveurs », il est évident que Macron, ses collègues du Conseil européen et leurs amis de l’oligarchie techno-financière dominante, sont, avant tout, des « sauveurs » des intérêts des groupes capitalistes européens et mondiaux, ceux que nous appelons les « stakeholders » [NdT. Partie prenante, intervenant, partenaire. Dans un contexte commercial, une partie prenante est une personne ou une organisation qui a un intérêt légitime dans un projet ou une entité. Source : wikipedia commons]. Et aujourd’hui, ils ont l’impudence d’accuser les forces politiques élues par les citoyens d’être anti-européennes, contre l’Europe, en oubliant qu’eux mêmes sont à l’origine des processus d’affaiblissement de l’Europe politique, économique et sociale.
Les événements de ces dernières 48 heures en Italie et en France [NdE. 29 mai 2018] démontrent que les plus grands dangers pour le futur des sociétés européennes ne provient pas, pour l’essentiel, des citoyens, considérés comme « populistes » mais plutôt des politiques des classes dominantes européennes qui, au nom du progrès de la science et de la technologie de « leur » Europe, ont lutté et combattent encore contre les immigrants, les pauvres, les groupes et communautés qui n’obéissent ni aux impératifs de l’austérité et de la subordination, ni à la logique du rendement financier et de l’endettement structurel, et surtout pas à la communauté humaine « au service » des titulaires des fonds d’investissement. L’action de Macron sur le glyphosate démontre l’ampleur et la profondeur de l’échec/la trahison historique des élites européennes par rapport à la protection de la vie et aux droits à et, depuis la vie, à l’État de Droit, à l’État de bien-être et au soin de la démocratie constitutionnelle…