Les métaphores ne peuvent être plus satiriques. La météo refuse de laisser passer le printemps, avec la fête de Pâques la plus froide qu’on ait vue. Le Chancelier britannique a choisi le 1er avril, jour du poisson d’avril, pour effectuer les coupes les plus draconiennes dans les aides sociales et services, et les nouvelles du reste de l’Europe prévoient plus de la même chose : austérité suivie par davantage de crise, suivie par davantage d’austérité (c’est-à-dire avec augmentations d’impôts pour les pauvres et dépôts libres dans les paradis fiscaux pour les plus riches).
Une taxe sur les chambres à coucher est introduite actuellement pour forcer les allocataires sociaux à se serrer dans des maisons plus petites pour faire de la place aux familles nombreuses. L’idée ne serait pas si mauvaise s’il existait de ces petits logements. En réalité, c’est une façon de taxer les pauvres et / ou d’en faire des sans-abri.
Une réduction substantielle des services locaux comme la Council Tax s’applique aux collectivités locales, qui connaissent déjà une forte réduction de leur financement. Les soins aux personnes âgées, aux handicapés et aux jeunes souffrent déjà, avec fermeture de bibliothèque et réductions de budgets scolaires pour donner la préférence à des académies à l’idéologie suspecte.
La perte du minimum légal pour la tranche inférieure des familles à revenus moyens laisse leurs droits potentiels sans couverture.
Le National Health Service (Service de Santé national) est la plus belle réussite de la Grande-Bretagne : un système qui présente l’une des meilleures optimisations des ressources dans le monde. Il entre dans sa phase finale de privatisation, lancée par Margaret Thatcher dans les années 70 et 80.
Les augmentations d’impôts pour les hauts revenus : la tranche imposable à 50 pence par livre disparaît, un cadeau à la City aux grands financiers qui apportent des fonds au Parti conservateur. (En 2010 avait été introduite une nouvelle tranche d’imposition à 50% sur les revenus supérieurs à £150,000).
Diverses modifications (coupures) dans le système d’aides sociales visent à réformer la manière dont les personnes handicapées et les chômeurs de longue durée parviennent à survivre. Quand ils essaieront de mettre en question les erreurs inévitables que ce système chaotique est sur le point de mettre en place, ils s’apercevront que les services d’aide sociale ont disparu.
Rien ne peut justifier ces coupes ; on a déjà montré que l’austérité réduit les échanges économiques (récession à double fond, bravo pour les métaphores un peu humoristiques) ce qui conduit à plus de récession avec plus de chômage et une augmentation du budget des allocations sociales. Mais ici il y a l’idéologie. L’Etat doit rétrécir, tout doit être privatisé, la concurrence et l’individualisme doivent réguler les relations interpersonnelles et économiques, et si les pauvres ont une espérance de vie beaucoup plus courte, eh bien, ce sera une forme d’euthanasie que beaucoup approuvent.
Alors, où est notre miracle de Pâques, mort et résurrection ? Eh bien, en fait, l’Autorité des Services Financiers est morte et renaît sous la forme de Service des Règles Discrétionnaires qui fait partie de la Banque d’Angleterre et qui va s’occuper de sociétés de services financiers tandis que la Police de la Conduite Financière sera le chien de garde chargé de surveiller le comportement de la City. La future séparation totale entre banques et sociétés d’investissement, tant annoncée pour prévenir les catastrophes induites par l’économie de casino de ces dernières années, n’apparaît nulle part, tellement le secteur financier y est opposé.
Au milieu de ces coupes, la Grande-Bretagne dépense encore une fortune et a l’intention d’aller de l’avant avec le remplacement du Trident, son système d’arme nucléaire. Quelque chose ne tourne pas rond ici.
La violence économique tue
Violence : « exercice injuste ou injustifié de la force ou de la puissance contre les droits ou les lois » (dictionnaire en ligne). Etant donné que la violence engendre davantage de violence, nous ne pouvons que considérer les actions de cette nouvelle étape comme une provocation.
Dans « le Niveau de l’esprit : pourquoi les sociétés plus égalitaires font presque toujours mieux ? », Richard G. Wilkinson et Kate Pickett soutiennent qu’il existe « des effets pervers de l’inégalité sur les sociétés : érosion de la confiance, augmentation de l’anxiété et de la maladie, consommation excessive ». Ce livre affirme que pour chacun d’une série de onze problèmes sanitaires et sociaux (santé physique, santé mentale, toxicomanie, éducation, emprisonnement, obésité, mobilité sociale, solidarité et vie communautaire, violence, grossesses précoces et petite enfance), les résultats sont nettement moins bons dans les pays riches plus inégalitaires.
Un nouveau système est en train de naître avec des formes économiques alternatives alliant mise en commun, coopératives, crédit entre pairs, coopératives de crédit locales, cogestion, participation des travailleurs aux bénéfices, crowdfunding (financement communautaire) et application des principes humanistes à de petites et moyennes industries. Son invisibilité dans les médias parle haut et fort de la complicité de ces médias avec les grandes entreprises qui manipulent le pouvoir politique aujourd’hui.
Une des réponses que nous pourrions faire au Chancelier britannique est de répandre l’information concernant les nouvelles initiatives et de participer à une discussion plus large à propos des éléments du nouveau système quand ils réaliseront finalement que ce système‑ci ne peut plus être réparé.