Face aux défis de 2016, quels vœux, quels engagements ?L’année 2016 qui commence nous demande de relever au moins quatre défis majeurs.
Le premier défi consiste à ne pas tomber dans le piège que nous tendent ceux qui sont venus en 2015 – et peut-être reviendront encore…- semer la terreur dans les rues de Paris. Aveuglés par quelques commanditaires qui ont su utiliser leurs frustrations pour les hameçonner via les nouvelles technologies de la communication, ces jeunes, qui ont le plus souvent grandi en France, ont succombé à l’idéologie dont sont porteurs ces sites extrémistes. Ne distinguant plus le mal du bien, ils vont à la mort en répandant la mort. Leurs commanditaires espèrent ainsi propager dans la population la peur et la méfiance, voire la haine de l’autre, et déclencher chez nos gouvernants des décisions qui, au nom de la défense de notre « sécurité », seront attentatoires à nos libertés et nos droits les plus fondamentaux. Ainsi leur « victoire » sera d’autant plus grande que nous y aurons participé...
Faut-il faire confiance au « tout sécuritaire » tout en continuant à alimenter le terreau du terrorisme, ici et là-bas ?Nous pouvons entendre la nécessité de renforcer les contrôles de sécurité dans les lieux à grande densité humaine ou qui sont les des symboles forts de notre république et de notre culture (écoles, théâtres, lieux de culte, etc.). Mais nous devons refuser certaines mesures déjà prises (prolongation de l’état d’urgence, assignation à résidence des citoyens opposés à la politique gouvernementale, etc.) ou envisagées (modifications de la Constitution, déchéance de la nationalité, renforcement des pouvoirs policier et judiciaire, etc.). Le MAN s’y opposera et participera à la résistance à toute mesure qu’il jugera illégitime en mettant en œuvre l’action non-violente.Bombarder un ennemi « invisible » noyé au sein de populations civiles, tout en continuant à vendre nos armes destructrices à des pays de moins en moins sûrs (Égypte, Arabie Saoudite,…) est-il efficace à long terme ? Faut-il continuer à faire croire que nos armes nucléaires sont la garantie ultime de nos intérêts vitaux alors même que cette arme nucléaire ne dissuade aucunement les terroristes et leurs commanditaires ? L’argent que nous consacrons à cette « idole » qu’est la bombe pourrait contribuer à relever le défi économique en réinjectant des services publics dans les zones les plus déshéritées de notre pays. Le MAN continuera à lutter pour un désarmement nucléaire mondial, à commencer par celui de la France.
Le deuxième défi est de demeurer aux yeux du monde un pays phare des Droits de l’Homme. Or notre frilosité à accueillir quelques milliers de réfugiés interroge sur notre capacité à vivre la fraternité de notre devise républicaine. Plusieurs de nos compatriotes, succombant aux discours xénophobes repris par de plus en plus d’hommes et de femmes politiques, s’opposent à l’hébergement de ces hommes, femmes et enfants qui fuient leurs pays. Ils oublient que nombre d’entre eux sont eux-mêmes des descendants d’immigrés et que les Français constituent un peuple métissé depuis des siècles ! La peur de l’autre, distillée tel un poison par des discours au fort relent de démagogie, risque fort de nous faire perdre notre âme !
Faut-il nous condamner à tenter de fermer nos frontières et à dresser des murs de plus en plus hauts au sein même de nos villes et jusque dans nos têtes ? Ce sont au contraire des ponts qu’il s’agit aujourd’hui de lancer par-dessus toutes nos peurs !Aussi le MAN poursuivra-t-il la réflexion engagée au sein de son réseau Tensions sociales, ainsi que son travail de formation à la régulation non-violente des conflits au sein des établissements scolaires, centres sociaux, quartiers populaires, etc.
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Le troisième défi est d’ordre économique. Le nombre de nos concitoyens privés de travail n’a pas cessé d’augmenter depuis plus de 30 ans. De plus, le fossé s’est creusé entre les quelques milliers qui ont vu leur fortune considérablement se renforcer et une grande partie de la population, de plus en plus pauvre. Parmi ces derniers, nombreux se sentent rejetés de la communauté nationale parce que relégués dans des quartiers en déshérence ou abandonnés dans des campagnes que les services publics désertent. Ils deviennent alors des proies sans défense pour les démagogues de tout poil.Faut-il cultiver l’illusion d’un retour à la croissance, alors même que cette course à la croissance accroit les inégalités entre les territoires et entre les individus ?
Le MAN soutiendra toutes les initiatives qui permettent de vivre et faire ensemble, à l’exemple du projet « Territoires zéro chômeur » initié par ATD Quart-Monde.
Le quatrième défi est d’ordre écologique et humanitaire. Malgré ses difficultés, la France reste un pays économiquement « riche ». Ayant obtenu en décembre dernier lors de la COP 21 un accord sur un texte consensuel mais non contraignant, elle se doit de montrer concrètement la voie pour empêcher la hausse de la température de notre atmosphère de dépasser 1,5°C d’ici la fin du siècle, et pour aider les pays les plus exposés – et souvent parmi les plus pauvres – à faire face aux conséquences de ce réchauffement.
Persuadé que la société civile est et devra être force de proposition pour obliger les politiques à faire émerger une société plus sobre du point de vue énergétique et plus égalitaire, le MAN proposera à ses partenaires (Alternatiba, ONG diverses, etc.) que l’esprit de la non-violence reste au cœur des projets en cours de construction.
Pour faire face à ces quatre défis intrinsèquement liés, ouvrons nos portes et nos fenêtres ! Faisons confiance à celles et ceux qui résistent aux vents contraires et s’efforcent de vivre les valeurs inscrites aux frontons de nos mairies. Construisons une culture de la non-violence, fondée sur le respect, la justice et la fraternité !
Patrick HUBERT
Porte-parole du MAN