Les cinq hommes les plus riches du monde ont plus que doublé leur fortune en termes réels depuis 2020, passant de 405 milliards de dollars à 869 milliards de dollars et augmentant à un rythme de 14 millions de dollars par heure. En revanche, la richesse combinée de près de 5 milliards de personnes parmi les plus pauvres n’a pas augmenté du tout.
Tels sont quelques-uns des chiffres figurant dans le rapport « Inégalités : le pouvoir de quelques-uns », publié par Oxfam à l’occasion du Forum économique mondial de Davos. Le rapport indique que dans dix ans – au rythme actuel – nous pourrions avoir le premier trillionnaire, alors qu’il faudra 230 ans pour mettre fin à la pauvreté.
Au niveau mondial, les hommes possèdent 105 000 milliards de dollars de richesses de plus que les femmes. Cette différence équivaut à quatre fois la taille de l’économie des États-Unis. Il faudra 1 200 ans à une femme travaillant dans le secteur de la santé ou des services sociaux pour gagner autant que le PDG d’une entreprise du classement Fortune 100 au cours d’une année moyenne.
Sept des dix plus grandes multinationales du monde ont un PDG milliardaire ou un milliardaire comme actionnaire principal. 148 des plus grandes entreprises mondiales (pour lesquelles des données sont disponibles) ont réalisé des bénéfices d’environ 1 800 milliards de dollars au cours des 12 mois précédant juin 2023, soit une augmentation de 52,5 % par rapport au bénéfice moyen de la période quadriennale 2018-21. Entre juillet 2022 et juin 2023, pour chaque tranche de 100 dollars de bénéfices générés par 96 des plus grandes entreprises mondiales, 82 dollars ont été versés aux actionnaires sous forme de dividendes ou de rachats d’actions.
Pour près de 800 millions de travailleurs employés dans 52 pays, les salaires n’ont pas suivi le rythme de l’inflation. La masse salariale relative a diminué en termes réels de 1 500 milliards de dollars au cours de l’exercice 2021-2022, une perte équivalant à près d’un salaire mensuel (25 jours) pour chaque travailleur.
Pour la plupart des habitants de la planète, le début de cette décennie a été incroyablement difficile : 4,8 milliards de personnes ont à peine pu suivre le rythme de l’inflation. Pour les plus pauvres, qui sont souvent des femmes ou des membres de minorités ethniques et de groupes marginalisés, la vie quotidienne est devenue encore plus difficile. Pour la première fois en 25 ans, les inégalités mondiales se sont accrues. Et la catastrophe climatique à laquelle nous assistons, dont les super-riches sont parmi les principaux responsables, exacerbe considérablement ce fossé. Partout dans le monde, le coût de la vie a fortement augmenté. Pour des centaines de millions de personnes, les salaires n’ont pas été (et ne sont toujours pas) suffisants pour joindre les deux bouts, et leurs perspectives d’un avenir meilleur s’amenuisent. Les premières pages des journaux ont été à maintes reprises remplies d’histoires de protestations et de grèves de travailleurs luttant pour leur survie.
La nouvelle analyse d’Oxfam met en lumière la part de la richesse financière mondiale détenue par les 1 % les plus riches. « Sur la base des données de Wealth X, nous estimons que les 1 % les plus riches du monde possèdent aujourd’hui 59 % des actifs financiers de la planète. Au sommet de la pyramide mondiale des richesses, la fortune des milliardaires est liée à la propriété des grandes entreprises qu’ils contrôlent. En 2022, les 50 milliardaires américains les plus riches possédaient 75 % de leur fortune sous forme d’actions des sociétés qu’ils dirigeaient. Warren Buffett, président-directeur général et principal actionnaire de Berkshire Hathaway, possède 99 % de sa fortune en actions de sa propre société. Mark Zuckerberg, qui contrôle Meta, possède 95 % de sa fortune en actions de la société. Jeff Bezos, ancien PDG, aujourd’hui président du conseil d’administration et premier actionnaire d’Amazon (avec une participation de 10 %), détient 83 % de sa fortune en actions du géant de la vente au détail en ligne ».
Les grandes entreprises utilisent leur pouvoir de marché de manière à créer et à accroître les inégalités, par exemple en récompensant la richesse plutôt que le travail, en échappant aux obligations fiscales, en profitant de la privatisation des services publics et en alimentant la crise climatique.