« Ce qui se passe à Gaza n’est pas une opération militaire, c’est une attaque en règle contre notre peuple. C’est un massacre de civils innocents. Rien dans le droit naturel ou le droit international ne permet de prendre pour cible les civils et de les attaquer de manière aussi aveugle et barbare / What is happening in Gaza is not a military operation, it is a full-scale assault against our people. It is massacres against innocent civilians. Nothing in natural law or international law allows for the targeting of civilians and such indiscriminate, barbaric attacks against them » .
Intervention du représentant de la Palestine au Conseil de Sécurité des Nations Unies lors de sa session du 16 octobre 2023 (cf. verbatim S/PV/9439, page 9)
Introduction
Le 6 janvier 2025, l’Irlande a officiellement soumis à la Cour internationale de Justice (CIJ) une requête à fin d’intervention dans le cadre de l’affaire intentée par l’Afrique du Sud contre Israël pour génocide à Gaza : voir le communiqué officiel de la CIJ en français et en anglais.
Il s’agit d’une démarche que l’Irlande avait officiellement annoncée le 12 décembre 2024 (voir communiqué officiel), accueillie favorablement et saluée par bien des experts irlandais et des organisations de la société civile (voir note de l’Irish Legal News).
Rappelons que l’Irlande, ainsi que la Slovénie, l’Espagne et la Norvège, ont procédé à la reconnaissance officielle de la Palestine en tant qu’État, et ce à la mi-2024 (voir communiqué officiel du 22 mai 2024).
Dans sa requête (voir texte), l’Irlande développe certains arguments concernant l’interprétation qu’elle estime devoir être donnée aux dispositions principales de la convention sur le génocide de 1948. Il convient de rappeler que, négociés et adoptés en 1948, les termes et les formules employés dans cette convention doivent pouvoir être interprétés à la lumière de l’évolution du droit international public depuis 1945, afin de mieux protéger un groupe ou une population particulière victime d’une tentative d’extermination et de prévenir de nouveaux actes perpétrés avec le même objectif.
Avant de présenter le contenu du texte envoyé par l’Irlande, nous consacrerons quelques développements au contexte actuel et reviendrons sur quelques chifffres et données concernant l’armée israélienne et le drame indicible qui se vit à Gaza.
Une brève mise en contexte basée sur des données récentes
Une interview d’un éminent spécialiste de la Shoah et du crime de génocide (voir l’interview de Democracy Now publiée le 30 décembre 2024 et intitulée « Total Moral, Ethical Failure : Holocaust Scholar Omer Bartov on Israel’s Genocide in Gaza » confirme l’urgence de freiner la campagne génocidaire d’Israël à Gaza.
Depuis Israël, un historien a recueilli un large éventail de données sur les exactions de toutes sortes auxquelles les forces militaires israéliennes se sont prêtées à Gaza depuis la soirée/nuit du 7 octobre 2023 (voir note de Haaretz et hyperlien vers le volumineux rapport présenté le 5 décembre 2024).
Le 30 décembre 2024, un groupe important d’experts des droits de l’homme des Nations Unies a exigé qu’Israël soit tenu pour responsable de toutes les violations des normes internationales existantes à Gaza (voir le communiqué conjoint). Le 31 décembre 2024, un rapport accablant des Nations Unies sur la nature systématique et délibérée des attaques israéliennes contre les hôpitaux et les centres médicaux de Gaza a également été rendu public (voir le communiqué de presse officiel de l’ONU et l’hyperlien vers le rapport en tant que tel) : à cet égard, il est plus que notoire de constater le peu de couverture accordée par les grands médias internationaux à ces communiqués de presse publiés par les Nations Unies au cours des derniers jours de l’année 2024.
Une recherche sur la toile indique que ce communiqué conjoint des Nations Unies en date du 2 janvier 2025 a également été rarement référencé, tout comme cette alerte lancée par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) le 3 janvier sur les effets dramatiques de la pluie et des basses températures sur les populations déplacées à Gaza, abritées dans des camps de fortune et exposées aux intempéries.
Le communiqué du Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme lui-même sur l’antisémitisme du 6 janvier 2025 (voir texte) s’inscrit également dans cette étrange tendance de la plupart des grands médias internationaux concernant les communiqués de presse des Nations Unies lorqu’il s’agit de Gaza. On peut y lire notamment que :
« I also reject attempts to conflate all criticism of Israeli government policies and military operations with antisemitism. It is not antisemitic, for example, to deplore military operations that raise grave concerns over violations of international humanitarian and human rights law. Nor is it antisemitic to condemn those violations and urge respect for the law – including the decisions of international courts . Nor is it antisemitic to call Israel to account for the tens of thousands of people in Gaza, including more than 250 of our own UN staff, who have been killed since 7 October 2023« .
En complément des derniers rapports des Nations Unies sur la situation à Gaza (rapport au 8 janvier 2025 et rapport au 31 décembre 2024) détaillant l’intensité des bombardements israéliens sur Gaza pendant les derniers jours de 2024, sont également recommandés :
– cette émission récente (Al Jazeera, 6 janvier 2024): avec le concours de plusieurs experts de renommée internationale, elle traite des effets à moyen et long terme sur la santé humaine des particules inhalées par les survivants des bombardements massifs dans des zones très peuplées telles que Gaza. Des effets sur la santé humaine qui ont été observés par le passé dans les organismes de citadins en Irak et en Syrie, et qui en 2024, en plus de Gaza, menacent la santé des habitants de zones urbaines au Liban en raison de l’intensité des bombardements israéliens qui ont débuté vers la mi-septembre 2024 ;
– ce rapport d’une ONG palestinienne intitulé « Comment cacher un génocide : le rôle des ordres d’évacuation et des zones de sécurité dans la campagne génocidaire d’Israël à Gaza (Traduction libre de l’auteur de « How to hide a genocide: the role of evacuation orders and safe zones in Israel´s genocidal campaign in Gaza« ) qui explique quel type de stratégie se cache derrière les bombardements répétés d’Israël sur les camps de réfugiés et de personnes déplacées à Gaza.
– cette étude publiée dans la revue scientifique The Lancet le 10 janvier 2025, et qui, à partir des données recueillies jusqu´au mois de juin 2024, indique que les chiffres sur le nombre de morts recensés à Gaza par les autorités sanitaires est largement sous-estimé.
– ce témoignage intitulé « Les vœux pour l’année 2025 de la part de la Gazette de Gaza« , et les vœux pour 2025 envoyés depuis la bande de Gaza et son lot quotidien de souffrance auquel Israël soumet des familles palestiniennes depuis 15 longs mois.
Dans le dernier rapport des Nations Unies sur Gaza (rapport du 8 janvier 2025), concernant la situation critique des enfants, il y est indiqué que :
« On 6 January, MoH announced the death of a 35-day old baby due to the cold and lack of warm shelter in Gaza, adding that this had brought the total number of deaths due to hypothermia to eight across the Strip. MSF reports that, between October and December 2024, the Neonatal Intensive Care Unit (NICU) of the Nasser Medical Complex in Khan Younis had admitted 325 infants, with MSF teams embedded in the unit treating “newborns and premature babies with potentially life-threatening respiratory infections, dehydration, and other complications.” According to Dr. Mohammed Abu Tayyem, a pediatrician at Nasser, the pediatric ward is seeing an increased number of children with acute bronchiolitis, pneumonia, upper respiratory tract infections and even bronchial asthma exacerbations. The doctor attributes these rising cases to the harsh winter weather, dire conditions in tents and limited heating supplies, all of which render premature and low-birth-weight babies more vulnerable to hypothermia. Commenting on the death of at least seven newborns due to hypothermia in December, the WHO Director-General warned that “more children are in danger,” and that, while “every child deserves a healthy and safe start in life… the children of Gaza are paying the price of war with their own lives”.
Voir Photos des enfants de Gaza extraites de cet article publié le 9 janvier 2025 en Israel par Magazine+972 et intitulé » ‘Every moment I fear losing another child’: newsborns freeze to death in Gaza tents ».
Afin de mieux comprendre le non-sens de la stratégie israélienne à Gaza, en violation flagrante (et documentée) des règles les plus élémentaires de l’ordre juridique international, il n’est pas superflu de se référer à cet entretien avec l’une des grandes spécialistes françaises du Proche-Orient, suite à la publication de son livre, qu’elle a présenté début octobre 2024, intitulé « Le livre noir de Gaza », (ainsi qu’à cet article de Libération et à celui publié dans Le Monde du 8 octobre). Un second entretien, plus récent (31 octobre), est également fortement recommandé.
L’armée israélienne : quelques données récentes peu diffusées
Il convient de noter que le 2 janvier 2025, Israël a revu à la hausse le nombre de ses victimes à Gaza (pour un total de 891), dont 38 suicides parmi ses forces militaires (voir l’article d’ArhamOnLine et l’article du TimesofIsrael ainsi que l‘article de Haaretz).
Cette augmentation est très significative par rapport au chiffre de 393 victimes militaires enregistré dans le rapport des Nations Unies sur Gaza au 31 décembre 2024, chiffre obtenu, selon ce rapport, à partir des données officielles israéliennes disponibles (voir le rapport).
En ce qui concerne les suicides et la santé mentale des soldats israéliens envoyés à Gaza, ce reportage de CNN d’octobre 2024 a mis en évidence le type de traumatisme dont souffrent de nombreux réservistes à leur retour de Gaza. En 2017 déjà, on pouvait lire dans ce reportage du média numérique israélien Magazine+972 – dont la lecture intégrale est fortement recommandée – que :
« According to a study conducted by Major Leah Shelef, who heads the Israeli Air Force’s Men
Il va sans dire qu’un exercice similaire devrait voir le jour sur la base de témoignages accablants de jeunes soldats israéliens, comme ceux publiés dans Libération ce 11 janvier 2025 ou encore ceux publiés en Israël en juillet 2024 dans cette note de Magazine+972.
Enfin, on notera que les statistiques officielles publiées le 31 décembre 2024 par les autorités israéliennes indiquent qu’au cours de l’année 2024, plus de 82 600 citoyens israéliens ont décidé de voyager à l’étranger et de ne pas revenir (voir l’article du TimesofIsrael de la même date), sans préciser dans cet article s’il s’agit ou non de personnes en âge d’être appelées par l’armée israélienne à Gaza.
En septembre 2024, une façon assez particulière de résoudre la pénurie de combattants à Gaza a été rapportée par les autorités militaires israéliennes (voir note de France24).
Partir en vacances après avoir commis des crimes à Gaza : expériences récentes au Brésil et au Chili
À des milliers de kilomètres de Gaza, au Brésil, c’est durant le premier week-end de l’année 2025 qu’un soldat israélien soupçonné d’avoir commis des crimes de guerre a réussi à échapper in extremis à une demande d’arrestation de la justice brésilienne, et ce grâce aux efforts des diplomates israéliens au Brésil. Un escapade rocambolesque dont les détails exacts n’ont pas été rendus publics.
Normalement, un mandat d’arrêt judiciaire est notifié aux autorités aéroportuaires et migratoires, et dans ce cas précis, la personne recherchée a réussi à contourner les contrôles en quittant le territoire brésilien avec le premier vol commercial disponible. Comment a-t-il fait ? On l’ignore, mais cette dépêche de CNN indique que les autorités israéliennes vont dorénavant ordonner de dissimuler la véritable identité de leurs militaires lorsqu’ils sont appelés à donner des interviews afin d’éviter ce type de problème à l’avenir. Cette annonce n’affecte en rien les poursuites judiciaires existantes, dont certaines l’ont été à partir des milliers de photos et de vidéos postées sur les réseaux sociaux par des soldats israéliens, apparemment fiers de leurs actions sur le terrain contre la populations civile palestinienne.
Cet article du New York Times du 9 janvier indique qu’il est très probable que ce cas détecté au Brésil ne soit pas un cas isolé, mais que de nombreux autres cas similaires seront observés à l’avenir :
« Unlike more senior leaders, lower-level soldiers do not usually have diplomatic immunity, or the resources to research which jurisdictions may leave them vulnerable to war crimes complaints« .
Dans cet autre article du TimesofIsrael du 9 janvier, il est précisé que les autorités diplomatiques israéliennes dresseront dorénavant une liste de destinations sûres et d’autres moins sûres, sans aucune précision majeure :
« IDF reservists who fought in Gaza are being advised to first check with the Foreign Ministry regarding the level of danger in any country they wish to visit« .
La complication soudaine de ce qui semble avoir été ses vacances en Amérique latine a également été subie par un soldat israélien qui se trouvait dans l’extrême sud du Chili et qui a fait l’objet d’une action de plusieurs ONG devant les tribunaux chiliens (voir le reportage de Radio UChile du 28 décembre). Les autorités chiliennes chargées des aéroports et de l’immigration, les compagnies aériennes accréditées dans les aéroports chiliens et la police des frontières chilienne devraient se montrer plus alertes afin d’éviter ce qui s’est passé au Brésil le 5 janvier 2025.
Il est à noter que ce type de recours devant les juridictions nationales a également été introduit devant les juridictions européennes, notamment dans le cas de soldats israéliens détenteurs d’un passeport européen (en plus de leur passeport israélien), et soupçonnés d’avoir commis des crimes de guerre à Gaza.
Dans le cas de la France, plusieurs actions intentées contre un soldat possédant aussi un passeport francais ont été rejetées en septembre del 2024 (voir note parue dans Le Figaro), provoquant l’indignation des militants et de plusieurs organisations de la société civile. Voir sur cette affaire également cette note de Le Monde d’avril 2024. Une nouvelle action en justice a été présentée en décembre 2024 : voir cette note de la FIDH du 17 décembre 2024 et cette autre note de la LDH, dans laquelle on lit que:
« Depuis le 7 octobre 2023, la campagne génocidaire d’Israël à Gaza a tué au moins 44 000 Palestinien-ne-s et en a blessé 105 000 autres. De nombreux éléments permettent d’établir que des crimes internationaux ont été commis par plusieurs des quelque 4 000 citoyens français mobilisés dans l’armée israélienne. Pourtant, à ce jour, aucune enquête judiciaire relative à ces crimes n’a été ouverte par les autorités françaises« .
Dans le cas de la Belgique, deux soldats belges/israéliens ont été l’objet d’actions similaires: voir cette note de JusticeInfo d’octobre 2024 dans laquelle on peut lire que :
« Il faut faire respecter le droit international pour forcer un cessez-le-feu et mettre fin à l’impunité qui nourrit les crimes suivants. La justice belge doit faire sa part du travail, aux cotés de la justice internationale« .
Dans le cas du Costa Rica, en mars 2024, un reportage de la télévision costaricienne (voir note) a montré des réservistes israéliens passant de la plage paradisiaque de Santa Teresa de Cóbano aux combats à Gaza en quelques heures, ce qui peut soulever des interrogations tout à fait valides. Et, accessoirement, cela peut donner des indices sur ce qui a bien pu motiver la surprenante mention du Costa Rica et de l’Iran dans une même phrase par le Premier ministre israélien lors de l’un de ses voyages aux États-Unis, il y a quelques années, en 2017: voir l’article de La Nación : « hablamos de Costa Rica o de Irán » (sic.) et l’article du Tico Times. À ce jour, il n’existe aucune explication connue de l’étrange analogie entre l’Iran et le Costa Rica qui, dans l’esprit de l’actuel Premier ministre d’Israël, ne fait pas l’ombre d’un doute. Des déclarations officielles récentes montrent que les liens entre le Costa Rica et Israël sont étroits (Note 1).
Outre la plage de Santa Teresa à Cóbano, déjà mentionnée, où un Israélien a été tué par d’autres Israéliens en avril 2021 (voir l’article de DiarioExtra de 2021), il existe plusieurs autres plages du Costa Rica qui connaissent un grand succès en Israël en tant que destination touristique. A l’heure où nous écrivons ces lignes (12 janvier 2025), aucune autorité judiciaire costaricienne n’a fait état d’une quelconque action en justice similaire à celles observées au Brésil et au Chili. Il convient de noter que la presse nationale a fait état d’un soldat à Gaza possédant un passeport costaricien (voir l’article de Teletica de novembre 2024), sans donner plus de détails sur le type d’opérations dans lesquelles il a été impliqué.
La requête de l’Irlande en bref
Dans sa requête de 23 pages (voir texte), l’Irlande présente certains arguments concernant l’interprétation des principales dispositions de la convention sur le génocide de 1948.
Il est à noter qu’en tant qu’Etat partie à la Convention sur le génocide de 1948, l’Irlande cherche à sensibiliser les juges de la CIJ au fait qu’ils devraient également être guidés par les interprétations qui reflètent le mieux l’esprit de la Convention.
La requête est fondée sur l’article 63, paragraphe 2, du Statut de la CIJ, disposition qui se lit comme suit :
« Article 63
1. Lorsqu’il s’agit de l’interprétation d’une convention à laquelle ont participé d’autres Etats que les parties en litige, le Greffier les avertit sans délai.
2. Chacun d’eux a le droit d’intervenir au procès et, s’il exerce cette faculté, l’interprétation contenue dans la sentence est également obligatoire à son égard ».
À la page 7, l’Irlande précise que:
« 20. Accordingly, Ireland has construed and applied Article I of the Convention as obliging Contracting Parties to prevent and punish commission of the crime of genocide and to refrain themselves from committing genocide. State responsibility under Article I will be engaged where the State has itself committed genocide or where it has failed to prevent its commission by persons acting on its behalf (whether ultra vires or not) or within its effective control.
21. Therefore, in Ireland’s view the Convention should be considered not only as a criminal law instrument that obliges Contracting Parties to establish jurisdiction over, and punish commission of, the crime of genocide by individuals, but also as a human rights instrument that obliges them not to commit genocide as well as to prevent genocide against any national, ethnical, racial and religious group (a ‘protected group’) under their protection or within their power« .
D’autre part, à la page 18, l’Irlande explique que :
« In respect of Article II (c) of the Convention, having regard to the object and purpose of the Convention, Ireland contends that the infliction of conditions oflife calculated to bring about the physical destruction of the protected group must also be construed and applied broadly. The Court has recognised Article II (c) as including ‘methods of physical destruction, other than killing. whereby the perpetrator ultimately seeks the death of the members of the group. ‘
In its Bosnia Judgment, the Court, while declining to reach a finding of genocide in that case, acknowledged that acts of encirclement, shelling and starvation could constitute material elements of genocide for the purposes of Article II ( c ). Again, the conditions of life imposed on the protected group, in whole or part, will have different impacts on different categories of group members, with vulnerable members such as children being more susceptible to adverse conditions, such as starvation« .
On y lit également que pour l’Irlande, l’intention délibérée d’entreprendre des actions militaires qui affectent la vie et la santé de mineurs ne doit pas être considérée comme une circonstance fortuite (ce que certaines armées et leurs conseillers juridiques appellent des « dommages collatéraux »), mais bien au contraire (pages 19-20) que :
« In assessing whether a pattern of conduct may disclose a genocidal plan or campaign, Ireland respectfully submits that extra weight should be given to evidence of the effects of the material acts of genocide on children, and on the consequences of such acts for the long-term viability of the protected group. This is especially important in the context of armed conflict where recent studies have concluded that children are up to seven times more likely to be killed by explosive weapons, and that hunger and malnutrition affects them much earlier and more severely.
Where there is evidence that children of the protected group have been particularly targeted, or that the conduct targeting the group made no distinction between child and adult members ofit, certain conclusions can be drawn. As children are essential to the continued existence of any human group, acts constituting the material elements of genocide directed at, or without making distinction for, child members of the group will have an obviously significantly greater impact on the resilience and ultimate survival of the group than the same acts directed at a similar or larger number of adult members.
Moreover, the psychological effects of these acts on surviving children may greatly impair their capacity to contribute to the growth of the group in the future. It therefore follows that certain reasonable inferences can be drawn from acts directed against, or failing to distinguish, child members of the group« .
L’Irlande note également que les déclarations officielles entendues en Israël depuis l’après-midi/la soirée du 7 octobre 2023 sont particulièrement pertinentes, de même que l’absence de récriminations ou de sanctions à l’encontre des auteurs de ces déclarations (page 20) :
« Regular public statements made on behalf of State organs, or by persons or entities empowered to exercise govemmental authority, that denigrate the protected group, as such, or that incite hatred or fear of it should, in Ireland’s view, be considered as forming a pattern of conduct from which reasonable inferences can be drawn for the purposes of the Convention. Likewise, measures that systematically discriminate against or persecute the group should also form part of a pattern of conduct to be assessed. In its construction of the Convention, Ireland has attached importance to the role a tolerant political environment plays in safeguarding the existence of any protected group within a wider society« .
Les quelques points énumérés ici ne constituent qu’une toute petite partie du document soumis par l’Irlande aux juges de la CIJ à La Haye : une lecture complète du document est recommandée afin de mieux comprendre l’importance que ces arguments (et d’autres) peuvent avoir pour éclairer la réflexion des juges lorsqu’ils prendront leur décision sur le fond.
L’Europe face à l’indicible drame de Gaza
La requête de l’Irlande est la deuxième soumise par un Etat membre de l’Union européenne (UE) à la CIJ en soutien à la plainte de l’Afrique du Sud contre Israël, après l’Espagne qui l’a fait le 28 juin 2024 (voir communiqué officiel de l’Espagne), et que nous avons eu l’occasion d’analyser (Note 2).
L’UE étant une organisation régionale de 27 Etats membres dont la politique étrangère est fondée sur les droits de l’homme et la lutte contre l’impunité, ainsi que sur le respect des obligations internationales découlant des instruments internationaux, le très faible nombre d’Etats soutenant la plainte de l’Afrique du Sud témoigne d’un manque de cohérence avec les principes proclamés dans une multitude de forums internationaux et de déclarations au nom de l’Europe.
Ce manque de cohérence rappelle d’ailleurs le titre de cet article du Semanario Universidad de novembre 2023 sur la réserve observée par le Costa Rica (voir note) pour dénoncer les exactions commises par Israël à Gaza, qui se lit comme suit : « Le Costa Rica est incohérent dans sa position sur Gaza, alors que pèse la négociation d’un ALE avec Israël (Tradution libre de l’auteur de: « Costa Rica es incoherente en su posición respecto a Gaza, mientras pesa la negociación de un TLC con Israel« ).
Pour en revenir à l’Europe, le même sentiment d’incohérence émerge à la lecture, d’une part, de l’engagement de l’UE en faveur de la justice pénale internationale et de la Cour pénale internationale (voir par exemple ce communiqué officiel du 17 juillet 2024) ; et d’autre part, du fait que les États ayant adressé une demande urgente ( « renvoi » ou « referral » selon le terme employé dans le texte du Statut de Rome) au Bureau du Procureur de la CPI face au drame inhumain à Gaza aient été:
– dans un tout premier temps, le Bangladesh, la Bolivie, les Comores, Djibouti et l’Afrique du Sud (voir texte en date du 17 novembre 2023), puis;
– le Chili et le Mexique en janvier 2024 (voir communiqué officiel du Chili et communiqué du Mexique).
Les spécialistes noteront que le renvoi conjoint du Chili et du Mexique au juge pénal international a été annoncé quelques jours après les audiences publiques tenues à La Haye concernant la demande en indication de mesures conservatoires par l’Afrique du Sud contre Israël dans le cadre de la CIJ (audiences auxquelles a assisté le représentant du Chili en personne – voir communiqué officiel -).
En ce qui concerne la CIJ, il convient de rappeler que la titulaire du portefeuille de la diplomatie belge avait annoncé son intention de déposer une requête à fin d’intervention auprès de la CIJ en soutien à l’Afrique du Sud en mars 2024, annonce qui n’a toujours pas été suivie d’effet (voir la note de TV5Monde du 11 mars 2024). C’est dans une situation similaire que se trouve l’Egypte, suite à une annonce officielle faite par sa diplomatie (voir cette note de l’agence Reuters mai 2024).
Justice pénale internationale et Israël: les manoeuves des uns et des autres, France inclue
Concernant un autre Etat membre de l’UE, le 9 janvier 2025, la Pologne a officiellement annoncé qu’elle avait pris toutes les mesures nécessaires pour que le Premier ministre israélien et son entourage puissent effectuer leur visite prévue le 27 janvier prochain sans aucune complication, à l’occasion de la commémoration de la libération du camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau (voir l‘article du Washington Post).
Comme on le sait, la Pologne a ratifié le Statut de Rome de 1998 et doit se conformer aux obligations internationales découlant de cet instrument. Les assurances de la Pologne sont une chose, mais les espaces aériens à survoler depuis Tel-Aviv pour se rendre en Pologne en sont une autre, et rien ne dit que la Premier ministre israélien se risquera à une aventure : depuis le 21 novembre, date d’une décision de la Chambre préliminaire de la CPI, ses déplacements au plan international constituent pour lui un risque majeur.
Les obligations juridiques découlant du Statut de Rome que la Pologne est disposée à ignorer sont identiques à celles de la France, qui devrait également les respecter : or, son Pouvoir exécutif semble vouloir passer outre ces obligations dans le cas du mandat délivré contre le Premier ministre israélien (Note 3). La position de la France concernant le Premier ministre israélien est d’autant plus surprenante qu’ en juin 2024, une décision de la justice française avait écarté le principe de l’immunité dont jouit le chef d´Etat syrien dans le cas d’affaires menées devant les juridictions françaises (voir communiqué sur la décision de la chambre d’instruction de la Cour d’Appel).
Avec cette attitude, on est en mesure d’avancer que la France perd tout ou bien une grande partie de sa crédibilité en ce qui concerne son engagement pour la justice pénale internationale, et ce, pour une large partie du monde qui l’observe, perplexe et indignée. Si on y ajoute quelques erreurs assez notoires de son actuel Président, proposant par exemple la création d´une « coalition internationale con le Hamas pour lutter contre le terrorisme » (sic.) similaire à la coalition existante contre l’Etat islamique – Daech – en novembre 2023, ou encore ses propos maladroits sur les Etats africains lors de la conférence des ambassadeurs tenue en janvier 2025, il se peut que bien des initiatives futures de la France aux Nations Unies soient vouées à l’échec, candidature d’un juge francais à la CIJ annoncée récemment (voir annonce officielle) inclue: en effet, la bataille pour une candidature de ce type se joue parmi les 193 Etats Membres qui votent au sein de l´Assemblée génerale des Nations Unies. Pour ceux qui soutiennent l’idée fixe selon laquelle « la CIJ a compté, compte et comptera toujours avec un juge francais en son sein« ), on se doit de rappeler qu’une idée semblable persistait aussi au Royaume Uni et en Russie. Les observateurs avisés des cinq nationalités permanentes depuis 1945 au sein de la CIJ conviendront que depuis 2018, la CIJ ne compte plus de juge britannique (candidature perdue face à celle de l’Inde); et que depuis 2023, la CIJ ne compte plus de juge russe en son sein (candidature perdue face à celle de la Roumanie). Aux errements répétitifs au plan international du chef de l´Etat, une complication supplémentaire est venue s’ajouter concernant la candidature annoncée par la France : le Royaume Uni a annoncé lancer la candidature d’un nouveau candidat (voir annonce officielle) 24 heures après l’annonce faite par la France.
La justice pénale internationale de La Haye a aussi observé que le 9 janvier 2025, le Congrès nord-américain a adopté un projet de loi visant à sanctionner le personnel de la CPI pour avoir enquêté et ordonné l’arrestation de deux dirigeants israéliens (voir article du New York Times) : un texte insolite dans l’histoire du droit international, adopté avec 247 voix pour et 155 contre (voir article de CNN), qui met en évidence la capacité de lobbying des cercles d’influence pro-israéliens au sein de la classe politique américaine. La position exprimée quelques jours plus tôt par un large groupe d’organisations de la société civile aux Etats-Unis (voir communiqué conjoint) est révélatrice de l’opposition à cette manœuvre de sa classe politique, ainsi que ce communiqué d’experts des Nations Unies en date du 10 janvier demandant au Sénat nord-américain de ne pas lui donner de suite: il s’agit d’un communiqué de presse fort peu relayé dans la presse internationale, comme bien d’autres auparavant concernant Gaza et Israël. On rappelera qu’en mai 2024, un vote similaire sur ce projet de loi avait eu lieu aux Etats Unis (Note 4).
Il n’est pas superflu d’indiquer que lorsque le 21 novembre 2024, trois juges de la Chambre préliminaire de la CPI ont confirmé les demandes de mandats d’arrêt contre deux haut dirigeants israéliens et un chef militaire du Hamas, décision au demeurant fort peu commentée dans les cercles juridiques et autres cercles spécialisés – comme ce fut aussi le cas en février 2021 (Note 5) -, les plus hautes autorités israéliennes n’ont rien trouvé de mieux que d’accuser les juges de la CPI d’ « antisémitisme » (voir article publié dans le TimesofIsrael). Ces déclarations incendiaires des dirigeants israéliens ne sont pas nouvelles, et peuvent expliquer en partie l’origine des menaces contre les juges et le personnel de la CPI, qu’a dénoncé sa Présidente le 28 novembre 2024 (voir texte de son communiqué officiel en francais et en anglais).
Un petit noyau d’États engagés en faveur de la justice internationale à Gaza
Avec sa requête, l’Irlande s’associe aux requêtes à fin d’intervention similaires soumises à la CIJ par un petit nombre d’États soutenant la requête de l’Afrique du Sud, à savoir : la Bolivie, le Chili, la Colombie, les Maldives, le Nicaragua, la Palestine, l’Espagne, la Turquie et le Mexique. Il s’agit d’États qui, observant les mêmes images déchirantes en provenance de Gaza jour après jour depuis l’après-midi/soirée du 7 octobre 2023, ont décidé de soutenir, au-delà des annonces (et des effets d’annonce dans le cas de la Belgique et de l´Egypte), la demande intentée par l’Afrique du Sud contre Israël à partir du 29 décembre 2023 devant la justice internationale de La Haye (voir texte de la requête introductive d’instance sudafricaine).
On se doit de signaler que juridiquement, seuls les États parties à la Convention sur le génocide de 1948 (voir état officiel) ont la possibilité de présenter une requête à fin d’intervention : selon le tableau précité sur l’état des signatures et des ratifications, 153 États au total ont ratifié cette convention.
Le dernier Etat avant l’Irlande à avoir soumis une requête similaire aux juges de la CIJ a éte la Bolivie le 8 octobre 2024 (voir le communiqué de presse officiel en français et en anglais de la CIJ du 9 octobre et le communiqué officiel sur cette requête émis par la diplomatie bolivienne elle-même): il s’agit de la requête à fin d’intervention provenant d’Amérique latine numéro 5, après celle en janvier 2024 du Nicaragua, de la Colombie (avril), du Mexique (mai), du Chili (septembre) et que nous avions eu l’occasion d’analyser lors de sa présentation au mois d’octobre 2024 (Note 6). A la différence des autres, la requête présentée par le Nicaragua se distingue en raison du fondement juridique utilisé pour intervenir, à savoir l´Article 62 du Statut de la CIJ et non pas l´Article 63, paragraphe 2 (Note 7).
En guise de conclusion
L’acharnement d’Israël contre la population civile de Gaza depuis l’après-midi/soirée du 7 octobre 2023 est observable par tous les membres de la communauté internationale. Les rapports successifs des divers organes des Nations Unies qui sont publiés régulièrement le documentent abondamment.
Nonobstant, tous les Etats ne semblent pas disposés à activer les mécanismes juridictionnels existants à leur disposition afin de forcer Israël à répondre de ses actes devant la justice internationale.
Malgré l’incohérence de certains Etats, nous avons récemment eu l’occasion d’expliquer comment l’étau de la justice internationale (et aussi de la justice nationale dans le cas de quelques Etats) se referme lentement sur Israël, aussi bien sur ses plus hautes autorités que sur certains de ses militaires qui (pour une raison qu’il serait souhaitable d’enquêter), voyagent comme touristes en Amérique latine comme si de rien n’était, après avoir commis des crimes de guerre à Gaza (Note 8).
Dans le cadre d’une autre procédure de la CIJ, la procédure consultative, l’année 2024 s’est achevée par une ordonnance de la CIJ pour donner suite à la demande d’avis consultatif de l’Assemblée générale des Nations Unies (voir texte de l’ordonnance, adoptée le 23 décembre 2024): il s’agit d’une initiative présentée par la Norvège en octobre 2024, et que nous avons également eu l’occasion d’analyser pour ce qui est de sa genèse et de sa portée (Note 9).
– – Notes – –
Note 1: On se soit en effet de noter que le Costa Rica a annoncé la reprise des négociations d´un acord de libre échange avec Israël en octobre 2024, comme si de rien n’était (voir note officielle du Ministere du Commerce Extérieur – COMEX – et cette note du programme Amelia Rueda du 18 octobre 2024. Le 24 octobre 2024, la désignation d’un ambassadeur du Costa Rica en Israël a été également annoncée (voir note officielle de la Présidence). Enfin, en pleine COP29 de Bakou, le Costa Rica a jugé opportun d’annoncer la conclusion d´un mémorandum (MoU) avec Israël dans le domaine environnemental (voir communiqué officiel du 13 novembre 2024 et communiqué officiel des autorités israéliennes). En réaction, le Costa Rica s’est vu décerné le peu glorieux prix de « Fossile du Jour » par un groupe d´ONG indignées (voir article publié dans Ojoalclima, dont la partie finale témoigne d’une fin de non recevoir de la part des autorités du Costa Rica pour s’expliquer).
Note 2: Cf. (en espagnol) BOEGLIN N., « Gaza / Israel: algunos apuntes sobre la solicitud de intervención presentada por España ante la Corte Internacional de Justicia (CIJ)« , 3 juillet 2024. Texte disponible ici.
Nota 3: Concernant les mandats d’arrêt confirmés par la CPI à l’encontre de deux dirigeants israéliens et d’un commandant militaire du Hamas, la France a publié un communiqué officiel très discutable au plan juridique: cf. l’un des rares articles parus sur ce communiqué : MAISON R., « France, l´amitié avec Israël comme excuse de la violation du droit international« , Orient XXI, édition du 19 décembre 2024. Texte disponible ici. Dans cette note que nous avions édité pour le public francophone et intitulée « Gaza / Israël : la portée des mandats d’arrêt délivrés récemment par la Cour Pénale Internationale (CPI) et la surprenante réaction officielle de la France » nous nous sommes permis d’indiquer que:
« Cette ligne jurisprudentielle appliquée aux visites de chefs d´Etat étrangers en France mérite une explication un peu moins juridique que nous allons tenter de donner : on peut serrer la main de tout chef d´Etat étranger sur le perron de l’Elysée, y ajouter les accolades de rigueur, sourires affables et poses devant les journalistes, et ce chef d’Etat bénéficie sur le territoire de la France de l’immunité accordée à tout chef d’Etat. Et ce même si il est suspecté de commettre un génocide, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou d’autres violations graves des droits de l´homme. A la question que toute personne peut légitimement se faire « Mais,… ils sont nombreux ces chefs d’Etat étrangers? », on peut répondre qu’il y en a effectivement un bon nombre. Par contre, et dans ce cas le nombre est bien moindre, lorsque ces accusations ont été soigneusement examinées et méticuleusement documentées par le Procureur de la CPI, puis revues méthodiquement par trois juges de la CPI, et que ce chef d’Etat étranger fait finalement l’objet d’un mandat d’arrêt délivré par une Chambre préliminaire de la CPI, le droit international s’impose automatiquement aux autorités françaises en vertu du Statut de Rome : on procède alors à la capture de ce même chef d’Etat s’il se trouve en France par les autorités nationales compétentes, et on le remet sans tarder aux juges de la CPI à La Haye. Fini le temps des accolades devant les caméras« .
Note 4: Pour ce qui est de Etats-Unis, on se doit de rappeler cette initiative du Congrès nord-américain datée du 7 mai 2024 visant à sanctionner la CPI si elle s’aventurait à ordonner une enquête ou des poursuites concernant les dirigeants politiques et militaires des alliés des États-Unis. Cette initiative, approuvée en juin 2024 (voir l’article du TheGuardian), est justifiée, selon le préambule, « pour imposer des sanctions à l’égard de la Cour pénale internationale engagée dans tout effort d’enquête, d’arrestation, de détention ou de poursuite de toute personne protégée des États-Unis et de leurs alliés » / Traduction libre de l’auteur de « To impose sanctions with respect to the International Criminal Court engaged in any effort to investigate, arrest, detain, or prosecute any protected person of the United States and its allies ». Aucune mention n’est faite d’Israël dans ce texte, mais il est intéressant de noter que l’initiative a été présentée le 7 mai 2024, tout juste quelques semaines avant que le Procureur de la CPI ne demande publiquement des mandats d’arrêt à l’encontre de deux dirigeants israéliens et de trois dirigeants du Hamas le 20 mai. On notera que la liste des promoteurs de cette initiative du Congrès américain comprend certains des proches collaborateurs nommés depuis le 5 novembre par le nouveau Président élu nord-américain pour occuper des postes importants dans sa future administration.
Note 5: Cf. notre article BOEGLIN N., « Palestine / Cour Pénale Internationale (CPI) : brève mise en perspective concernant la décision récente de la Chambre Préliminaire« , Le Monde du Droit, édition du 24 févier 2021. Texte complet disponible ici, également publié dans une version plus longue sur le Club de Media Part, édition du 17 mars 2021. Cf. aussi DUBUISSON F., « Le jugement de la Chambre préliminaire de la CPI du 5 février 2021 statuant sur la compétence territoriale de la Cour en Palestine« , Le Club des Juristes, édition du 2 mars 2021. Texte complet disponible ici.
Note 6: Cf. (en espagnol) BOEGLIN N., « Gaza / Israel: a propósito de la reciente solicitud de intervención de Bolivia ante la CIJ« , 9 octobre 2024. Texte disponible ici.
Note 7: Il convient de noter une spécificité du Nicaragua dans la requête à fin d’intervention auprès des juges de la CIJ dans le différend entre l’Afrique du Sud et Israël (voir texte complet de la requête déposée le 23 janvier 2024 en français et en anglais). Alors que l´Irlande et les autres États ont invoqué l’article 63 du Statut de la CIJ (voir texte), qui permet à tout État partie à une convention d’intervenir lorsqu’il s’agit de l’interprétation à donner aux dispositions de cette convention faisant l’objet d’un différend entre deux États devant la CIJ, le Nicaragua (et la Palestine) ont choisi d’invoquer une autre disposition, qui comporte un enjeu beaucoup plus important pour l’État qui l’invoque : l’article 62 du Statut de la CIJ, qui se lit comme suit :“Article 62: 1. Lorsqu’un Etat estime que, dans un différend, un intérêt d’ordre juridique est pour lui en cause, il peut adresser à la Cour une requête, à fin d’intervention. 2. La Cour décide”. La position du Nicaragua (voir texte complet de la requête déposée le 23 janvier 2024 en français et en anglais) cherche à pousser jusqu’à ses dernières conséquences l’idée que l’interdiction du génocide est une norme de jus cogens de nature impérative qui lie tous les Etats de la même manière : tous les Etats devraient, logiquement, avoir un intérêt juridique au respect de cette norme fondamentale, et une déclaration en ce sens de la CIJ renforcerait les effets de ce que l’on appelle les « normes impératives du droit international général », telles que consacrées par l’article 53 de la Convention de Vienne sur le Droit des Traités de 1969. Une relecture de la requête du Nicaragua sur la base de cet élément permet de mieux comprendre les nombreuses références faites par le Nicaragua dans le texte de sa requête à cette catégorie spécifique de règles fondamentales de l’ordre juridique international, rarement invoquées devant le juge international de La Haye par les Etats qui plaident devant lui.
Note 8: Cf (en espagnol) BOEGLIN N., « Gaza / Israel: algunos apuntes desde Costa Rica con relación al cerco de la justicia que se cierra poco a poco« , 3 janvier 2025. Texte disponible ici.
Nota 9: Cf. (en espagnol) BOEGLIN N., « Gaza / Israel: la reciente ordenanza de la Corte Internacional de Justicia (CIJ) en el marco de la solicitud de opinión consultiva« , 26 décembre 2024. Texte disponible ici.
Note de l’auteur: une version en espagnol est également disponible ici