A cet enjeu s’ajoute celui, primordial, d’une législation assurant l’équilibre de l’espace de diffusion pour les différents types de médias, de statut public, privé ou communautaire. Reporters sans frontières en a soutenu le principe dans d’autres pays de la région, où une telle loi est soit adoptée, soit à l’étude, tout en demeurant très vigilante quant à ses conditions d’application. La recherche d’équilibre doit s’accompagner de garanties d’indépendance”, a déclaré l’organisation.
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La fin des médias publics ?
Le débat resurgit alors que s’annonce la liquidation définitive, le 24 septembre prochain, du quotidien La Nación, employant une trentaine de journalistes, et détenu à 70 % par l’État et à 30 % par des actionnaires privés. Le début de présidence de Sebastián Piñera, en 2010, a signé la fin de l’édition imprimée du journal, dont ne subsiste plus que la version en ligne. La disparition programmée de La Nación fait notamment craindre aux organisations professionnelles le renforcement d’une concentration déjà élevée de la presse écrite au seul avantage des deux groupes privés nationaux dominants : El Mercurio et Copesa (éditeur du quotidien La Tercera). Dans le domaine audiovisuel, la même crainte porte sur la privatisation de la Télévision Nationale (TVN), qui pourrait bientôt faire l’objet d’une loi.
Radios communautaires en marge
Le décret loi 20.433 de mai 2010, instituant les Services de radiodiffusion communautaire et citoyenne, devrait en théorie permettre au sous-secrétariat aux télécommunications (Subtel) de dégager un espace de fréquences pour les radios communautaires d’une puissance inférieure ou égale à 25 watts. Ce projet implique la nécessaire cession ou réaffectation de fréquences, le consortium Iberoamericana Radio Chile (propriété du groupe espagnol PRISA) en détenant à lui seul 211.
Or, le 21 août dernier, PRISA a refusé de signer un accord en ce sens, élaboré pendant un an par la Subtel et des représentant du secteur radiophonique. Rejetant des ajustements techniques pour ses propres radios, le groupe a subordonné son approbation du texte à la garantie de renouvellement de certaines de ses fréquences, dont doit décider la Cour d’appel de Santiago. Reporters sans frontières se joint à l’Association mondiale des radiodiffuseurs communautaires (AMARC) pour exiger l’application de l’accord établi par la Subtel, à laquelle PRISA n’a pas à dicter ses conditions.
L’autre principal problème pour les diffuseurs communautaires concerne le très répressif article 36B de la loi générale de télécommunications 18.168. Celle-ci, adoptée en 1982 sous la dictature, prévoit toujours des peines de prison ferme en cas de diffusion sans fréquence légale. C’est notamment à l’appui de l’article 36B qu’ont été confisqués, le 28 août dernier à Collipulli (Araucanie), les équipements de la station communautaire Radio Vecina, et son représentant Víctor Díaz détenu pendant dix heures. Trois autres cas récents de menaces d’application de l’article 36B ont été portés à la connaissance de Reporters sans frontières : celui de la radio indigène Mapuche Kimche Mapu, toujours en Araucanie, celui de Radio Lógica en région métropolitaine (Santiago) et celui de Radio Galáctika dans les environs de Valparaíso. L’organisation réclame l’abrogation pure et simple d’une disposition légale criminalisant de petits médias qui attendent, pour beaucoup, leur régularisation depuis plus de dix ans.
Enfin, alors que les protestations sociales et étudiantes reprennent de l’ampleur, Reporters sans frontières espère ne pas voir se reproduire les détentions, parfois brutales, de photographes présents dans les cortèges, comme celles des deux indépendants Juan Pablo Reyes et Tamara Carrasco, le 26 août ; celle du photographe de La Nación Esteban Garay, le 28 août ; ou encore celle, le lendemain, de son collègue du site Factor Absoluto Víctor Arce.