En 2009, alors que le Front de Gauche tout juste naissant atteignait les 11% aux élections européennes, on a pu croire à nouveau à l’émergence d’une grande force sociale de gauche (la vraie gauche.)
Mais les résultats des dernières élections municipales et européennes en France montrent la difficulté de cette force sociale à s’imposer dans les urnes.
Déplorant cet échec, le Parti Humaniste n’en est pourtant pas surpris.
On peut évidemment expliquer ces résultats décevants par le rôle des « grands médias » – porte- parole de la pensée unique – qui s’efforcent de discréditer ces mouvements en les classant dans l’extrême gauche, ou tout simplement dans l’utopie. On peut aussi l’expliquer par le fait que la France – comparativement à la Grèce ou dans une moindre mesure l’Espagne[1] – ne connaît pas encore une crise assez violente pour avoir foi dans ces alternatives. Mais, ces explications ne semblent pas suffisantes.
Tentons d’aller plus loin en comprenant la logique interne qui guide ces différents partis et mouvements de gauche, écologiques et alternatifs.
Premier constat : ces organisations se rassemblent non pas autour d’un projet pour une société nouvelle – voire un projet de civilisation – mais dans une opposition au système néolibéral[2].
Or, en se positionnant ainsi, – en se plaçant contre le système et non en faveur d’une alternative radicalement différente – c’est finalement ce système qui les définit. Et cet emplacement de base n’est pas sans conséquence.
Tout d’abord, il signale une vieille forme de faire de la politique, celle-là même que plus personne ne veut malgré les bonnes idées proposées par les uns ou par les autres.
Cette vieille forme de faire de la politique consiste avant tout à avoir des élus[3], généralement des professionnels de la politique ou des leaders, pour qui projet politique est synonyme de réussite électorale et de carrière personnelle. Or précisément, les gens ne veulent plus de ces leaders qui les ont si souvent trompés.
Par ailleurs, en ne formulant de projets politiques qu’au regard du marasme économique, social et environnemental produit par le système néolibéral, ce dernier reste, de fait, la référence. Pas de rêve ; pas de changement de paradigme. Aucun ne porte véritablement un projet visionnaire pour la société – encore moins pour l’être humain – sinon une série de propositions « techniques » visant à sortir des différentes crises précités. C’est un peu comme si – dans une sorte d’acharnement thérapeutique – chacun proposait une solution pour sauver le mourant.
Or, pour le Parti Humaniste, ce système néolibéral est non seulement condamnable mais d’ores et déjà condamné ; il est mourant y compris dans la pensée et dans le cœur de beaucoup de gens….
Et parmi ces gens, il y a bien sûr les personnes en colère qui votent pour des extrêmes. Mais il y a également tous les autres – les abstentionnistes probablement, les jeunes sûrement – qui s’éloignent de tous les slogans.
Est-ce à dire que ces gens ne font pas de politique ? Non, bien sûr qu’ils font de la politique ! Mais ils la font autrement : hors de tout parti ou de toutes formes d’organisation qui voudraient les capter. Comment font-ils ? Ils se rassemblent puis se désassemblent en différents collectifs ou se concentrent sur une manière plus perceptible et le plus immédiate d’agir : les Villes en transition, Alternatiba, notre Dame des Landes, Colibri, les Faucheurs…
Ils agissent dans leur quotidien et pour leur quotidien, souvent en pensant globalement. Bref, ils se prennent déjà en charge.
Dans ce contexte, aucune alternative ne pourra plus être portée par un « état-major » politique. En revanche, faire de la politique devra simplement consister à mettre en synergie ces initiatives citoyennes et locales, car c’est de là que doit émerger la représentativité d’une démocratie réelle et directe.
[1] En Grèce, Syriza – l’équivalent du Front de Gauche sans les communistes – a fait 26,58%. ; en Espagne, la Gauche plurielle et Podemos rassemblent 17% des voix. Ceci dit, dans les 2 pays, le taux d’abstention est également élevé : respectivement, 40% et 54%.
[2] C’est en effet après le « non » à la constitution européenne et le Traité de Lisbonne en 2007 qu’émergent ces tentatives de regroupement.
[3] D’ailleurs, les représentants de ces mouvements sont pour la plupart des professionnels de la politique, ayant tous des mandats