J’ai aimé être une épouse, j’ai adoré être maman.  Mais je me suis souvent sentie coupable … de ne pas en faire assez, de partir en Afrique et ailleurs pour des projets humanistes, de continuer à travailler dans des boulots de plus en plus satisfaisants… Aujourd’hui, à 69 ans, je lis avec surprise et délectation ce livre «  Sorcières, la puissance invaincue des Femmes »  aux éditions  Zones.

Vraiment, à toutes celles et ceux qui ont choisi un chemin « différent », hors de la vision « reproductible » des femmes, je conseille absolument ce livre.  Ecrit par une plume alerte et précise – L’auteure est journaliste, tout d’abord pour Charlie Hebdo, puis éditrice en chef au monde diplomatique- elle propose de parcourir l’histoire des préjugés au fil du temps.  Stupéfiant ! Même si l’humour fait parfois passer la pilule !!  En réalité, était considérée comme Sorcière toute femme revendiquant son indépendance et sa liberté, son pouvoir de séduction.

En situant le choix de la femme actuelle dans le contexte de l’histoire des chasses aux sorcières, Mona Chollet propose une réflexion à la fois personnelle et sociale.  En effet, chacune de nous- elle comprise- femmes, nées à des époques différentes, tentons de nous libérer de chaines invisibles – ce sacré sentiment de culpabilité – ou visibles : les inégalités persistantes entre hommes et femmes.

Mona Chollet nous livre son combat intérieur, ses recherches et de nombreux témoignages poignants.

Elle dénonce … les propos inadmissibles, tel que «les femmes qui n’enfantent pas sont des erreurs, des veuves d’elles-mêmes » repris d’un livre de Macha Méril, comédienne, ou encore, raconté avec effarement par le docteur Martin Winckler (*) ayant un jour entendu des confrères lui dire : « Oui, bon, mais quand tu prescris un stérilet ou un implant, tu te rends compte que c’est une violence imposée au désir inconscient des femmes d’être enceintes ?

Elle propose aussi … De nombreuses références littéraires qui nous donnent bien envie d’aller plus loin ;  le film « Aurore » de Blandine Lenoir qui raconte l’histoire d’une quinquagénaire française tout à coup sans emploi et grand-mère au même moment ; l’expérience de La Maison des Babayagas à Paris, maison de retraite autogérée (2013), initiée par Thérèse Clerc, militante féministe, qui propose 61 logements pour femmes agées… et tellement d’autres publications, littéraires et audiovisuelles, toutes passionnantes dans leur travail de démontage des représentations discriminatoires.

Je laisse ici l’auteure conclure « … il peut y avoir une immense volupté – la volupté de l’audace, de l’insolence, de l’affirmation vitale, du défi à l’autorité- à laisser notre pensée et notre imagination suivre les chemins sur lesquels nous entraînent les chuchotements des sorcières.  A tenter de préciser l’image d’un monde qui assurerait le bien-être de l’humanité par un accord avec la nature, et non en remportant sur elle une victoire à la Pyrrhus(…) »

(*)Martin Winckler « Les Brutes en blanc. La maltraitance médicale en France, Flammarion, Paris, 2016.