En ce mois de mai 2024, le parlement belge a voté l’intégration du crime d’écocide(*)dans le code pénal. Cela veut dire que, au même titre que le génocide ou les crimes contre l’humanité, les peines encourues pourront être jusqu’à 20 années d’emprisonnement et 1,8 millions d’euros d’amende.
C’est ainsi que Benjamin Van Bunderen Robberechts et sept autres personnes, accompagnées par des ONG ont déposé plainte contre Total Energy. Avec un dossier de plus de 198 pages, ils espèrent freiner la logique meurtrière de la multinationale.
Déjà, en janvier 2023, Luc Feys, agriculteur, porte plainte devant le tribunal de Tournai. Il reproche à l’entreprise d’être responsable du réchauffement climatique, avec des conséquences pour son travail. Il vient de Bois-de-Lessines et a préparé un dossier juridique de plus de 190 pages, depuis 2 ans avec plusieurs associations.
En 2021, Benjamin tente de sauver son amie Rosa, emportée sous ses yeux lors des inondations en Belgique. Depuis, il décide de s’engager pour le climat et de dénoncer une situation meurtrière absurde. En effet, déjà, dans les années 70, Total Energy connaissait très bien les conséquences de ses activités sur le changement climatique. Il est prouvé que les responsables ont délibérément semé le doute et poursuivi leurs activités en toute connaissance de cause, dans le but unique de poursuivre leurs investissements croissants dans les énergies fossiles.
Même si la Belgique n’aura qu’un pouvoir limité à ses frontières – par exemple la mer du Nord-, l’intégration du crime d’Ecocide dans le code pénal belge est une première importante qui pourrait inspirer d’autres pays européens.
Pour poursuivre son combat en-dehors des frontières, Benjamin se retrouve à Paris, il y a quelques jours. Avec d’autres ONG en soutien, ils déposent plainte contre Total Energy pour crime d’Ecocide, homicide involontaire et atteinte à la biodiversité.
Claire Nouvian, directrice-fondatrice de l’ONG Bloom, spécialisée sur les océans, qui coordonne et finance l’action pénale en France, affirme que « laisser faire (TotalEnergies, ses dirigeants et actionnaires) reviendrait à leur donner un droit au ‘globocide’. C’est impensable. C’est pourquoi nous sommes déterminés à arrêter les criminels climatiques ».
Au niveau européen, une directive est à l’étude concernant la criminalité environnementale, destinée à dissuader tous les types de destruction grave de la nature, comme la pollution de l’eau à grande échelle ou la déforestation illégale.
Ces dernières années, des organisation et mouvements environnementaux tels que Stop Ecocide, Greenpeace, Canopea, Rise for Climate, Climate Justice for Rosa, la Fondation européenne pour le droit du vivant, Kaya, Climate Coalition et Grandparents for Climate ont fait campagne ensemble pour la reconnaissance de l’écocide en Belgique. Plus de 43 000 citoyen·nes ont signé une pétition pour que notre code pénal intègre une définition ambitieuse de l’écocide.
Restons vigilants !! Greenpeace et Stop Ecocide Belgium entre autres s’inquiètent d’un passage du nouveau code pénal qui pourrait mettre en péril le droit de manifester. Le nouvel article criminalisant les “Atteintes méchantes à l’autorité de l’État » permettra une interprétation très large, de nature à menacer directement les manifestations pacifiques et les actions de désobéissance civile.
A suivre donc, surtout en période de campagne électorale !
Pour aller plus loin : lire le manifeste pour le vote de la loi : https://www.stopecocide.be/manifest ; Communiqué de presse Greenpeace : https://www.greenpeace.org/belgium/fr/communique-de-presse/56257/la-belgique-integre-lecocide-dans-son-code-penal/
(*)Écocide a pour racine « Eco » qui en grec « ΟΙΚΟΣ» signifie la maison et « cide » du latin « occidere » qui signifie tuer. Il s’agit d’un acte criminel consistant à détruire délibérément et en totalité un écosystème que ce soit par le puisement complet des ressources d’une zone, de la mise en danger de son écosystème, ou du trafic international d’espèces protégées qui y sont installées. Le concept de crime d’écocide est débattu depuis 1947 au sein de la Commission du droit international pour préparer le Code des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité. Depuis la fin des années 1990, plusieurs tentatives ont visé à l’intégrer dans le droit international. Mais sans succès à ce jour.