Un moment de grâce nous a été offert en ce dimanche soir, en compagnie de l’ensemble La Noeva(*) au sein de la magnifique cathédrale Sainte Gudule. Imaginez .. un coeur de femmes nous invitant à suivre leurs déplacements au son des chants inspirés de Hildegard Von Bingen, suivant les axes énergétiques de la cathédrale, cristalisant les vibrations sonores en une illumination profonde au choeur de l’édifice. La centaine de participants étaient subjugués, d’un silence absolu, laissant la polyphonie magnifique envahir tout l’espace sonore.
Hildegard Von Bingen, compositrice médiévale est ici mise à l’honneur. Née en 1098, rappelons qu’elle fut l’une des rares femmes de l’époque à diriger un monastère, rédiger des manuels de naturopathie et dispenser des chroniques religieuses très écoutées. Originaire de la région du Rhin en Allemagne, elle se montre depuis toute petite extrèmement sensible au monde qui l’entoure, en y intégrant des visions mystiques transformatrices, créant ainsi une relation intime et transcendante avec la nature et l’être humain. Tout – la lumière, la pierre, l’homme et la femme – sont instruments de Dieu. Son obsession et ses doutes vont la suivre sur cette quête de l’illumination. Elle n’hésite pas à défendre avec vigueur la place de la femme dans le monde chrétien. Plus tard, elle sera connue pour les visions décrites et illustrées dans de nombreux ouvrages, reconnues par les papes de l’époque comme manifestations de l’esprit sacré. En effet, c’est lors d’une vision à l’âge de 65 ans qu’il lui a été demandé d’écrire ce qu’elle voit. Tois livres vont être ainsi rédigés en latin courant, livres illustrés par des représentations symboliques.
A son époque, les monastères deviennent des cathédrales, passant ainsi d’un univers horizontal vers la verticalité, en prélude de la recherche de la vraie révélation lumineuse, portée par la richesse énigmatique de la pierre. Qu’elle soit travaillée, affinée pour qu’elle devienne légère, symbole de la danse de la création. La cathédrale est ainsi la manifestation extérieure de cet élan lumineux, la vision en est la manifestation intérieure. L’être humain deviens ce lieu où la clarté divine s’épanouit. Là, le blanc et le noir sont des éléments complémentaires d’une même illumination et la poésie comme la mystique ne cesseront de mêler de manière indissociable la grande lueur solaire et la profondeur de la nuit car la nuit aussi est un soleil et le vrai soleil, celui des alchimistes est noir.
A plus de 80 ans, elle prévient son entourage qu’elle va mourir le 17 septembre 1179. Pour la population, elle est une sainte, vénérée encore aujourd’hui tous les 17 septembre, date de sa mort. Il a fallu attendre 2012 pour qu’elle devienne la 4ème femme canonisée par l’Eglise.
Elle laisse derrière elle des livres, des manuels de santé et d’alimentation et des oeuvres musicales remarquables. Ele sera l’une des compositrices les plus prolifiques du 12ème siècle, continuant d’inspirer les compositrices contemporaines telles que celles du groupe La Noeva.
Moment magique donc, où l’inspiration profonde peut prendre place dans le coeur de chacun.e, au service du plus beau des espoirs.
(*)La Noeva est un ensemble de voix de femmes a cappella créé par six chanteuses désireuses d’aborder un répertoire original de musique médiévale, traditionnelle et contemporaine. Depuis sa création, l’ensemble tient particulièrement à mettre en résonance des chants du Moyen-Âge avec des compositions vocales d’aujourd’hui. https://lanoeva.be/