La Conférence de Dubaï 2023, ou COP 28 pour les intimes, aura lieu du 30 novembre au 12 décembre 2023 aux Émirats arabes unis, sous l’égide du sultan Ahmed al-Jaber, éminent ministre de l’Industrie, mais également PDG de la compagnie pétrolière Abu Dhabi National Oil Company ; c’est compréhensible, le pétrole, là-bas, on peut dire que c’est la raison d’État.
Le vrai visage de la COP
Le cadre de la farce est posé : on entend déjà les clameurs des ONG qui ont de surcroît appris que McKinsey, en coulisse, abreuvait les participants des Émirats en études qui pourraient s’avérer frelatées… les relations haut placées de ce cabinet international ont de quoi faire frémir tout militant. Les dés sont pipés, comme ils l’ont été déjà maintes fois et l’on pourrait s’épargner cette débauche de grand luxe dispensée — non, non pas pour les petits participants, loin de là ! mais pour le gratin. Et cela, à nos frais, cela va de soi. Car ce sont les contribuables, vous et moi, qui payons les dépenses énormes qu’engendre cette mascarade, comme tout autre sommet d’ailleurs ! Tandis que les membres des ONG sont obligés de s’y rendre par leurs propres moyens, alors qu’ils n’ont même pas la possibilité de faire partie des débats importants pour lesquels ils ont cependant travaillé d’arrache-pied : dégradés au rang de figurants, on fait d’eux de simples observateurs marginaux, alors que ce sont eux qui ont les vraies solutions. Mais veut-on des solutions au niveau des gouvernements ? Certes, des États plus touchés que d’autres ont prêché pour que soient mobilisés des fonds, mais tant que ce ne sont pas les puissants pays de l’hémisphère nord qui s’érigent en bon exemple, c’est peine perdue. La disparité se retrouve à tous les niveaux : on soigne plutôt mieux les riches que les pauvres, le niveau d’éducation élevé est davantage à portée de main pour les riches que pour les pauvres, la justice climatique est un hochet pour les pays riches tandis que pour les pays pauvres, c’est une question de vie ou de mort : les êtres humains n’ont pas tous la même valeur, c’est quasiment un truisme d’évoquer cela.
L’avenir seulement pour les 1% ?
Et les riches achètent tout, même les lois qui leur permettent de continuer leur trajet de prédateurs aux frais des autres couches de population démunies. C’est tellement évident dans le documentaire du Suédois Fredrik Gertten, Breaking Social. Sous-jacente est la question qui enrichit la trame du film : avons-nous encore les moyens d’assumer les riches ? Leur réseaux savamment orchestrés leur permettent d’entretenir leurs relations à tous les étages, de tout acheter, et la journaliste maltaise, Daphne Caruana Galizia, qui avait eu l’audace de plonger son nez trop profond dans la corruption, l’a payé de sa vie en 2017. La COP est l’illustration parfaite qu’à notre époque, l’avenir a fait l’objet d’une privatisation, comme le soutient le professeur en théorie culturelle allemand, Felix Heidenreich : l’avenir appartient aux riches. Ils ont poussé à l’extrême cette privatisation : en témoignent les SUV. Alors qu’il est une tâche collective, l’avenir semble être réservé aux seuls 1 %. Il faut arriver à renverser la vapeur et rebâtir des narratifs qui véhiculent un sentiment de confiance en l’avenir et l’ancrent dans la démocratie.
Boycotter une COP aussi inutile que les précédentes
Dommage que le pape François ne puisse y participer. Il aurait été le premier pape à s’y rendre. Son discours n’aurait peut-être pas fait fléchir les mauvaises intentions de ceux qui se dissimulent sous de belles promesses, mais il aurait tout de même fait impression car on l’aurait laissé parler, lui. Une raison de plus pour boycotter ce cirque. L’OCA américaine, Organic Consumer Association, par exemple, est d’avis que les centaines de milliers de dollars qui seront jetés par la fenêtre pour héberger, transporter, nourrir les ministres de 196 pays au cours de leur équipée au Moyen-Orient, seraient bien plus utilement dépensés s’ils étaient redirigés vers des projets en faveur des écosystèmes pour régénérer le climat, l’environnements, les sols, l’alimentation et les systèmes agricoles ainsi que les communautés. Ce dont nous avons toutes et tous grandement besoin et ce, de toute urgence.
« Les pollueurs ont détourné ces rencontres internationales. C’est un cas classique de récupération de la règlementation, et au lieu de travailler pour les populations, les autorités chargées de la règlementation vont le faire pour les pollueurs. »
C’est un peu comme envoyer un pyromane pour tenter d’éteindre un incendie… les pays producteurs de gaz et de pétrole ont tout l’argent qu’il faut pour défier l’aridité de leurs pays et faire naître des projets insensés au milieu du désert, tandis que les populations à risque se voient acculées aux conséquences impitoyables du changement climatique. Qu’elles meurent de faim, de soif ou sous les flots des inondations, selon les caprices des intempéries, ce n’est pas vraiment le premier souci de ces messieurs. Il faut donc continuer à œuvrer pour changer les mentalités et faire bouger les choses, sans trop se soucier de ce qui vient d’en haut, ce sera moins frustrant !
Aucune des COP jusqu’à présent n’a réussi à enrayer un tant soit peu les émissions de GES (gaz à effet de serre), aucun des accords ne peut s’enorgueillir d’avoir atteint ses objectifs, ils s’avèrent donc – soyons clairs – totalement inutiles et, qui plus est, dispendieux ! C’est du bluff pour calmer la piétaille qui piaffe d’impatience. Autant dire : « 30 ans de gâchés », c’est en tout cas le bilan que tire l’OCA.