Ce jeudi 9 novembre 2023, le Conseil d’État a publié sa décision d’annuler le décret de dissolution des Soulèvements de la terre estimant « qu’aucune provocation à la violence contre les personnes ne peut être imputée aux Soulèvements de la Terre. » et « que la dissolution des Soulèvements de la Terre ne constituait pas une mesure adaptée, nécessaire et proportionnée à la gravité des troubles susceptibles d’être portés à l’ordre public. ». Il est la plus haute juridiction administrative de l’état français, arbitre les litiges opposant citoyens, associations et entreprises aux administrations et juge donc de la conformité des décisions administratives mais aussi conseille le gouvernement sur les lois, réglementations avant les débats et le vote au Parlement et avant leurs entrées en vigueur.

C’est un vrai camouflet pour le Ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui avait fait de la dissolution des Soulèvements de la terre son cheval de bataille, une affaire personnelle. Il n’avait pas hésité à amalgamer militant-e-s écologiques et terrorisme parlant d' »éco-terrorisme » dans tous les médias mainstream qui lui avaient ouvert les portes des plateaux télés, radios et les colonnes des journaux pour cracher son venin. Double camouflet puisque le rendu de cette décision met à mal la dérive autoritaire du gouvernement Macron.

Il aurait été techniquement difficile de dissoudre le mouvement les Soulèvements de la terre qui regroupe différentes structures ; cela équivaudrait à également dissoudre associations, syndicats, mouvements politiques etc. qui soutiennent et y participent

L’annulation du décret démontre la force de la solidarité, dés la demande de dissolution un vaste mouvement national et international s’est levé pour dénoncer l’autoritarisme de l’état français et l’aspect arbitraire de cette décision ; 150 000 personnes ont affirmé « nous sommes tous les Soulèvements de la terre », 5 000 personnes ont déposé avec les Soulèvements de la terre un recours juridique devant le Conseil d’État contre cette décision et 210 comités locaux ont vu le jour.

Le Conseil d’État par sa décision de non dissolution des Soulèvements légitime les actions de désobéissance civile menées par le mouvement dans la lutte contre l’accaparement des terres, de l’eau par l’agro industrie et les multinationales, qui elles sont soutenues par un gouvernement hypocrite, tout en jugeant disproportionné la décision du gouvernement Macron de dissoudre les Soulèvement de la terre.

Cette victoire est importante, très importante, elle montre qu’il est possible de lutter et de gagner contre l’état et au-delà elle donne du souffle, de l’espoir. Mais attention ne soyons pas naïfs, restons vigilants. Le Conseil d’État a précisé « que les Soulèvements de la Terre se sont bien livrés à des provocations à des agissements violents à l’encontre des biens, qui entrent dans le champ du 1° de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. » estimant malgré tout que la dissolution est disproportionnée face « à la gravité des troubles susceptibles d’être portés à l’ordre public au vu des effets réels qu’ont pu avoir leurs provocations à la violence contre des biens, à la date à laquelle a été pris le décret attaqué. ». Par cette phrase il laisse une porte ouverte à la dissolution non seulement pour le mouvement les Soulèvements de la terre mais aussi pour tous les mouvements de lutte sociales, écologiques, anti-racistes.

Deux autres associations ont été dissoutes ce même jour, le GALE (Groupe Antifasciste de Lyon et Environs) décision du Ministère de l’Intérieur prise en mars 2022, puis annulée par le même Conseil d’État en mai 2022 et re-confirmée ce jeudi 9 novembre 2023 et le CRI (Coordination Contre le Racisme et l’Islamophobie) une association créée en 2008 pour lutter contre l’islamophobie par des actions juridiques, médiatiques, rassemblements, manifestations, meetings etc.

Cette décision créée une jurisprudence, le fait de dénoncer l’islamophobie ou les violences policières peut-conduire à une dissolution selon le nouveau code de la sécurité entré en vigueur en 2021 qui induit une notion flou, celle de la provocation. Un phrase, un slogan, une banderole, un article, un meeting, une conférence ou autre qui déplaît au pouvoir peut entraîner une dissolution. La liberté d’expression et d’agir est bien en danger.

Dans son communiqué les Soulèvements de la terre précise « Cette concession du Conseil d’État face aux Soulèvements de la terre doit devenir un levier pour toutes celles et ceux qui veulent lutter contre les mesures liberticides de la loi séparatisme. Nous aspirons à ce que cette victoire puisse servir, pour que plus jamais nous ne laissions le gouvernement dissoudre des collectifs issus des luttes sociales, écologiques et anti-racistes. ».

La lutte continue !

 

https://basta.media/comment-la-loi-separatisme-permet-aux-prefectures-de-frapper-les-associations

https://www.lacoalition.fr/Une-nouvelle-chasse-aux-sorcieres-contre-les-associations-l-enquete-de-l