Le sommet des BRICS, qui rassemble aujourd’hui le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, pourrait accueillir plus d’une douzaine de nouveaux membres, ce qui élargirait notablement son influence sur la scène internationale. Mais surtout, c’est la suprématie de l’Ouest dit collectif, qui se retrouverait alors sérieusement et durablement mise en danger.

Par Alex Männer

Le groupe de cinq nations émergentes que constituent le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud a acquis depuis peu une reconnaissance internationale sous la dénomination de BRICS ; il est en train de s’imposer définitivement comme un acteur essentiel sur la scène internationale. Plus encore, la capacité des BRICS à s’intégrer et à s’élargir progressivement éclaire le potentiel dont ils disposent pour mettre un terme à l’actuelle suprématie politique et économique des USA et de leurs alliés et pour se trouver au cœur d’un nouvel ordre mondial plus juste.

Le niveau très élevé de collaboration que les BRICS ont d’ores et déjà atteint leur a donné des ailes dans la politique économique internationale ; et comme le rapport de force global est par ailleurs en pleine redéfinition, cette union est considérée par de nombreux experts comme une concurrente du G7.

Sur le plan économique, les pays membres du BRICS, au total représentent maintenant 40 % de la population mondiale, 20 % du commerce global environ et plus de 30 % du produit intérieur brut global en parité de pouvoir d’achat. En ce qui concerne le système financier mondial, les BRICS, avec la fondation de la Nouvelle banque de développement (New Development Bank), ont réussi à se doter de leur propre institution de crédit, ce qui représente pour de nombreux pays en développement une excellente alternative aux institutions dominantes de l’Ouest que sont le Fonds monétaire international et la Banque mondiale.

Sur le plan politique, dans cette période turbulente et au vu des sanctions prises par l’ouest collectif contre l’Iran, la Russie et la Chine, la communauté représente pour de nombreux États une véritable chance de poursuivre une politique souveraine et ainsi de garantir un développement harmonieux de leur économie aussi bien que d’autres domaines.

Jusque-là, un certain nombre de pays paraissaient persuadés des avantages associés à l’entrée dans cette association ; mais l’Argentine et l’Iran sont les seuls à ce jour qui veuillent officiellement adhérer à cette communauté. Aujourd’hui cependant, l’éventuel élargissement du groupe d’États recentre l’attention du monde entier : cette fois-ci manifestement, il y a plus de deux pays qui souhaitent s’associer aux BRICS.

Les BRICS sont-ils à la veille d’un profond élargissement ?

À ce propos, l’agence russe d’information TASS rapportait il y a quelques semaines que le nombre d’États intéressés pour rentrer dans les BRICS était en constante augmentation et que, pour le moment, les membres des BRICS étaient en train de réfléchir sur la forme sous laquelle ils allaient pouvoir élargir l’organisation. En se fondant sur une interview télévisée du vice-ministre des affaires étrangères russe Sergueï Riabkov, le rapport indique qu’actuellement seize États veulent entrer dans les BRICS.

D’après ce document, Riabkov n’a fait aucune prévision sur l’ampleur d’un éventuel élargissement du groupe d’États ni même sur le moment où ce nouvel élargissement interviendrait, mais, dit-il, « le temps approche où nous allons avoir une BRICS qui sera prédominante sous une forme ou sous une autre sur les différents continents. » De ce point de vue, il ne devrait y avoir apparemment « aucune limitation sur le lieu, le format, la qualité et le volume » dans lequel tel ou tel de ces pays collaborera avec les BRICS, selon le diplomate.

À quoi il a ajouté : « Je ne passerai pas sous silence que, jusque-là, nous n’avons encore jamais fait l’expérience d’une telle quantité de candidatures. Le premier, et unique à ce jour, élargissement des BRICS, a été l’entrée de la République d’Afrique du Sud, tout le monde pensait que cela allait de soi. […] Aujourd’hui, la liste est suffisamment longue ; de plus, il y a des États qui ont montré un intérêt certain pour entrer dans cette Nouvelle banque du développement des BRICS, etc. Ici, il y a une diversité de formats, et différentes géométries sont acceptables. »

D’autres sources également montrent que l’intérêt pour les BRICS continue à être très grand dans le monde entier et qu’il doit y avoir plus d’une douzaine de pays qui ont « déjà frappé à la porte ». Dans ce contexte, on citera par exemple l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte, l’Algérie ou le Nigéria, même si, en ce qui concerne l’Algérie, il faut d’ores et déjà s’attendre à ce que le pays dépose dans un avenir prévisible une demande de collaboration avec cette communauté.

Il est difficile de dire combien il y aura de candidatures dans un futur proche. Mais ce qu’on peut dire dès aujourd’hui sans grand risque de se tromper, c’est qu’un éventuel élargissement des BRICS — du fait notamment du conflit entre l’Ouest et la Russie, voire la Chine — serait une preuve supplémentaire du fait que le groupe d’États a réussi à réduire l’influence de l’Ouest et des autres membres de la communauté de l’Ouest et à proposer une alternative au système global dominé par les USA.

 

Traduction de l’allemand, Didier Aviat

L’article original est accessible ici