Ce début avril, le ministre des Armées a présenté au Parlement la nouvelle Loi de programmation militaire (LPM) qui prévoit une dépense publique de 413 milliards d’euros sur les années 2024-2030. Si une communication massive a été réalisée sur la mise en œuvre de certains programmes comme le porte-avions (10 Mds €), la production de munitions (16 Mds €), l’acquisition de drones (5 Mds €) ; cette fois, il y a une très grande opacité sur le coût de la dissuasion nucléaire !
Ne cherchez pas ce montant, vous ne le trouverez nulle part ni dans la loi, ni dans le dossier de presse ! L’information a été volontairement occultée. Il a fallu attendre l’audition du ministre en commission de la défense, le 5 avril, pour apprendre que : « La dissuasion est une part importante, c’est 13% de l’enveloppe globale ». Pas un mot de plus !
Traduction, la France va consacrer 53,69 Mds € (notre communiqué de presse) pour poursuivre sa politique de modernisation et de renouvellement de son arsenal nucléaire durant les 7 prochaines années. Une somme qui d’ailleurs est loin de comprendre tous les coûts de la bombe, comme ceux de la gestion de ses déchets, de ses vecteurs (Rafale), ou la construction d’un nouveau porte-avions (montant : 5 Mds € sur cette LPM).
La bombe française va engendrer une dépense publique annuelle de près de 7,67 milliards €
Quand pourrons-nous disposer des montants globaux et « sincères » ? Car ces dépenses nous engagent pour des décennies, elles ne sont qu’une partie du coût de ce renouvellement complet de l’arsenal nucléaire qui se terminera vers 2050…
D’autant que le ministre des armées a reconnu que « la dissuasion nucléaire n’est pas consensuelle dans notre pays », et ne refuse pas le débat sur ce sujet… mais à condition que celui-ci soit à huis clos ! Cette attitude est fort dommageable dans cette période ou la démocratie est malade. Refuser d’ouvrir le débat est bien la preuve que ces pro-nucléaires doutent de leur capacité à montrer la pertinence de la dissuasion nucléaire à l’heure ou une majorité de la communauté internationale soutient le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires !
Aidez-nous à faire naître ce débat en interpellant vos député.e.s (ici), sénateurs et sénatrices (et ici) en leur posant ces questions :
- Le 16 novembre 2022, la France a accepté la Déclaration du G20 réalisée à Bali qui comporte cette phrase : « L’emploi d’armes nucléaires ou la menace de leur emploi sont inacceptables ». Comment est-il possible que le projet de LPM 2024-2030 promeuve une politique dite « inacceptable » ?
- La LPM 2024 présentée doit permettre le renouvellement, notamment des sous-marins nucléaires lanceur d’engins de troisième génération (SNLE3G). Quel est le coût unitaire global de ce bâtiment de guerre pour pouvoir pleinement prendre en compte son coût et son impact sur les finances publiques des générations futures, entre : production, utilisation, entretien (mise en condition opérationnelle) et démantèlement ? Quel sera la part imputée dans la LPM 2024-2030 ? En effet ce type de bâtiment qui a une durée de vie relativement courte (30 ans) par rapport à un temps de démantèlement très long si l’on observe les processus sur les SNLE en cours (voir p 35 de notre étude), avec une moyenne d’au moins 60 ans avant de procéder au démantèlement de la chaufferie nucléaire…
- Même si la France aujourd’hui refuse toute adhésion au Traité sur l’Interdiction des armes nucléaires (TIAN) — norme de droit international signée par 92 États et qui compte 68 États membres — elle s’est engagée juridiquement en ratifiant le Traité de non-prolifération nucléaire (août 1992) « à poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives à la cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée et au désarmement nucléaire. » Comment la France compte-elle respecter cette obligation en mettant en œuvre une LPM qui lance la production de systèmes d’armes nucléaires qui seront en service jusque dans les années 2090 ?
- La France s’affirme comme une grande puissance militaire et un acteur qui pèse dans les relations internationales. Alors ne devrait-elle pas participer comme État observateur à la Seconde Réunion des États parties au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, qui se déroulera en novembre prochain au siège des Nations unies ?
À vous d’agir ! Ensemble nous pouvons obtenir la fin de la politique nucléaire militaire de la France.