En première instance tenue en mai 2021 une dizaine de maraîchers étaient accusés d’avoir importé et utilisé des pesticides interdits, notamment à base de 1,3-dichloropropène. Ce pesticide était utilisé pour lutter contre les nématodes (des vers) et n’est plus autorisé en France depuis 2018. Cette substance est soupçonnée d’être cancérogène et est officiellement classée en Europe dans la catégorie « Peut être mortel en cas d’ingestion et de pénétration dans les voies respiratoires » !
Selon le parquet de Coutances, près de 80 tonnes de produits interdits ont été importées illégalement d’Espagne et utilisées dans le secteur de Créances (Manche). Plusieurs saisies ont été effectuées.
Lors de la première instance, plusieurs qualifications pénales avaient été retenues dont la mise sur le marché, détention et utilisation en bande organisée de produits phytosanitaires ne bénéficiant pas d’une autorisation.
Les prévenus avaient été condamnés en première instance (décision rendue en septembre 2021). Ils avaient fait appel de cette condamnation. L’Appel s’est alors tenu à Caen en novembre 2022.
Cour d’Appel de Caen : quelles décisions ?
La décision de la Cour d’Appel a été rendue le 10 février 2023 et malgré les demandes de relaxe et de nullité formulées par les prévenus, le juge a confirmé les condamnations, en augmentant même le niveau des amendes.
Certains des prévenus ont été condamnés pour publicité ou recommandation de l’utilisation de pesticides ne bénéficiant pas d’une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) ainsi que mise sur le marché de pesticides ne bénéficiant pas d’une AMM. Les amendes pour certains des prévenus atteignant les sommes de 60 000 à 80 000 € (dont 30 000 € de sursis). L’une des entreprises ciblées dans l’affaire est condamnée pour de faux et usage de faux, application de pesticides sans détention de l’agrément et détention en vue de leur utilisation ne bénéficiant pas d’une AMM. L’un des prévenus a également été condamné à 6 mois d’emprisonnement avec sursis et 50 000 € d’amendes. La Cour a également rejeté toutes les demandes de non inscription au bulletin n°2 du casier judiciaire.
La recevabilité de Générations Futures dans cette affaire a été confirmée. Notre indemnisation a été portée à 10 000 € (contre 500 devant le Tribunal de première instance) et 2 500 euros au titre de l’article 475-1 CPP.
Par ailleurs, à titre de réparation des préjudices, la Cour a également ordonné la publication d’un communiqué dans le journal OUEST France édition régionale dans les termes repris au dispositif, avec un désignation nominative des condamnés des faits en cause et de la recevabilité et l’indemnisation des associations parties civiles.
Il s’agit d’une excellente décision, laquelle fera probablement l’objet d’un pourvoi en cassation par les condamnés (qui avaient 5 jours à compter de la date de décision pour former leur pourvoi).
« Nous saluons la décision de la Cour d’appel qui condamne avec force l’usage d’un pesticide interdit. Cet arrêt fera date dans la lutte contre les pratiques délictueuses de certains utilisateurs de pesticides en France », déclarent Maîtres Lafforgue et De Castro qui représentent Générations Futures dans ce dossier.
« L’utilisation de pesticides légaux est déjà problématique par certains aspects, notamment du fait d’effets néfastes pour la santé et l’environnement impliquant leur utilisation. Alors quand il s’agit d’épandage de pesticides nocifs interdits, il est du devoir d’une association comme Générations Futures d’agir et de tout mettre en œuvre pour que ces utilisations frauduleuses cessent », déclare Nadine Lauverjat, Déléguée Générale de Générations Futures.
« Nous saluons ici l’énorme travail d’enquête menée par la police, l’OFB et les juges qui ont permis de mettre au jour ce trafic inacceptable. Nous saluons aussi le travail des associations locales et de nos avocats qui ont permis d’aboutir à ces condamnations justifiées », conclut-elle.
L’association Générations Futures, qui s’est portée partie civile dans ce dossier, salue cette décision de la cour d’Appel de Caen.