Le Collectif Changer de Cap appelle à la mobilisation face à un président qui fait la sourde oreille aux volontés et aux besoins du peuple
Presque deux millions de personnes étaient dans les rues jeudi 19 janvier pour la première manifestation unitaire contre le projet de réforme des retraites. Naturellement, Changer de cap appelle à participer à la mobilisation. En effet, malgré une opinion à 80 % défavorable à cette réforme, malgré l’unité syndicale retrouvée, malgré son isolement politique à l’Assemblée nationale, malgré la hausse vertigineuse des prix de l’énergie et de l’alimentation et la précarité croissante, Emmanuel Macron a décidé d’engager une épreuve de force, faisant un pari risqué sur la résignation du plus grand nombre et sur nos divisions.
Mais pourquoi donc Emmanuel Macron tient-il tant à cette réforme ?
À plusieurs reprises, il a affirmé sa volonté de réduire les prélèvements obligatoires, « ce pognon de dingues ». Le terme péjoratif « prélèvements obligatoires » est utilisé pour désigner l’ensemble des actions d’intérêt général (investissements, éducation, santé, logement, protection sociale) comme des dépenses inutiles, des coûts qu’il faudrait réduire.
Cet objectif constitue le fondement réel de la réforme des retraites, de la diminution des dépenses de santé, du recul des prestations sociales comme de son inaction climatique. Pour Emmanuel Macron, comme pour les milliardaires et les néolibéraux qu’il représente, l’action collective et la solidarité coûteront toujours trop cher, et amputent toujours trop les profits. L’action publique est par nature inefficace, la seule liberté qui vaille est la liberté d’entreprendre
Tant pis si le système de santé explose, si des gens meurent dans les urgences, si des milliers de familles se retrouvent à la rue, si la détresse sociale explose. Un bon mélange de promesses en l’air, de diversions politiques et de répression des récalcitrants fera l’affaire.
Partout la même logique
La réforme des retraites prend place dans un ensemble de destructions programmées du système social mis en place depuis 1945, pour les remplacer par des initiatives privées : une nouvelle diminution de l’assurance-chômage, la réforme du service public de l’emploi, rebaptisé France Travail, pour mieux contrôler les chômeurs, la mise sous condition d’activité du RSA, l’euthanasie des services publics par leur asphyxie et leur dématérialisation, pour dire ensuite que « décidément ça ne marche pas » et qu’il faut confier tout ça aux acteurs privés.
Au cours des derniers mois nous avons joué un rôle de lanceurs d’alerte pour dénoncer les pratiques des CAF envers les personnes vulnérables. La même logique y est à l’œuvre . Nous découvrons progressivement que le gouvernement se moque éperdument du sort des plus précaires et qu’il ignore jusqu’à leurs conditions réelles. Son seul objectif est de réduire le volume des prestations, dans une totale indifférence aux catastrophes sociales majeures qui en résultent. Tous les moyens sont bons pour décourager les ayants-droits, y compris la complexité des procédures, la cruauté des contrôles, la déshumanisation par le numérique. Avec ce calcul cynique, la personne humaine n’existe plus, il est « malheureusement nécessaire » d’abandonner à leur sort tous ceux qui sont devenus inutiles pour le système.
Défendons une autre vision
En face, nous affirmons une autre vision du monde, faite de solidarité, de responsabilité et de fraternité. Nous réaffirmons la nécessité de l’action collective pour lutter contre le réchauffement climatique, aller vers plus de solidarité et de justice sociale, rétablir les libertés et le droit à l’intimité. Les droits fondamentaux et la démocratie sont encore les fondements de notre société, malgré le hold-up en cours, et doivent être défendus coûte que coûte.
Ce qui se joue aujourd’hui, c’est de faire obstacle à la volonté d’un capitalisme voyou de s’accaparer toujours plus de profits, de contrôler la société par la surveillance et la punition, de s’affranchir des règles de droit. L’enjeu de la bataille qui s’annonce est décisif. Il est à la fois écologique, social, politique et éthique. Ce choix est comparable à celui de 1983, quand le gouvernement Mauroy-Delors a choisi la rigueur et l’abandon des promesses de 1981, fixant pour des décennies la prééminence du marché sur l’action publique.
L’issue de ce combat n’est pas jouée d’avance. Unis et déterminés, nous pouvons gagner. Et cette victoire aura le sens d’un verrou que l’on a fait sauter. C’est pourquoi le combat pour le droit à la retraite doit s’élargir à tous ceux et celles qui luttent pour un système de santé à la hauteur des enjeux, contre la déshumanisation des CAF, la restauration de la solidarité envers les chômeuses et chômeurs : c’est une même société solidaire, démocratique et responsable que nous entendons promouvoir.
Un grand merci au dessinateur Allan Barte, qui met ses dessins contre la réforme des retraites gracieusement à disposition pour soutenir la lutte !