Devant l’exode rural massif que connaissent les régions d’Europe défavorisées, il est urgent de contribuer à établir des perspectives d’avenir respectueuses du Vivant. À long terme, elles préserveront habitat et biodiversité, tout en favorisant et en améliorant les cultures traditionnelles, ce qui débouchera sur la constitution de partenariats solides, bénéfiques à la région et à son infrastructure, et sur une augmentation des revenus des populations locales. Cela demande du travail de fond pour informer, instruire, persuader et promouvoir les produits locaux pour assurer la souveraineté alimentaire sur place.
En Autriche, Arche Noah (Société pour la préservation de la diversité des plantes cultivées et leur développement) a lancé en 2018 un projet dans les Balkans, « BALKAN BEETS » (petit jeu de mots et clin d’œil à la betterave !). Il s’agit de soutenir les organisations de l’Europe du Sud-Est qui se chargent des semences et des fruitiers. Mis en œuvre par les organisations locales, le projet est accompagné par Arche Noah et ProSpecie Rara (Suisse) et financé à à 100 % par la Fondation allemande Gen-Ethisch. Pour en assurer la réussite, il fallait à tout prix miser sur les contextes locaux et des solutions qui leur étaient adaptées, car Arche Noah était consciente dès le départ que les recettes miracles sont inexistantes. En épaulant les organisations partenaires d’Albanie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Macédoine du Nord et Roumanie, l’objectif était de mettre sur pied des systèmes agricoles durables, capables de gérer leur existence économique de manière autonome, lorsque le projet de soutien cesserait.
Voici un petit aperçu de quelques-uns de ces projets :
En Roumanie, un échange de semences, souvent locales et transmises en famille depuis des générations, qui existait depuis plusieurs années déjà, a été consolidé en permettant à son organisatrice, Adina Moise, de passer une semaine dans les archives des semences d’Arche Noah. Pour garantir la diversité, BALKAN BEETS a contribué à fonder et préserver la Casa Semintelor ou maison des semences. Cette banque de semences communautaire se base sur la récolte effectuée à proximité de Bucarest dans un centre horticole biologique et de permaculture. De nombreux jardins communautaires font également partie de son rayon d’action. En 2021, l’achat d’un terrain et la construction d’une serre et de tunnels d’isolation étaient prévus, tout comme l’installation d’une pépinière traditionnelle.
En Bosnie-Herzégovine, dans le cadre de BALKAN BEETS, l’Institut de ressources génétiques propose à l’Université de Banja Luka des formations pour les agriculteurs afin qu’ils apprennent à multiplier des échantillons de leurs semences selon la méthode on-farm qui allie scientifiques et agriculteurs sur le terrain, et ceci dans le but de les mettre sur le marché. Les agriculteurs apprennent ainsi à éviter les maladies transmises par les semences et à reproduire des semences et cultiver des plants. Le programme se concentre sur les légumes comme la salade, le poivre et les tomates.
Un second projet en Bosnie-Herzégovine est la Fondation Factory of Joy, une coopérative en train de constituer une entreprise de reproduction de semences grâce à l’aide de BALKAN BEETS. À la tête de la fondation, Vojin Kopuz, qui avait déjà institué une bibliothèque de semences qu’il aimerait à l’avenir amplifier, afin de pouvoir fournir de plus grosses quantités de semences aux jardiniers et agriculteurs.
FABIA, une banque de semences communautaire en Macédoine du Nord, se consacre aux légumes, qui sont la base de l’alimentation par excellence, leur culture est donc primordiale pour le pays. BALKAN BEETS et l’ambassade de Suisse en Macédoine du Nord interviennent ici pour établir un réseau d’agriculteurs qui veulent préserver les légumes autochtones. Leur partenaire sur place est Ljupcho Vasilev. Après avoir travaillé dans une firme helvétique de semences biologiques (Sativa Rheinau), il se consacre à empêcher la perte de la diversité génétique dans le pays, récoltant des semences dans l’entreprise familiale au sud du pays.
En Albanie, l’Association d’intérêt commun pour les ressources génétiques, APGR, regroupe les experts albanais de pointe dans ce domaine. Dans le cadre de BALKAN BEETS, en coopération avec des agriculteurs, des industries de transformation et des gastronomes, ils se sont fixés comme objectif de promouvoir la préservation des sortes albanaises. Il s’agit pour cela de faire prendre conscience aux agriculteurs, aux décideurs politiques et à la société en général, de l’importance des légumes autochtones dans leur contribution à un développement durable. Le programme prévoit plusieurs étapes : un jardin d’apprentissage où récolter les semences, des installations de traitement des semences et la prospection de nouvelles voies de commercialisation en contactant les organisateurs de marchés, des restaurants et des maraîchers. Des voyages sont entrepris afin de recueillir des semences et de reconstruire leur histoire. 86 entreprises agricoles ont bénéficié en 2020 du soutien actif dispensé par le projet, aussi bien sur le plan des experts que technique. En 2020 également, cinq villages ont déjà participé à établir un jardin de valorisation des sortes locales sur leur territoire, tandis que deux restaurants de Tirana ont inscrit sur leur carte des mets à base de sortes traditionnelles.
Depuis plus de 30 ans, Arche Noah contribue à faire prendre conscience de l’importance de la diversité des semences, en préservant des milliers de sortes de légumes, de fruits et de céréales en voie de disparition. En outre, l’association forme et informe, publie, agit au niveau politique et ouvre son jardin de la diversité au public à Schiltern, en Basse-Autriche. Elle vend des semences, met en réseau et propose également depuis peu des cours en ligne. C’est pour ainsi dire le pendant autrichien du Réseau des Semences Paysannes ou de Kokopelli.
https://www.arche-noah.at/