Depuis mars 2013 le Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB)[1] s’est donné pour mission de promouvoir le revenu universel dans le débat public, jusqu’à son instauration.
Sa charte définit ainsi le revenu de base :
« Le revenu de base est un droit inaliénable, inconditionnel, cumulable avec d’autres revenus, distribué par une communauté politique à tous ses membres, de la naissance à la mort, sur base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie, dont le montant et le financement sont ajustés démocratiquement. »
En 2017, avec Benoit Hamon, candidat du Parti socialiste, le revenu universel a conquis droit de cité dans le débat public et il est enfin sorti du ghetto des utopies et des belles idées qui traversent les siècles sans réussir à s’ancrer dans le réel.
Depuis, la crise des gilets jaunes, la crise de la Covid 19, la crise énergétique actuelle, n’ont cessé de nous alerter sur la détresse de millions de personnes, cette France qui est à 1 euro près, qui, avec ou sans travail, n’arrivent plus à vivre décemment dans une société où la richesse produite n’a jamais été aussi grande. Devant cette situation il devrait être du devoir de toute communauté politique et de ses dirigeants de garantir, en toutes circonstances, à tous ses membres, les conditions concrètes d’existence.
En 2022, les prétendants à la fonction suprême sont particulièrement timorés dans leurs propositions concernant une nécessaire allocation universelle d’existence conçue non comme une aide sociale supplémentaire conditionnée qui assujettit les individus mais comme un droit humain universel qui élève et permet de se libérer d’un emploi de survie aliénant. L’analyse des propositions permet de mesurer la distance qui les sépare d’une vision émancipatrice de cette proposition. Aucun des candidats ne porte l’idée d’un revenu de base universel inconditionnel et individuel même si le parti EELV a inscrit cette proposition dans son programme.
Au contraire certains envisagent de rogner encore le peu de droit à un minimum vital en conditionnant le versement du RSA à une activité, à la nationalité et ils continuent à exclure les jeunes de 18 à 25 ans de ce minimum vital, ajoutant ainsi à la souffrance due à la pauvreté et à la précarité, la souffrance due à la stigmatisation, à l’humiliation et à la ségrégation. Proprement inacceptable.
D’autres, les plus nombreux, portent des propositions qui améliorent le sort de ceux qui doivent vivre avec peu, par l’extension des droits aux jeunes, aux étudiants, par une revalorisation des aides. Mais la plupart des propositions esquissées n’arrivent pas à sortir d’une logique d’assistanat qui se limite soit à une simplification d’un système de redistribution complexes, soit à l’automatisation de l’allocation d’aides sociales sous la forme d’un revenu minimum garanti pour les plus démunis. Par les diverses conditionnalités, par un montant trop faible, par des mesures catégorielles, jamais on ne sort d’un système d’aides sociales curatives. Si certaines propositions peuvent constituer une première étape vers un revenu universel, dans l’ensemble elles sont insuffisantes. Car un système qui n’aide que les pauvres creuse encore l’écart qui les sépare du reste de la société. « Une politique pour les pauvres est une pauvre politique » observait Richard Titmuss, théoricien de l’État social britannique.
Le revenu universel d’existence devrait constituer le premier dénominateur commun d’un programme de gouvernement, encore faudrait-il qu’il permette à toutes et tous de s’affranchir de la charité publique qui oblige. Car il ne peut y avoir de liberté ni de démocratie réelle sans égale considération, sans égalité des droits humains et sans la solidarité des uns envers les autres pour garantir l’égale participation à la vie sociale et politique de l’ensemble des citoyens.
Ce revenu vital, individuel et inaliénable, dissocié de l’emploi individuel, doit permettre de répondre aux mutations en cours dans le monde du travail comme aux défis environnementaux à surmonter dans les années à venir; il ouvre la voie vers la réduction du temps de travail et un meilleur partage des emplois.
Il est dommage qu’en 2022 aucun candidat ne porte cette belle idée dont l’heure est venue.
Pour ne plus subir mais pouvoir choisir, pour ne plus subir et pouvoir agir,
il nous faudrait pouvoir voter pour un véritable revenu de base universel et inconditionnel !