Le 11 février de cette année (2022), les 1550 travailleurs de la multinationale japonaise Bridgestone en Argentine ont reçu la première moitié de la prime de “participation aux bénéfices” de l’année dernière. Ils auront reçu environ 6000 dollars chacun lorsqu’ils recevront le deuxième paiement le 11 mai.

La nouvelle de ce bonus pour les travailleurs de cette entreprise basée depuis 1931 dans la ville de Llavallol, dans la province de Buenos Aires, est intervenue dans un contexte de difficultés généralisées pour la plupart des travailleurs en Argentine. En effet, cela leur est difficile d’enrayer la baisse du pouvoir d’achat de leurs salaires face à l’inflation incontrôlée dans le pays.

« Tous les employeurs ne sont pas pareils », a déclaré, lors d’une entrevue télévisée Pedro Wasiejko, qui dirigeait la Fédération des travailleurs de l’énergie, de l’industrie, des services et des branches associées (FeTIA – CTA) (Federación de Trabajadores de la Energía, Industria, Servicios y Afines) à l’époque où il a obtenu de la compagnie Firestone qu’elle s’engage à partager ses futurs bénéfices avec ses travailleurs, tout en négociant les indemnités pour les licenciements voulus par l’entreprise durant la crise importante de 2001.

« On a proposé que, de la même manière que les travailleurs ont dû payer pour le coût de la crise, ils devraient aussi participer aux bénéfices des entreprises lorsque les temps sont favorables. Plus tard, lors des négociations de 2006 avec le secteur, cette clause a été formalisée dans la Convention collective de travail » (Convenio Colectivo de Trabajo), a déclaré le syndicaliste et président actuel du chantier naval de Río Santiago.

Firestone a ensuite fusionné avec Bridgestone, mais l’accord a été maintenu. En effet, en 2004, la première distribution de 33 % de l’excédent du bénéfice net ordinaire exonéré d’impôts dépassant 6 % du chiffre d’affaires annuel a eu lieu. Depuis lors, la clause a été activée cinq autres fois.

Il est utile de rappeler cette étape importante, qui a même une valeur constitutionnelle en Argentine, car les médias commerciaux ne sont pas très intéressés à montrer ces succès de la lutte organisée des travailleurs. En fait, c’est la seule entreprise de cette taille à disposer d’un tel mécanisme de participation aux bénéfices dans le pays.

« Bien que les deux dernières années ont été difficiles pour toutes les industries, c’est grâce aux efforts de chacune des parties qui composent l’entreprise et à un travail coordonné avec le gouvernement que nous annonçons ce bonus octroyé à chacun de nos collaborateurs », a expliqué l’entreprise.

Il y a quelques années, l’entreprise chinoise Huawei était devenue la cible de sanctions internationales et d’attaques de tout genre. Elle a été qualifiée de “dangereuse” et de bélier que la technologie chinoise utilise afin de pouvoir s’approprier toutes nos données sur la base de progrès technologiques qui avaient laissé la technologie occidentale loin derrière.

D’accord, c’était une bonne raison pour Huawei d’être incluse dans la guerre commerciale et communicationnelle contre la Chine, ce géant asiatique. Mais, peut-être, y avait-il une autre raison derrière cette persécution impitoyable. Les entreprises monopolistiques mondiales ne sont pas très adeptes du partage de leurs bénéfices. En fait, elles fondent leur croissance et leur expansion sur l’amélioration du système d’exploitation au niveau planétaire, à tous les maillons de la chaîne de production.

Huawei est un exemple désastreux de ce système hyper capitaliste hostile à la classe ouvrière et destructeur de l’être humain. La multinationale chinoise comptait plus de 194 000 travailleurs en décembre 2019, en dépit des attaques dont elle a fait l’objet. L’entreprise fondée en 1987 par Ren Zhengfei a récemment publié le bilan de ses bénéfices pour l’année 2021 : près de 10 milliards de dollars seront distribués à ses travailleurs et uniquement à ses travailleurs car les actions de l’entreprise leur appartiennent.

99 % des actions de Huawei sont entre les mains de ses employés actuels et anciens. Il n’est donc pas surprenant que Huawei soit le deuxième investisseur mondial en matière de recherche et de développement (R&D), et qu’environ la moitié de ses effectifs soit engagée dans la recherche et l’innovation.

Aujourd’hui, Huawei est déjà présente dans 170 pays et détient 18 % du marché mondial des smartphones. Et le résultat n’a pas été celui escompté car les sanctions contre cette entreprise ont été très sévères. En fait, elle ne peut utiliser la technologie occidentale dans la production d’aucun de ses produits en raison de ces sanctions occidentales.

Nous avons donc ici deux exemples de différents modes de gestion de multinationales. Grâce à l’attachement de ses employés et à leur contrôle pour obtenir une expansion et un développement ininterrompus de ses technologies, Huawei n’est surpassée dans le marché mondial que par l’entreprise sud-coréenne Samsung. Dans le cas de Bridgestone, nous trouvons une entreprise qui gagne la fidélité de ses employés et une main-d’œuvre qui accueille de nouveaux collègues, les ajoutant aux réalisations obtenues par la ténacité et l’unité. La participation des employés aux bénéfices des entreprises n’est pas une utopie irréaliste.

 

Traduction de l’espagnol, Evelyn Tischer