À partir du moment où l’usage des armes fut autorisé au Mexique, son utilisation pour la violence faite aux femmes a augmenté. En 2019, 55% des décès féminins avec présomption d’homicide étaient causés par des armes à feu. C’est ce que révèle l’étude « Violence féminicide au Mexique, estimations et tendances ».
Par Angélica Jocelyn Soto Espinosa pour Cimacnoticias*
ONU Femmes, l’Institut National des Femmes et la Commission Nationale pour la Prévention et l’Eradication des Violences faites aux Femmes (CONAVIM) ont présenté le 16 décembre 2020 une étude qui montre, entre 2014 et 2019, une hausse annuelle de 13,4% de l’usage des armes à feu dans les foyers. Dans la vie publique, on observe une croissance annuelle de 18,2%.
Cette étude a été faite suite à l’analyse d’informations provenant de certificats de décès de femmes avec présomption d’homicide procuré par l’Institut National de Statistiques et de Géographie (Inegi), et par les statistiques du Secrétariat Exécutif National du Système de Sécurité Publique (SENSSP).
La présidente de ONU Femmes au Mexique, Belén Sanz Luque explique que les certificats de décès fonctionnent tel une « statistique miroir » puisqu’ils fournissent des informations essentielles comme la relation de parenté de la victime avec son agresseur et le contexte du décès. Les chiffres des décès montrent que les jeunes femmes entre 20 et 24 ans sont celles qui risquent le plus leur vie sur la voie publique.
L’étude détaille comme suit : on a enregistré, entre 1990 et 2019, 56 000 décès féminins avec présomption d’homicide, près de 250 000 morts accidentelles et 23 000 suicides. Entre 1985 et 2019, on dénombre 63 324 décès de femmes avec présomption d’homicide.
L’étude précise que c’est à partir de 2007 que les tendances se dégagent et que la violence faite aux femmes s’emballe. Entre 2007 et 2019, on dénombre 33 501 décès de femmes avec présomption d’homicide. En 2019 on enregistre le plus grand nombre de décès de femmes avec présomption d’homicide, cela représenterait 5,7 femmes sur 1000. En 2018 et 2019, 10,3 femmes furent assassinées en moyenne chaque jour.
Si on se base sur les données du SESNSP au titre du premier semestre 2020, 76% des homicides volontaires ont été perpétrés avec une arme à feu. Un féminicide sur cinq est commis à l’aide d’une arme à feu.
Si le nombre de féminicides qui ont eu lieu à domicile a diminué de 50% en 2005 à 30% en 2019, les féminicides sur la voie publique ont grimpé en flèche pour atteindre 52% en 2019. Un décès sur 5 a eu lieu dans un complexe sportif, dans une exploitation agricole, dans une zone commerciale, dans un complexe récréatif, dans une école, dans un centre de travail ou dans d’autres lieux similaires.
En 2019, les états avec les taux de féminicides avec présomption d’homicide les plus élevés sont Colima (20.3%), Chihuahua (14.1%), Baja California (13.3%), Guanajuato (12.3%) et Guerrero (9.9%). Si on descend à la municipalité, celles qui ont le plus fort taux de féminicide avec présomption d’homicide sont Salamanca, Uruapan, Tijuana, Juárez, Celaya, Irapuato et Acapulco.
La représentante de ONU Femmes au Mexique indique « La hausse de l’usage des armes à feu dans le but de tuer les femmes aussi bien dans leur foyer que sur la voie publique démontre l’importance de renforcer la politique du taux de criminalité et de lutter contre la prolifération des armes d’un point de vue de l’égalité des sexes ».
Marcela Lagarde y de los Ríos, anthropologue féministe à l’initiative de la Loi Générale pour l’Accès des Femmes à une Vie Libre de Violence (LGAMVLV) explique que cette étude nous dit « comment nous, les femmes du mouvement féministe, nous rapprochons, construisons des éléments clé, articulons des structures, démantelons des processus dans la vie sociale, tout en étant inspirées par une théorie politique des genres. Nous analysons ces meurtres qui pour nous et pour le monde entier se nomment des féminicides, ce sont des crimes de haine contre les femmes. »
De son côté, Fabiola Alanís, responsable de la CONAVIM explique qu’en l’espace de 5 ans, le nombre de victimes de féminicides a augmenté de 137%. La plus forte croissance de ce crime a été enregistrée entre 2017 et 2018, +5,2%. Entre 2018 et 2019, la hausse fut de 3,5%. « Il est fort probable que nous atteignons un taux inférieur à 1,25% d’ici fin 2020 ».
* Cimacnoticias est une agence multimédia, spécialisée en journalisme de l’égalité des sexes.