« Pour nous éloigner des énergies fossiles, il ne faut pas utiliser les fonds publics, qui sont limités, pour accorder des subventions faramineuses à des entreprises qui sont justement les responsables du non-respect de nos objectifs sur le plan climatique, déclare Julia Levin, directrice de programmes, climat et énergie, de l’organisme Environmental Defence. Le gouvernement fédéral doit plutôt investir dans la création d’emplois stables, axés sur la protection de l’environnement, et dans les transformations nécessaires au maintien de la solidité et de la prospérité des collectivités.»
Le ministre des Finances du Canada, Bill Morneau a fait l’annonce pendant la période des questions en Chambre, mercredi après-midi que le budget du gouvernement fédéral sera déposé le 30 mars prochain.
En début de journée, lors de l’annonce du plan d’aide d’un milliard pour la COVID-19, Justin Trudeau a signalé que cette somme a sera prise en considération dans l’élaboration du budget.
«La position fiscale que nous avons maintenue et améliorée au cours des dernières années est très importante dans notre capacité à faire face aux défis [économiques]. Voilà pourquoi je suis très content de répondre à ces défis dans le budget 2020», a déclaré Bill Morneau. (TVA Nouvelles)
Il s’agit du premier budget fédéral de 2020, année qui, selon les scientifiques du monde entier, marque le début de la décennie de la dernière chance pour empêcher les catastrophes climatiques.
En après-midi, des représentantes et représentants des milieux syndical, autochtone, confessionnel, environnemental et de justice sociale ont demandé au gouvernement fédéral d’accroître, de façon substantielle, les fonds et les programmes nécessaires à la mise en place d’une économie écoresponsable et de réduire les émissions de carbone de manière draconienne.
« Il s’agit du premier budget d’un siècle nouveau, un siècle qui verra se transformer la façon dont, partout dans le monde, on utilise l’énergie, on construit les collectivités, et on fait face aux conséquences d’un système économique qui, jour après jour, se détourne des besoins de l’être humain et de la nature, soutient Catherine Abreu, directrice principale du Réseau action climat du Canada, qui regroupe 120 organismes de la société civile dont les travaux portent sur les changements climatiques et les énergies propres. Les changements sont inévitables, et le Canada est à la croisée des chemins : soit il investit auprès de sa population et assume la responsabilité des transformations, soit il continue de miser sur l’immobilisme et regarde le train passer. »
Lindsey Bacigal, directrice des communications de l’organisme Indigenous Climate Action, a exprimé la nécessité d’intégrer les droits et la souveraineté des peuples autochtones aux discussions sur les solutions à la crise climatique. « Dans ce budget, il doit y avoir une reconnaissance accrue des solutions totalement détachées de l’économie de marché, qui reflètent les droits des peuples autochtones. Il faut des solutions viables qui renforcent le pouvoir des communautés, valorisent la connaissance et l’ontologie ancestrales et investissent dans des solutions issues du monde autochtone qui prennent appui sur une restitution des terres et des ressources dont elles sont porteuses. »
Tandis que les principaux syndicats du Canada ont réclamé la création d’un programme national de recyclage professionnel, qui prouverait l’engagement du gouvernement fédéral envers les travailleurs et travailleuses du secteur de l’énergie, entre autres.
Selon Ken Bondy, représentant national d’Unifor, « Un programme national de recyclage professionnel est l’une des composantes essentielles pour assurer une transition équitable. Unifor encourage la formation professionnelle qui protège le savoir des métiers traditionnels et procure des possibilités de création d’emplois dans le secteur des énergies renouvelables. La transition vers une économie écoresponsable représente la grande difficulté de notre époque. Et pour y parvenir, il nous faudra compter sur l’apport et l’appui des travailleurs et travailleuses, sinon, ce ne sera pas possible. »
« Une transition réussie vers une économie écoresponsable exige du Canada qu’il protège les emplois, affirme Julee Sanderson, 1re vice-présidente nationale du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes. Il revient au mouvement syndical de veiller à ce que les travailleurs et travailleuses des secteurs visés ne soient pas laissés pour compte, qu’ils suivent une formation pour être recyclés et bénéficient d’un soutien, pour eux-mêmes et leur famille. »
Les groupes confessionnels ont, eux aussi, clairement exprimé leur désir de voir, dans le budget, des dispositions et des fonds dirigés vers une action réfléchie visant la crise climatique.
« Pour nous, les changements climatiques ont une incidence sur l’essence même de qui nous sommes et sur notre façon de vivre dans un monde créé par Dieu, explique Karri Munn-Venn, analyste principale en matière de politiques de l’organisme Citizens for Public Justice. Nous exhortons le gouvernement à investir dans une transition équitable vers une économie modernisée et diversifiée qui réduira les émissions de carbone, créera des emplois sûrs et écoresponsables et favorisera le mieux-être de tous, en particulier les populations marginalisées depuis toujours. »
Enfin, Toby Sanger, de l’organisme Canadiens pour une fiscalité équitable, fait remarquer que le gouvernement fédéral a accès, par différents canaux, aux sommes nécessaires à l’action climatique. « La transition vers une économie à faible émissions de carbone exige l’injection de milliards de dollars. Nous pouvons obtenir les fonds nécessaires grâce à une fiscalité équitable. La justice climatique doit aller de pair avec la justice fiscale. »