Merci aux Gilets Jaunes, à toutes, à tous pour votre courage, votre détermination. Cette lettre a été écrite pour vous.
Ici, je ne cherche pas à expliquer le pourquoi du comment de ce mouvement, les raisons nous les connaissons. Je voudrais vous remercier, vous, toutes et tous. Vous avez permis que surgissent au grand jour nos souffrances et au-delà de celles-ci, notre dignité et le courage qui fait qu’aujourd’hui un souffle commun surgit, une respiration qui ne faillit pas, forte d’être ensemble, de se rencontrer, de lutter pour cette justice à laquelle nous avons toutes et tous droit. Cette justice sociale et humaine confisquée par ceux qui pensent être au-dessus.
Depuis le 17 novembre 2018, votre présence sur les lieux de blocage et pendant les manifestations a démontré de façon magistrale qu’il est possible d’être ensemble avec nos différences, qu’il est possible d’agir collectivement. Et pourtant vous êtes celles et ceux que l’on ne voyait pas dans la rue et peut-être pour certains, regardiez-vous les manifestations avec une certaine forme de gêne. Longtemps étouffée, cette lumière qui existe en chacun de nous vient de se ranimer, elle brille avec vous toutes et tous, vous l’avez fait surgir du profond de notre être. Nous sommes vivants ! Merci à vous.
castaner, ministre de l’intérieur (je ne dirai pas monsieur et je ne mettrai pas une majuscule à son nom : Il n’y a plus droit, les majuscules sont pour vous) a dit le 8 décembre dernier en parlant des Gilets Jaunes « Un monstre qui est né de colères anciennes ». Le monstre c’est lui, le monstre c’est eux, n’hésitant pas par la violence policière à infliger des blessures de guerre aux manifestantes et aux manifestants. Ils ont peur et tentent par leur extrême violence, aidés par des médias sans âme, de salir votre action.
Leurs mensonges ne prennent plus, vous avez ouvert un espace de liberté. La croyance qui nous fait penser que des solutions viendront de ceux qui créent la misère s’effondre. Nous commençons à saisir, à sentir que la solution viendra de nous toutes et tous, de ceux qui sont à la base. Nous sommes à la base, pas en bas. En bas se trouvent les violents, ceux qui gouvernent, ceux du CAC 40 etc. Nous sommes la Base du vivant. Merci à vous !
Vous êtes nonviolent et pourtant il y a eu parfois des débordements, c’est vrai. Il est difficile de contenir sa colère quand la souffrance est si grande. Il faudrait peut-être que tous ces bien-pensants moralisateurs regardent un peu plus loin que le bout de leur fauteuil rembourré. Ils voudraient que cela se passe gentiment, calmement, que l’on dise merci quand les coups de matraques pleuvent, pleurer pour des voitures incendiées ou des vitrines cassées et ne rien dire quand des gens perdent un œil, une mâchoire, une main etc. Certes ça ne sert pas à grand-chose de brûler des voitures. Très régulièrement j’ai vu dans les manifestations des Gilets Jaunes les gens crier « la police avec nous » malgré les coups de matraque et les violences policières. Et malgré leur violence, vous les avez appelé à vous rejoindre, vous avez appelé le gouvernement à agir. Leur réponse a été violence et mépris. Certains policiers sont là pour frapper et frapper dur et d’autres sont perdus, ne savent plus, poussés par leur chef à la violence. Il faut avoir beaucoup de courage et de force pour leur crier « la police avec nous ». Merci à vous !
Malgré toute cette violence, toutes et tous vous êtes là chaque samedi partout en France, de plus en plus nombreuses et nombreux. Je voudrais ici dire à tous les blessés, femmes et hommes, ceux qui souffrent dans leur chair mais aussi dans leur cœur, merci pour votre courage. Que votre rétablissement se fasse dans les meilleures conditions, du bien- être pour vous et vos proches.
Je voudrais également remercier les femmes présentes en grand nombre, visibles et que l’on n’a pas l’habitude de voir. Vous assumez vos familles, vos vies, votre travail sous-payé, et la plupart du temps vous souffrez en silence. Aujourd’hui on vous entend. Vous êtes Grandes ! Je vous admire. Merci à vous !
Toutes et tous ensemble vous prouvez qu’une alternative est possible à la violence de cette société, de ce gouvernement. Oui la solidarité existe bel et bien. Après tout, n’est-ce par cette solidarité que nous les humains avons survécu aux époques glaciaires de la préhistoire. Nos corps étaient inadaptés et pourtant nous avons survécu. Vous prouvez que les uns et les autres nous ne sommes pas des ennemis. Merci à vous !
En passant par des ronds-points je vous vois, parfois vous êtes 3 ou 4, parfois plus, il pleut et vous avez le sourire, vous êtes là. Les klaxons se font entendre pour vous saluer, sourire, échange de signe et quelque chose se passe dans les cœurs. Une amie est allée le 24 décembre passer le réveillon de Noël au péage de Bandol accompagnée par une de ses amies. Elle a témoigné de la joie, de l’émotion qu’il y avait à être ensemble, avec vous. Plus de cinquante personnes étaient présentes et quand elles sont parties, d’autres sont arrivées. Merci à vous !
Quelle que soit l’issue, nous avons expérimenté ensemble quelque chose qui va au-delà de notre individualité, que ce soit vous toutes et tous dans la rue ou ceux qui vous soutiennent, il est évident que nous avons changé en tant qu’ensemble. Je vous fais confiance, je sais que vous, vous voulez construire, que nous voulons construire. Courageuses et courageux vous êtes sans faille. Vous résistez, vous ne lâchez rien. Le temps de l’individuel est passé et aujourd’hui vous nous permettez de vivre le temps du « collectif, du commun ». Merci à vous !
Cette colère légitime se transforme. Elle a besoin d’être criée, exprimée, évacuée et pour se convertir, elle a besoin d’être entendue. Elle se fait entendre depuis le 17/11/2018 et commence à se construire ce que demain sera, ce dont nous avons le plus besoin pour vivre et non survivre. Commence à se construire qui nous sommes, comment nous voulons vivre ensemble et vers où nous allons. Vous avez redonné de l’espoir et du Sens. Merci à vous toutes et tous !
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https://www.pressenza.com/fr/2019/01/de-leffet-demonstratif-a-la-revolution/