Les avocats de Julian Assange ont déposé une requête urgente auprès de la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH), basée à Washington D.C., pour demander à l’administration Trump de lever les scellés sur les charges qu’elle a secrètement déposées contre M. Assange.

Les avocats d’Assange demandent également à la Commission de contraindre l’Équateur à cesser ses activités d’espionnage contre M. Assange, à mettre fin à l’isolement qui lui a été imposé et à le protéger de l’extradition américaine. La demande urgente se présente sous la forme d’une demande détaillée de 1 172 pages de « mesures conservatoires » adressée à l’organisme international qui contrôle le respect par les États-Unis et l’Équateur de leurs obligations juridiques contraignantes.

Les appels à extrader M. Assange vers les États-Unis, en raison de son travail d’éditeur et de rédacteur en chef, sont la raison pour laquelle M. Assange a obtenu l’asile politique à l’ambassade de l’Équateur à Londres en août 2012.

Baltasar Garzón, le coordinateur international de l’équipe juridique de M. Assange, souligne une situation qui mine gravement les garanties juridiques qui doivent être garanties par l’État pour protéger M. Assange de la persécution politique du gouvernement Trump. M. Garzón demande au CIDH d’intervenir d’urgence en faveur de M. Assange et appelle à « la solidarité internationale dans cette affaire où le droit d’accès et de diffusion de l’information librement est en danger ».

L’administration Trump refuse de révéler les détails des accusations portées contre M. Assange malgré le fait que des sources du ministère américain de la Justice ont confirmé à Associated Press et au New York Times que M. Assange a été accusé sous scellés.

« La révélation selon laquelle les États-Unis ont engagé des poursuites contre M. Assange a choqué la communauté internationale », affirme la sous-commission juridique. Le gouvernement américain « est tenu de fournir des informations sur les charges pénales qui sont imputées à M. Assange dans leur intégralité », ajoute-t-il.

La sous-commission révèle pour la première fois qu’au cours des derniers mois, les procureurs fédéraux américains ont officiellement approché des gens aux États-Unis, en Allemagne et en Islande et les ont pressés de témoigner contre M. Assange en échange d’une immunité de poursuite. Les personnes approchées sont associées aux publications conjointes de WikiLeaks et divers autres médias, ayant traité de la diplomatie américaine, de Guantanamo Bay et des guerres en Irak et en Afghanistan.

L’effort commun de publication entre WikiLeaks, The New York Times, McClatchy, The Guardian, The Telegraph, The UK’s Channel 4, Al Jazeera, The Bureau of Investigative Journalism, Der Spiegel, Le Monde, El País, The Hindu et Reuters, entre autres, a remporté de nombreux prix et créé le modèle de collaboration utilisé ultérieurement dans d’autres grandes publications comme les Panama Papers.

L’administration Trump a intensifié ses efforts contre M. Assange dans le Grand Jury contre WikiLeaks, qui a été mis en place dans le District Est de la Virginie depuis 2010. L’administration a été en proie à des fuites d’informations classifiées au cours de ses deux premières années d’existence et a clairement l’intention d’utiliser les poursuites engagées contre Julian Assange comme un « brise-glace » pour créer un dangereux précédent qui permettrait de poursuivre les médias les plus sérieux, comme le New York Times, le Washington Post, AP, CNN et NBC qui obtiennent et publient régulièrement des informations de sources classifiées.

La Commission interaméricaine des Droits de l’Homme, qui est l’équivalent de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, interviendra si elle considère que les actions des États-Unis et de l’Équateur donnent lieu à une situation urgente et grave qui causera un préjudice irréparable à M. Assange.

La demande des avocats de M. Assange identifie une série d’obligations juridiques que les États-Unis et l’Équateur ne respectent pas dans leur traitement de M. Assange. Les avocats documentent les tentatives de l’administration Trump de faire pression sur l’Équateur pour qu’il livre M. Assange, notamment les menaces sérieuses proférées récemment contre l’Équateur par de hauts responsables politiques américains, contrairement aux menaces plus voilées proférées dans le passé.

Les menaces ont considérablement augmenté depuis que WikiLeaks a publié les documents « Vault 7 » de la CIA – la plus grande fuite d’informations classifiées de la CIA de l’histoire, qui, selon le gouvernement américain, a été fournie par un jeune officier de la CIA, Joshua Schulte.

La demande met également en lumière les opérations d’espionnage menées contre M. Assange à l’ambassade de Londres par les services de sécurité spécialisés engagés par l’Équateur qui, au lieu d’être impliqués dans la protection du demandeur d’asile, ont espionné M. Assange et ses visiteurs.

Selon les médias, l’entreprise a également agi à titre d’informateur auprès des autorités américaines, en particulier le FBI. Parmi les actions graves dénoncées dans la requête, figurent la mise sous silence de l’exécutif équatorien contre M. Assange, et son ingérence dans l’accès de M. Assange à ses avocats, affectant son droit à accéder à sa protection juridique.

« L’Équateur est tenu de mettre fin au régime d’isolement imposé à M. Assange, de suspendre l’application du prétendu protocole spécial et de rétablir intégralement ses droits en tant que bénéficiaire d’asile », déclare le requérant.

En décembre, le New York Times a rapporté que le nouveau président équatorien, Lénine Moreno, avait tenté de négocier le transfert de M. Assange aux États-Unis en échange d’un « allégement de la dette ».

En ce qui concerne les États-Unis, la sous-commission souligne les graves entraves à la liberté d’expression des médias aux États-Unis avec l’attaque sans précédent contre le droit de publier des informations certifiées consécutif à la procédure engagée par les États-Unis à l’encontre de M. Assange et de WikiLeaks.

Le mois dernier, le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire et le Rapporteur spécial de l’ONU sur la situation des défenseurs des droits de l’homme ont appelé tous les États à mettre en œuvre les conclusions du Groupe de travail de 2016 pour libérer Assange, ajoutant : « Il est temps que M. Assange, qui a déjà payé le prix fort pour avoir exercé pacifiquement ses droits à la liberté d’opinion, d’expression et d’information, et pour promouvoir le droit à la vérité dans l’intérêt public, retrouve sa liberté ».

 

Notes

La Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme (CIDH), basée à Washington D.C., est un organe de l’Organisation des États Américains (OEA), dont la mission est de promouvoir et protéger les droits humains dans l’hémisphère américain.

La déclaration du groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a appelé le 21 décembre 2018 à la libération d’Assange. Les experts de l’ONU exhortent le Royaume-Uni à honorer ses obligations en matière de droits, et à laisser M. Julian Assange quitter librement l’ambassade d’Equateur à Londres.

 

Pour plus d’informations, voir Defend Wikileaks, About Julian Assange de Defend Wikileaks.

Suivez sur Twitter à https://twitter.com/assangelegal et twitter.com/defendassange

 

Traduction de l’anglais, Xavier Foreau