Les pays membres de l’OTAN n’ont aucun obstacle d’ordre juridique quant à l’adhésion au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN). Le signer ou non est une décision strictement politique. La signature du Traité par le gouvernement espagnol serait une étape déterminante dans la diminution de l’hégémonie nucléaire.
Par Carlos Umaña
Le 7 juillet 2017, 122 pays ont adopté à l’ONU le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN), ce qui est, jusque-là, l’étape la plus importante sur le chemin vers le désarmement nucléaire.
La signature et la ratification du Traité ont commencé le 20 septembre 2017. 69 pays l’ont signé depuis, dont 19 l’ont ratifié en devenant ainsi Etats parties.
Les opposants du TIAN disent qu’il ne fonctionnera pas car il n’est pas soutenu par les puissances nucléaires. Ils n’oublient qu’aucun traité n’avait bénéficié d’emblée d’un appui unanime. Tout s’était construit au fil du temps. Les avancées majeures dans l’histoire de l’humanité ne commencent jamais d’un commun accord entre les parties.
L’interdiction fonctionne. Comme pour d’autres armes de destruction massive, l’élimination est précédée par l’interdiction. Les détenteurs et les fabricants s’y opposent à la base. Cependant si l’accent avait été mis sur les conséquences et non sur les considérations stratégiques – ce que l’on appelle le désarmement humanitaire – il aurait été possible de les stigmatiser, les interdire et les éliminer complètement. L’interdiction devient la norme partout dans le monde, non sans impact sur les pays qui n’y adhérent pas. L’exemple le plus récent est celui des Etats-Unis, qui n’ont jamais signé la Convention sur les armes à sous-munitions, mais ont été contraints de fermer leur dernière usine de fabrication des armes à sous-munitions il y a deux ans, faute d’acheteurs ni d’investisseurs, dans un environnement international de condamnation morale de ce type d’armes.
De même, aucun pays de nos jours, ne se vanterait de détenir des armes chimiques ou biologiques. Des normes internationales fermes ont créé un tabou contre ces armes. C’est le principe de la philosophie de stigmatisation, et c’est comme cela que fonctionne le traité : en ébranlant l’hégémonie nucléaire en influençant les mécanismes moraux, politiques, juridiques et économiques qui la soutenaient jusque-là.
Dans le contexte du IIème Forum mondial sur les violences urbaines et l’éducation pour la cohabitation et la paix, [N.d.T. Madrid, 5 à 8 novembre 2018] « l’Appel des villes de l’ICAN » a été lancé, par l’ICAN (Campagne Internationale pour l’Abolition des Armes Nucléaires). C’est un mouvement d’engagement des villes en faveur du Traité et leur appel au gouvernement concerné à y adhérer. Cette initiative réunit des campagnes en faveur du TIAN à travers le monde.
Il y a un mois, l’Inde déclarait avoir développé la capacité de tirer des missiles des sous-marins, qui ne génèrent pas beaucoup de frais, et pouvoir viser n’importe quelle ville. Les villes, la population civile sont la cible des armes atomiques. Les villes sont, en même temps, les vecteurs pouvant permettre un changement fondamental.
Les villes peuvent développer des programmes éducatifs qui contribueront à sensibiliser aux impacts humanitaires des armes nucléaires. Elles peuvent – et elles doivent – investir l’argent publique de façon responsable et mettre en œuvre la cessation d’investissements dans les armes nucléaires. Elles peuvent aussi appeler leurs gouvernements respectifs à signer et à ratifier le Traité. C’est d’une importance particulière dans des pays politiquement instables comme l’Espagne.
Le 2 septembre dernier, le Président du gouvernement d’Espagne, Pedro Sánchez, s’est engagé à signer le TIAN. Les pays membres de l’OTAN n’ont aucun obstacle d’ordre juridique quant à l’adhésion au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN). Le signer ou non est une décision strictement politique. La signature du Traité par le gouvernement espagnol serait une étape déterminante dans la diminution de l’hégémonie nucléaire.
Le soutien des conseils municipaux est essentiel afin de veiller à ce que le gouvernement espagnol actuel prenne la bonne décision. Afin que Pedro Sánchez respecte sa promesse de signer le TIAN et contribue à faire avancer le processus.
En Espagne, le conseil municipal de Saint-Jacques-de-Compostelle a déjà apporté son soutien au Traité. Le conseil municipal de Granollers a fait de même. Les villes de Madrid et Barcelone sont sur le point de rejoindre l’initiative. Nous avons le soutien du réseau de collectivités locales « Maires pour la Paix », axé sur la promotion du désarmement nucléaire.
Il est temps que l’Espagne se mobilise et franchisse cette étape de signification mondiale. Le désarmement nucléaire n’a jamais été aussi proche.
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Traduit de l’anglais par Elena Hennebelle