Texte et photos de Mauricio Alvarez
Le mouvement des Gilets Jaunes prend de plus en plus d’ampleur. À quelques jours d’une quatrième grande journée de manifestation, prévue ce samedi 8 décembre 2018, les actions se multiplient partout sur le territoire français : des filtrages sur les routes, des blocages de stations-service, des opérations « péage gratuit », etc. Malgré les différentes tentatives du gouvernement pour criminaliser cette mobilisation citoyenne sans précédent, le mouvement est toujours approuvé par plus de 75% de la population française. Les lycéens et certains syndicats s’ajoutent peu à peu à la mobilisation, et l’éventualité d’une grève générale ou d’une possible révolution hante tous les esprits.
Dans ce contexte particulier, nous souhaitons prendre un peu de recul pour tenter de comprendre l’impact de ce mouvement des Gilets Jaunes sur la Démocratie. La vraie.
Le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple
Pour commencer, revenons sur l’étymologie du mot Démocratie. Le mot vient du grec dêmos, peuple, et kratos, pouvoir, autorité. La démocratie est donc le régime politique dans lequel le pouvoir est détenu ou contrôlé par le peuple, sans qu’il y ait de distinctions du fait de la naissance, la richesse, la compétence… (principe d’égalité).
Il est évident de constater que même si la démocratie a été placée comme un idéal à atteindre, celle-ci a toujours été malmenée tout au long de l’histoire. Dans le cadre de cet article, il serait fastidieux de revenir sur des cas concrets du passé permettant de démontrer cette affirmation. Concentrons-nous donc principalement sur la situation actuelle.
Dans la plupart des pays du monde, la forme de gouvernement la plus courante, c’est l’oligarchie, où le pouvoir est réservé à un petit groupe de personnes qui forment une classe dominante. En France, il existe un parcours académique tout tracé pour les futures élites. Celui-ci s’étend des lycées Henri IV et Louis Le Grand aux grandes écoles ENA et Sciences Po.
Le résultat de ce parcours en circuit fermé, c’est la profonde déconnexion entre les vies “dorées” des gouvernants et celles des citoyens qu’ils sont censés représenter.
L’influence du capitalisme sur la Démocratie
Depuis l’avènement du capitalisme au XVIIIème siècle, les gouvernements du monde entier ont étés confrontés à une forte influence des industriels et des détenteurs du capital dans leurs décisions politiques. À tel point qu’aujourd’hui, les pays sont gouvernés comme de véritables entreprises, où le volet social est de plus en plus considéré comme une « déformation » qu’il faut à tout prix éviter. La croissance, l’équilibre budgétaire, la dette, la fiscalité, etc. sont les points de référence pour concevoir des stratégies et des programmes politiques. L’humain et la nature sont donc relayés à une place secondaire. Ils sont devenus de simples variables d’ajustement.
Reprenons les mots d’Étienne Chouard, « Depuis 200 ans, l’élection permet aux riches d’acheter le pouvoir, (et donc de ne plus payer d’impôts, de mener durablement une politique de chômage, de bas salaires et de gros profits) et ils appellent ça le ‘gouvernement représentatif’ ».
Le dialogue entre le peuple et les gouvernements est rompu
Dans plusieurs pays de la planète, les citoyens ne se sentent plus représentés par leur classe politique. Cette situation intenable a déjà provoqué des mouvements et des soulèvements populaires dans différents coins de la planète ces dernières années : protestations post électorales iraniennes (2009), Printemps arabe (2011), Révolution des parapluies à Hong Kong (2014), etc.
Dans certains pays la situation est bien plus grave. Car des oligarques ont fait le choix d’instaurer des régimes plus “forts”, voire totalitaires, et ceci afin de mettre progressivement la Démocratie à mort. En fin de compte, pourquoi faudrait-il faire des efforts pour servir le peuple si l’on peut l’asservir ?
En France, il est encore temps de protéger la Démocratie, même si celle-ci semble profondément malade. Et cela est logique, car ces dernières années, de Nicolas Sarkozy à Emmanuel Macron en passant par François Hollande, les décisions et les discours irrespectueux, arrogants et méprisants envers le peuple deviennent monnaie courante.
En Marche Arrière
Emmanuel Macron a été élu en 2017 pour incarner un changement positif, et cela avec un parti qui se plaçait en dehors des clivages partisans de “droite” ou de “gauche”. Pourtant, sa politique n’a fait qu’empirer la situation économique et sociale.
Par ailleurs, le président de la République pourtant réputé pour sa parfaite maîtrise de la langue française et de la rhétorique, n’a cessé de multiplier, depuis son élection, des mots et des phrases jugées inacceptables par les citoyens français. En voici quelques exemples :
- « Je ne céderai rien ni aux fainéants, ni aux cyniques » (1) et (2)
- « Les gens qui ne sont rien » (1) et (2)
- « Je traverse la rue, je vous trouve du travail » (2)
- « Des Gaulois réfractaires au changement » (2)
- « On met un pognon de dingue dans les minimas sociaux » (2)
- « La meilleure façon de se payer un costard, c’est de travailler. » (1)
- « Certains, au lieu de foutre le bordel, feraient mieux d’aller regarder s’ils ne peuvent pas avoir des postes …» (2)
Au niveau des mesures, celles-ci ne peuvent pas être plus impopulaires :
- La baisse des APL (Aide personnalisée au logement) (3)
- La suppression des contrats aidés (3)
- La vitesse abaissée à 80 km/h sur les routes secondaires (3)
- La réforme de la SNCF (3)
- Transformation de l’ISF en «impôt sur la fortune immobilière» (4)
Ces différentes mesures ont peu à peu entamé la confiance des citoyens envers le gouvernement, mais la goutte qui fait déborder le vase c’est sans aucun doute le projet du gouvernement d’augmenter une fois de plus les taxes sur les carburants à partir de Janvier 2019. Cette mesure de trop est à l’origine d’un mouvement sans précédent dans l’histoire récente de la France : Les Gilets Jaunes.
Dans la deuxième partie de cet article, nous allons analyser comment le mouvement des Gilets Jaunes pourrait avoir un impact positif sur la Démocratie.