Nous avons rencontré Ricardo Lucero, argentin et membre des conseils permanents pour la nonviolence active. C’est un projet qui a déjà plus de quinze ans et qui cherche à déconstruire la violence.

L’organisation est décentralisée et toute l’information se trouve sur les réseaux sociaux.

Vidéo : Álvaro Orús, Rédaction : Juana Pérez Montero et Tony Robinson

« Je m’appelle Ricardo Lucero. Je viens d’Argentine, invité par Philippe Moal et par la Mairie de Madrid afin de développer la thématique et de présenter les conseils permanents de nonviolence », c’est ainsi que se présente ce membre d’un collectif qui travaille sur l’élimination de la violence.

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Pressenza: Qu’est-ce que les conseils permanents pour la nonviolence active ?

Ricardo Lucero : Il s’agit d’une méthode que nous diffusons librement par différents moyens, notamment via les institutions qui doivent travailler sur le thème de la nonviolence. Il ne s’agit pas uniquement de recenser la violence là où elle commence, mais simplement de créer des espaces nonviolents d’échange, tant sur le sentiment interne de paix, de joie et de force que dans un système de relations cohérentes.

Pressenza: Les conseils traitent de la violence individuelle liée au contexte social dans lequel les individus se trouvent…

Ricardo Lucero: Disons que nous faisons un travail psycho-social et qu’ils sont nos modèles, basés sur trois plans : l’individu, avec son système de relations proches institutionnel, formel ou informel et le système sociocommunautaire qui est fortement déterminant dans la constitution de l’individu. Nous essayons alors de faire en sorte que l’individu soit moins dépendant de cette diminution d’information culturelle et qu’il puisse générer sa propre culture nonviolente à travers ses sensations, ses affinités avec les autres, son type d’organisation horizontale décentralisée, etc.

Pressenza: Ce projet coïncide très bien avec le Forum [N.d.T. Forum mondial sur la violence urbaine, Madrid, 5-8 novembre]. Qu’est-ce que vous apporte le Forum et que pouvez-vous apporter aux intéressés ?

Ricardo Lucero: Il me paraît fondamental au sujet de la nonviolence qu’il y ait non seulement un discours clair mais aussi une expérience précise de la relation affective, de la sympathie, de l’empathie, etc. Notre culture porte en principe des discours excellents au sujet de la paix, quand il y a de la bonne volonté. Toutefois, les individus sont un peu anesthésiés dans leur rapport à l’Autre, alors par bonne volonté, quand il y a une personne qui souhaite aider les autres, le fait de ne pas voir la situation de la personne dans son quotidien rend difficile la relation d’aide. C’est pourquoi nous proposons un entraînement aux personnes, qui nous semble très important, ceci sur trois plans : sur le plan de l’intimité personnelle, sur le plan du système de relation cohérente et sur la prise en compte du fait que nous ne vivons pas dans un monde avec des valeurs qui le forment mais qu’il est possible d’en former de nouvelles à travers une nouvelle culture, celle de la nonviolence, qui peut s’apprendre comme la violence.

Pressenza: Dans quel domaine travaillez-vous ?

Ricardo Lucero: Il s’agit fondamentalement de donner, c’est-à-dire que l’on donne à toutes les personnes qui le sollicitent, que ce soit les institutions ou des particuliers, et eux-mêmes l’enseignent librement à leurs groupes d’appartenance. Cela fait de nombreuses années que nous travaillons avec des universités, des hôpitaux, dans différents pays, en délivrant simplement la méthode, qui est ensuite adaptée en accord avec les médecins, aux besoins des travailleurs sociaux, etc.

Pressenza: Cela fait 15 ans que vous travaillez, à quel stade de développement en êtes-vous ?

Ricardo Lucero: Nous sommes en train de poser les briques d’une nouvelle société. Il est fort probable que nous voyons une partie de cette nouvelle société, mais si les briques forment une maison, une construction d’une nouvelle société ou une nouvelle culture, alors ce sont des briques fondamentales de cohérence. Il est nécessaire de les poser, bien qu’il soit difficile de percevoir le futur, car personne ne le peut. Mais nous savons que s’il n’y a pas de petites briques de nonviolence dans le cœur des hommes, allégoriquement parlant, une société en paix sera impossible.

Pressenza: Vous travaillez de manière décentralisée, en réseau…

Ricardo Lucero: Il y a des personnes dans ce réseau dont nous ne connaissons même pas le travail car nous donnons tout librement. La connaissance est décentralisée, horizontale, elle est libre d’accès. Tout ce que je sais se trouve sur les réseaux sociaux et tout ce que chaque spécialiste sait également. C’est pourquoi il y a beaucoup de personnes dans différents pays qui travaillent non seulement dans des institutions mais aussi par exemple dans la médiation et le plaidoyer, l’administration d’hôpitaux, bref différents types d’organisations. Et il y a le voisin, le voisin dans sa vie, avec son groupe qui vient vous remercier de ce que vous avez pu lui dire, parce que vous l’avez aidé à comprendre comment aider ses proches qui avaient des problèmes… Ceci est pour nous très émouvant, de voir ces personnes et le message se diffuser librement… Certains d’entre nous se connaissent mais il y a des gens qui pratiquent la nonviolence depuis deux ans et qui nous racontent : « écoute, le groupe est déjà organisé ».

Pressenza: Comment peut-on vous rencontrer ?

Ricardo Lucero : Il y a un site internet www.consejosnoviolencia.org mais aussi sur facebook, tu peux écrire « conseils permanents pour la nonviolence » ou la « méthode triple du changement… » et ensuite via toutes les formes électroniques où il y a des vidéos de cours pédagogiques archivés. Nous avons 15 ans d’expérience, ceci est par exemple un livre de 500 pages mais cela n’existe plus en papier, maintenant tout est en ligne, et cela correspond aux meilleures expériences de nonviolence que nous avons eu depuis 15 ans, dans un contexte de champs théorique, il peut se trouver en ligne.

 

Traduit de l’espagnol par Romane Vilain