Forum pour l’avenir de la culture
18 et 19 Novembre 2017, Théâtre Powszechny, Varsovie
A l’automne 2016, ce slogan a rassemblé près de trois mille participants au Congrès de la Culture. Nous nous sommes rencontrés à Varsovie et avons parlé de la culture en Pologne pendant trois jours.
Nous avons terminé la manifestation avec la conviction qu’un nouveau débat passionné avait commencé, le Congrès étant un lieu important – pas le seul – de ce débat. Nous ne doutons pas que la culture est l’un des terrains et, en même temps, le thème d’une contestation politique grandissante. Son enjeu est le même que lorsque les efforts pour sauver l’indépendance avaient échoué, il y a deux siècles, ou lorsque l’indépendance de la Pologne a pris forme, il y a cent ans.
Après encore cent ans, nous devons à nouveau répondre à la question : qui sommes-nous et qui voulons-nous être ? Le camp politique au pouvoir depuis 2015 définit clairement son objectif : il s’agit d’abolir le pluralisme social et de subordonner la vie du peuple polonais à l’appareil de l’état national. La réduction culturelle est l’élément principal de cette politique. Sous le slogan de la restauration des valeurs traditionnelles, du renforcement de l’identité et de la fierté nationales ou de la formation d’un patriotisme, les institutions culturelles sont reprises en main et assujetties aux programmes idéologiques du groupe au pouvoir ; la culture indépendante s’appauvrit et le travail des artistes est censuré. Dans le même temps, les autorités élaborent un système de propagande qui fait appel aux mensonges et à la désinformation à une échelle qui rappelle la propagande de la République populaire de Pologne.
La culture se trouve confrontée au culte, la critique artistique des œuvres au jugement religieux, et le ministère de la Culture ne s’occupe que du patrimoine et de l’histoire. Les discours de haine et la xénophobie s’intensifient pour trouver leur expression, de plus en plus fréquemment, dans la violence physique ; les libertés des citoyens sont menacées, la misogynie et l’obscurantisme sont omniprésents.
C’est précisément la culture qui est l’essence de la contestation et l’enjeu pour l’avenir. Nous avons besoin d’une vision globale, ouverte et partagée socialement qui embrasse la multitude et la variété des expériences, des pratiques, des goûts; une vision fondée sur les valeurs humanistes, fondée sur le respect de la dignité humaine et des droits humains ainsi que de l’environnement ; s’appuyant sur les ressources locales, nationales, européennes et sur le patrimoine humain.
Conscient de ce défi, en nous référant aux résultats du Congrès de la Culture de 2016 et à son message, nous lançons un appel : réunissons-nous à nouveau !
Rassemblons-nous à l’automne 2017, pour discuter de la culture en Pologne et de son avenir.
Rassemblons-nous pour travailler sur la vision de la culture et de la société de la République de Pologne du XXIe siècle, état membre de l’Union européenne et membre responsable de la communauté internationale.
Rassemblons-nous pour entreprendre la tâche d’inventer un projet pour le futur : créer une vision de la culture dont nous rêvons, celle que nous désirons pour nous-mêmes aujourd’hui et pour les générations futures. Nous avons besoin de nouvelles histoires qui nous redonneront espoir et le sens de l’engagement et de l’action pour des valeurs partagées. C’est le travail de Bildung, mentionné par Maria Janion dans sa lettre écrite au Congrès – le travail de compréhension conduisant à l’empathie, le travail éclairé de transformation de soi-même et du monde. Ne laissons pas la vision de l’avenir nous échapper !
Rassemblons-nous, il n’ y a pas d’alternative pour une culture libre.