« C’est une règle de prudence vulgaire, lorsqu’on est parvenu au faîte de la grandeur, de rejeter l’échelle avec laquelle on l’a atteint, afin d’ôter aux autres les moyens d’y monter » Friedrich List, économiste allemand (1789-1846)
Idée 1 : La libre circulation des richesses est un facteur de paix dans le monde
Pour les défenseurs du libre-échange, il faut des marchés les plus ouverts possibles pour que chaque pays se spécialise dans des productions exportables dans d’autres pays, ce qui doit conduire à un développement économique général. Le protectionnisme serait au contraire une attitude de repli sur soi, d’hostilité, inepte sur le plan économique puisque protégeant des activités non rentables. Il serait une réaction égoïste des pays riches voulant protéger leurs productions nationales et refusant de participer au développement des pays pauvres en important leurs produits.
A ce titre, le libre-échange est souvent perçu comme un facteur de paix dans le monde : le commerce forge des relations entre des pays qui n’ont pas envie d’initier de guerre avec leurs partenaires commerciaux. Pourtant, les conflits liés au libre-échange ont existé (exemple de la guerre de l’opium de 1839 à1842 qui oppose le Royaume-Uni à l’Empire Qing de Chine voulant interdire le commerce de l’opium sur son territoire) et ils risquent, à terme, de se multiplier. En effet, quand les termes de l’échange sont de plus en plus inégaux et que le libre-échange s’apparente à du dumping social (pratique consistant à violer, contourner ou dégrader le droit social pour en tirer le maximum de profits), c’est une guerre économique et commerciale que se livrent les travailleurs du monde entier et par ricochet, les pays où ils vivent.
Autre argument qui dément les effets positifs du libre-échange pour conserver la paix dans le monde : la généralisation du libre-échange à tous les pans de la vie et la soumission des sociétés et de l’environnement aux intérêts marchands des multinationales. C’est ce que l’on observe avec les négociations actuelles autour des traités dits TAFTA (entre les États-Unis et l’Europe) et CETA (entre le Canada et l’Europe). En effet, ces traités bilatéraux, négociés en toute opacité entre groupes industriels et financiers européens et nord-américains, veulent abolir toute réglementation pouvant faire obstacle au commerce et aux profits des entreprises. Il s’agit d’atteindre le plus haut niveau de libéralisation dans le plus de domaines possibles : la distribution d’eau et d’électricité, l’éducation, la santé, la recherche, les transports, l’aide aux personnes, la culture, le numérique… Tous ces secteurs qui, pour beaucoup, relèvent encore du service public, pourraient ainsi être ouverts à la concurrence.
Des deux côtés de l’Atlantique, des citoyennes et citoyens se mobilisent contre la ratification du CETA et les négociations sur le TAFTA. Deux traités de libre-échange qui portent gravement atteinte à la cohésion sociale, à l’expression des voix citoyennes et… à la paix dans le monde !
Idée 2 : Le libre-échange est le seul système qui ait fait ses preuves
Face à l’accroissement des inégalités mondiales, de nombreuses personnes s’imaginent que c’est en ouvrant toujours plus les marchés que se trouve la clé du développement. Il pensent que si le libre-échange se développe à grande vitesse, touchant pratiquement la totalité des pays et de plus en plus de domaines, c’est bien la preuve que c’est le seul système qui marche ! Nombre de pays du Sud veulent ainsi vendre plus et mieux et ils réclament un meilleur accès aux marchés occidentaux pour leurs produits agricoles. Dans les pratiques, c’est plutôt l’inverse qui se produit : les pays riches continuent d’exiger des pays du Sud qu’ils leur ouvrent toujours plus leurs marchés. Exemple : depuis les années 2000, des accords de libre-échange dits Accords de Partenariat Économique (APE) étaient en négociation entre l’Union européenne et les pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) pour que ces pays ouvrent leurs marchés aux produits en provenance de l’Union européenne. De fortes résistances étaient à l’œuvre de la part des sociétés civiles et des États du Sud craignant une concurrence déloyale sur leurs marchés agricoles ainsi qu’un grave manque à gagner (suppression des droits de douane pour les produits européens importés). La pression européenne a abouti en juillet 2014 à la victoire de l’UE : exceptée l’Afrique de l’Est, la plupart des grandes régions d’Afrique ont accepté de signer ces APE. A l’image des traités TAFTA et CETA, ces accords économiques vont avoir des conséquences très néfastes pour les populations des pays concernés et leur environnement. Côté européen, ils favoriseront l’agriculture productiviste, polluante et destructrice d’emplois. Côté africain, les agricultures paysannes seront détruites, la souveraineté alimentaire menacée, les industries locales pâtiront de cette concurrence déloyale et beaucoup d’emplois seront supprimés.
Le libre-échange galopant, tel qu’il est mis en œuvre depuis plusieurs décennies, renforce les inégalités entre pays développés et pays en développement car ce sont toujours les plus riches qui fixent les règles du jeu commercial, et les pays dominés qui sont sommés de les accepter. Des mesures protectionnistes sont pourtant nécessaires aux pays pauvres : ils ont parfois besoin de fermer leurs marchés pour protéger certains secteurs naissants ou vivriers et pouvoir se développer économiquement. L’aide internationale devrait contribuer à renforcer les capacités commerciales des filières exportatrices des pays du Sud mais aussi les aider à développer et protéger leurs cultures vivrières.
Que peut-on faire ?
Lire les brochures d’Attac sur les traités CETA et TAFTA
https://france.attac.org/IMG/pdf/guide_ceta.pdf
https://france.attac.org/IMG/pdf/guide_taftabd15-2.pdf
S’impliquer dans un collectif Stop Tafta, y signer la pétition « Non au grand marché transatlantique »
www.collectifstoptafta.org
En France, demander à sa mairie, aux PME de sa région de se déclarer « hors CETA et TAFTA »
Interpeller les élus sur les dangers des traités de libre-échange.