Pour permettre aux citoyen·ne·s de comprendre les enjeux et de se mobiliser face au projet de loi Travail, Attac et les Économistes atterrés ont rédigé un Petit guide de résistance à la loi Travail XXL.
Les réformes qui depuis plus de 30 ans ont flexibilisé l’emploi en France n’ont pas permis de lutter efficacement contre le chômage. Au contraire, elles ont précarisé l’emploi, aliéné le travail et fragilisé l’économie. Avec son projet d’ordonnances, Emmanuel Macron veut aller encore plus loin en soumettant le travail aux exigences du patronat et de la finance.
[3/9] Le travail coûte trop cher !
C’est le père de tous les bobards, celui duquel tous les autres découlent, celui qui continue à être propagé quand tous les autres ont été démentis. C’est pourtant la fake news par excellence, la médaille d’or des « post-vérités » du Medef !
« Il faut baisser les salaires pour que les entreprises embauchent »
Si les entreprises baissent les salaires, qui va acheter leurs produits ? Si les ventes diminuent, les entreprises investiront-elles ? Si les investissements baissent, qui embauchera ? Les patrons le disent eux-mêmes : ils embauchent si leurs carnets de commande sont pleins, pas si l’on baisse les salaires.
« Le coût du travail est plus élevé en France qu’ailleurs »
Les études de l’OCDE, de l’Union européenne et de l’INSEE convergent : le coût horaire du travail en France arrive en 5e position parmi les 28 pays membres de l’UE, derrière le Danemark, la Suède, la Belgique et le Luxembourg. Dans la seule industrie manufacturière, il est en moyenne de 33,22 €, de 38,27 € en France et de 40,72 € en Allemagne. Rapporté à la productivité, le coût du travail est sensiblement le même dans les deux pays.
« Les charges sociales écrasent les entreprises »
Ce qui distingue la France des pays du Nord de l’Europe, ce n’est pas le niveau du coût du travail, mais sa structure : plus de cotisations sociales chez nous, plus de salaires nets mais aussi plus d’impôts ailleurs. Pourtant depuis vingt-cinq ans, Balladur, Jospin, Fillon, Hollande n’ont cessé d’inventer de nouveaux allègements de cotisations sociales. Au niveau du SMIC, l’exonération est totale et elle est dégressive jusqu’au seuil de 1,6 SMIC. Le « pacte de responsabilité » de Hollande a ajouté de nouveaux allègements, dont le Crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) : plus de 40 milliards d’euros par an.
Et l’emploi ?
Les études montrent qu’environ 150 000 emplois sont préservés, soit un coût annuel exorbitant de 250 000 € par emploi. La preuve est donc faite que les 6 millions de chômeurs·euses ne sont pas dus aux salaires trop élevés.
Pour en finir avec ce bobard
Le « coût du capital », lui, est extravagant mais rarement mis en lumière. Des revenus indécents pour les grands patrons et hauts cadres, qui vont jusqu’à 1000 fois le SMIC !
Pour les actionnaires des entreprises du CAC 40, des dividendes qui ont atteint 46 milliards d’euros en 2017, un record depuis 2006.
D’où l’exigence de :
- subordonner toute exonération à la création effective d’emplois ;
- cibler toute aide vers les secteurs qui en ont besoin ;
- fixer un plafond à l’éventail des salaires versés dans les entreprises ;
- assurer l’égalité des salaires hommes-femmes ;
- refonder une fiscalité résolument progressive.
Sommaire et liens aux articles publiés :
[1/9] Il faut libérer le travail !
[2/9] Les ordonnances, c’est légal, légitime et démocratique !
[3/9] Le travail coûte trop cher !
[4/9] Le code du travail tue l’emploi !
[5/9] Licencier : une course d’obstacles pour les employeurs !
[6/9] Les accords d’entreprise, ça répond mieux aux nécessités du terrain !
[7/9] La fusion des IRP renforcera le dialogue social !
[8/9] Le pouvoir des syndicats sera renforcé !
[9/9] Tous micro-entrepreneurs, c’est l’avenir du travail !
Rédactrices/rédacteurs : Thomas Coutrot, Evelyne Dourille, Anne Eydoux, Karl Ghazi, Jean-Marie Harribey, Sabina Issehnane, Julien Lusson
Maquette et illustration : Stéphane Dupont, Jean Jullien, Mélanie Poulain