Lorsque Antoine, l’un des coordinateurs de l’association Utopia56 m’accueille devant l’entrée du centre d’accueil Paris Nord à Porte de la Chapelle, il définit cet endroit comme le premier camp de réfugiés en France. Le lieu est géré par Emmaüs Solidarité, en partenariat avec diverses associations et bénévoles. Il devait permettre à la fois un accueil des personnes en grande difficulté : les identifier et les diriger vers d’autres lieux d’accueil pérennes. Mais les difficultés sont nombreuses et le camp déborde sur les trottoirs et la rue.
Utopia56, conventionnée par la mairie de Paris, est chargée de distribuer des vêtements, d’accompagner les réfugiés à leurs rendez-vous médicaux et les mineurs dans les structures d’évaluation, de gérer la file d’attente et surtout de beaucoup écouter.
« C’est à l’honneur d’Anne Hidalgo (NdE. maire de Paris) qui a dû faire face à l’urgence », dit-il tandis que l’état renâclait à soutenir le projet. « Concernant le ministère de l’intérieur, il nous a souvent considérés comme des activistes », terme assez péjoratif, donnant l’image d’action coup de poing, voire violente, ce qui n’est pas du tout le cas au regard de leur engagement de terrain à Calais et à Grande-Synthe. « Bien qu’il y ait une nécessité d’une présence policière avec laquelle nous avons de bonnes relations, nous sommes attentifs à la violence policière qui s’exerce parfois, dans des actions comme vider les tentes et les affaires personnelles des migrants qui n’ont que ça. »
Parfois il ressent de la tristesse face à ces situations humaines, car « il existe des solutions simples et efficaces mais on a l’impression que seuls les aspects politiques, juridiques, économiques, logistiques relèguant l’être humain très loin, ont de l’importance. »
Peut-être aussi la non résolution de ce problème d’accueil permet-il de faire passer le message que la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde. Relayé par les médias, photos à l’appui, les Français et les futurs migrants sont donc informés !
Mais que se passerait-il si les citoyens bénévoles et les ONG agissant 24 h sur 24 n’étaient pas là ? Nourriture, hygiène, santé, hébergement, apprentissage de la langue, demande de papiers, et surtout relations humaines… la question reste heureusement sans réponse.
Ce qui motive Antoine, c’est de montrer la force des citoyens en Allemagne, en Grèce, en Italie, qui ont gardé leur humanité et une grande capacité à s’organiser et à agir.
« C’est une révolution, la prochaine ! Elle ne sera pas violente, on a essayé et cela n’a pas marché, ce sera une révolution de la solidarité. »
Utopia 56 : http://www.utopia56.com/fr