La semaine dernière, l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté une résolution pour la mise en place des négociations d’un nouvel instrument juridiquement contraignant afin d’interdire les armes nucléaires. C’est un immense succès ! Mais qu’est-ce que cela veut vraiment dire ?
Dans ce monde d’acronymes, de numéros de résolutions, de documents et de paragraphes sans fin, il n’est pas toujours facile de suivre et de comprendre ce que tout cela signifie réellement.
Voici quelques-unes des questions que nous avons reçues au sujet de la résolution :
1/ Que dit réellement cette résolution ?
La résolution « Faire avancer les négociations multilatérales sur le désarmement nucléaire» a été adoptée le 27 octobre 2016 par l’Assemblée Générale des Nations Unies. 123 États ont voté pour, 38 ont voté contre et 16 se sont abstenus. Vous pouvez consulter le résultat du vote détaillé ici.
La résolution prévoit une réunion pour la négociation d’un contrat juridiquement contraignant pour l’interdiction des armements nucléaires, qui se déroulera en 2017. Elle ne définit pas le contenu du traité, mais reconnaît l’impact humanitaire des armements nucléaires et les risques liés à l’existence d’armes nucléaires comme des raisons de s’engager pour leur interdiction.
2/ Quand les négociations auront-elles lieu ?
La résolution stipule que deux réunions de négociation auront lieu en 2017. La première rencontre se déroulera du 27 au 31 mars et la deuxième du 15 juin au 7 juillet 2017.
La résolution appelle les États à participer afin « d’unir leurs efforts pour conclure au plus tôt un contrat juridiquement contraignant pour l’interdiction des armes nucléaires ». ICAN croit en cette possibilité, et mettra tout en œuvre pour qu’un traité d’interdiction des armes nucléaires soit adopté à l’issue de la dernière réunion de négociations en juillet 2017.
3/ Les États ayant voté « contre » pourront-ils participer aux négociations ?
Oui ! La résolution précise que les négociations seront ouvertes à tous les États, aux organisations internationales et à la société civile. Elle encourage également tous les États membres des Nations Unies à participer aux négociations.
Plusieurs États ayant voté « contre » ont indiqué que leur décision n’excluait pas leur participation éventuelle aux négociations du traité. ICAN mettra tout en œuvre pour que le plus grand nombre possible d’États ayant voté « contre » prennent part de bonne foi aux négociations, et nous sommes sûrs que certains le feront.
4/ Quel impact réel aura ce traité si les États qui possèdent des armes nucléaires ne le signent pas ?
Une interdiction établira une norme internationale contre la possession d’armes nucléaires, ce qui contribuera à réduire la valeur perçue de ce type d’armements. Elle tracera une ligne de démarcation nette entre les États qui prônent que la possession d’armes nucléaires est inacceptable et injustifiable, et ceux qui trouvent que l’armement nucléaire est légitime et garantit une réelle sécurité.
Si les armes nucléaires continuent à être décrites comme des moyens légitimes et utiles à la sécurité d’un pays, les États qui n’ont pas développé de programme nucléaire militaire jusqu’à présent pourront être amenés à vouloir se munir de ce genre d’armes.
Interdire les armes nucléaires ne revient pas à les éliminer ; néanmoins, une interdiction constitue le point de départ nécessaire pour qu’un désarmement advienne. Bien que le démantèlement de tous les arsenaux nucléaires soit un long processus, un rejet international clair de ce type d’armements va constituer un élément important pour les efforts de désarmement futurs.
Une interdiction des armes nucléaires rendra le maintien et le développement de ces armes moins intéressant et plus difficile, à la fois pour ceux qui en possèdent déjà et pour ceux qui voudraient en acquérir. L’interdiction créera les conditions pour l’application de mesures de désarmement efficaces.
Des expériences antérieures, par exemple avec les armes chimiques et biologiques, les mines antipersonnel et les armes à sous-munitions, montrent que l’interdiction précède l’élimination, même lorsque tous les États ne signent pas le traité.
5/ L’adhésion à l’OTAN empêcherait-elle les États de participer et de signer ce traité ?
Il n’y a aucune raison légale pour qu’un pays de l’OTAN ne soit pas en mesure de travailler à une interdiction des armes nucléaires.
Les États membres de l’OTAN se sont réservé le droit d’adopter des politiques nationales indépendantes sur les armes nucléaires aussi longtemps que l’Alliance durera. Certaines positions nationales restreignent déjà la participation de certains États aux activités d’armement nucléaire de l’Alliance, sans pour autant limiter leur participation aux travaux de l’Alliance en général. Les États peuvent également modifier leur participation aux divers groupes de planification, et l’ont toujours fait, y compris au sein du Groupe de Planification Nucléaire.
Bien que le concept stratégique de l’OTAN établi en 2010 déclare que tant que les armes nucléaires existeront, l’OTAN demeurera une alliance nucléaire, le concept dit aussi que l’Alliance devrait travailler à créer les conditions d’un monde sans armes nucléaires. Une interdiction des armes nucléaires permettra de stigmatiser ces armes, créant de meilleures conditions pour un désarmement nucléaire.Travailler pour le désarmement nucléaire n’est pas seulement une référence dans un concept stratégique, c’est aussi une obligation inscrite dans le Traité de Non-Prolifération nucléaire (TNP), traité signé par tous les États membres de l’OTAN.
Le document final du TNP de 2010 appelait à réduire la dépendance des États vis-à-vis des armes nucléaires dans les doctrines de sécurité. En menant un travail de stigmatisation et d’interdiction des armes nucléaires, les États de l’OTAN peuvent s’acquitter de leurs obligations nationales tout en accroissant leur influence sur le prochain concept stratégique de l’OTAN, et peuvent ainsi mettre en application leurs engagements de 2010 sur la « réduction de la dépendance aux armes nucléaires dans les doctrines de sécurité ».
Les faits qui ont émergé au cours des trois dernières incidences humanitaires ainsi que le nouveau débat sur les risques de ce type d’armes devraient être le point de départ d’un dialogue entre tous les pays de l’OTAN sur ce que les États membres peuvent faire pour atteindre un monde sans armes nucléaires.
6/ Est-ce que ICAN participera aux négociations ?
Bien sûr ! Nous travaillerons dur pour que le prochain traité s’appuie sur des bases solides, que le plus grand nombre de pays possible participent et pour que les citoyens du monde entier puissent faire entendre leur voix pour influencer leur gouvernement.
Vous avez d’autres questions ? Consultez notre rubrique « Pourquoi une interdiction ? » ou envoyez un mail à coordination[at]icanfrance.org