Les 28 ministres du Commerce réunis ce matin [NDR. mardi 18 octobre 2016] en Conseil à Luxembourg ont renoncé à se prononcer sur le CETA. Le refus des parlements de Wallonie et de la région Wallonie-Bruxelles d’autoriser le gouvernement belge à signer le traité conclu depuis deux ans entre l’UE et le Canada oblige le Conseil de l’UE à ajourner le vote d’approbation pour lequel cette réunion avait été organisée. L’Allemagne chercherait également à temporiser depuis la décision du tribunal de Karlsruhe la semaine passée, qui demande à Berlin de prendre les garanties juridiques suffisantes avant signature.
C’est une grande satisfaction pour tous les citoyen.ne·s, les organisations de la société civile et les syndicats qui travaillent depuis des mois pour démontrer les menaces du CETA sur l’emploi, l’alimentation et l’agriculture, les territoires, le climat et l’environnement.
Pour Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac, « la Commission et les gouvernements favorables au CETA présentent depuis des mois ce traité comme inéluctable et largement consensuel au sein des États membres. Mais la détermination des parlementaires wallons est un exemple dont nous espérons qu’il sera suivi par d’autres parlements d’Europe, à commencer par celui de France, où de nombreux députés et sénateurs ont publiquement exprimé craintes et réticences à l’égard du traité. Nous espérons maintenant que le gouvernement en tirera les leçons, et renoncera à soutenir ce traité. Loin d’être une défaite, cela l’honorerait. »
Thomas Borrell, chargé de campagne aux Amis de la Terre, poursuit : « L’ensemble du processus d’élaboration et d’approbation du traité a été une farce : négociation dans la plus grande opacité, intoxication massive sur le contenu du traité, réécriture du chapitre Investissement pour désamorcer la critique, ajout à la dernière minute d’une déclaration interprétative sans la moindre consistance… Le traité, finalisé depuis deux ans, n’en finit pas de soulever oppositions et controverses. Aux côtés d’experts internationaux en droit et en économie et de personnalités politiques de tous bords, des millions de personnes ont alerté leurs gouvernements européens et canadien sur les risques qu’il comporte. Au lieu de reporter une décision qui déplaît aux promoteurs du CETA, il est temps de prendre acte du fait que ce traité est un échec, et d’y mettre fin. »
Karine Jacquemart, directrice générale de Foodwatch France, ajoute : « La Commissaire au Commerce, Cécilia Malmström et le Conseil préfèrent reporter le vote du CETA prévu aujourd’hui, brandissant la menace d’une perte de réputation de l’Union européenne s’il n’est pas adopté. Exercer une pression avec un tel argument sur les parlementaires wallons et européens est indécent. Cet accord, qui nous est présenté comme “à prendre ou à laisser”, est antidémocratique. Quiconque ose s’y opposer se voit pointer du doigt. Ce n’est pas digne de la démocratie européenne ».
Pour Amélie Canonne, de l’AITEC, « la Commission et les États membres vont maintenant chercher une issue pour sauver le traité, en tentant de faire plier le gouvernement wallon, mais dans tous les cas, le CETA apparaît désormais comme un naufrage, et remet en cause l’ensemble de la politique de commerce et d’investissement que l’UE et les grands États membres tentent d’imposer aux 550 millions d’Européen·ne·s. Les défenseurs du traité parviendront peut-être à sortir de l’ornière en usant de pressions et de mesures de rétorsion. On peut imaginer que la Commission propose une nouvelle version de la fameuse Déclaration conjointe d’interprétation, ou qu’elle aménage le texte à la marge en accord avec le gouvernement fédéral canadien. Dans tous les cas, le recul du Conseil ce matin marque un point de rupture et la politique commerciale de l’UE doit désormais faire l’objet d’un aggiornamento complet. »
Le Collectif Stop TAFTA craint que les États membres et la Commission ne cèdent pas pour autant et poursuivent leurs manœuvres politiques pour faire aboutir le traité. Mais ses presque 80 membres, organisations de solidarité internationale, de protection des consommateurs, de défense de l’environnement, syndicats, groupes de citoyens… – considèrent d’ores et déjà l’ajournement du vote comme une victoire, qui consolide son analyse : le CETA doit être rejeté.