Décrété après les attentats du 13 novembre, l’état d’urgence a donné aux autorités des compétences extraordinaires qui ont été prolongées jusqu’au 28 février : assignation à résidence, perquisition administrative … le tout sans intervention préalable d’un juge, visant toute personne dont le « comportement constitue une menace pour la sécurité et l’ordre publics ».
L’état d’urgence devrait donc se terminer fin février, cependant, le gouvernement a présenté le mercredi 23 décembre 2015 une réforme de la Constitution inscrivant l’état d’urgence dans le texte fondateur de la Ve République. Ce projet de loi indique clairement l’intention du gouvernement : celui de « renforcer de façon pérenne les outils et moyens mis à disposition des autorités administratives et judiciaires, en dehors du cadre juridique temporaire mis en œuvre dans le cadre de l’état d’urgence. »
Mais pourquoi vouloir inscrire l’état d’urgence dans la constitution ?
Cet acte politique permettra d’élaborer des lois sécuritaires qui comprendront de nombreuses mesures d’exception restrictives des libertés mais qui ne pourront plus être qualifiées comme anti constitutionnelles mais au contraire respectant « les valeurs de la république».
Parallèlement, le gouvernement veut aussi inscrire la déchéance de nationalité étendue aux binationaux nés Français dans un article de la constitution.
En souhaitant retirer leur nationalité à des Français de naissance, le gouvernement se place dans la continuité de la loi du 22 juillet 1940 adoptées sous Vichy en 1940, loi votée par le même Parlement que celui élu en 1936 avec le Front Populaire.
De plus, le gouvernement donne une dimension constitutionnelle à l’idéologie de l’extrême droite et le Front national ou autres despotes pourront élargir le champ des déchéances de nationalité, dès qu’ils arriveront au pouvoir.
Mais pourquoi avoir mis ce thème sur le devant de la scène?
La déchéance de nationalité est la mesure qui attire le plus l’attention alors que la constitutionnalisation de l’état d’urgence recèle des dangers aussi et même plus importants.
Mobiliser les esprits sur ce sujet et non sur l’ensemble du projet de loi constitutionnel semble un sordide calcul politique, pour pouvoir faire passer la constitutionnalisation de l’état d’urgence « en douceur » et positionner le gouvernement pour la prochaine échéance électorale de 2017.
Mais, au-delà de ces petits calculs mesquins, au-delà de l’inefficacité de ces mesures pour assurer notre sécurité, ce projet de réforme de la constitution marque un nouveau pas en avant vers le contrôle de la société.
C’est donc tout le projet de Loi constitutionnelle, tel qu’il a été présenté le 23 décembre 2015, et non seulement la déchéance de nationalité, qui doit être combattu et rejeté par les citoyens.