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(Texte écrit le 18 janvier 2015)
Le 25 janvier, la Grèce fermera la porte au passé. La victoire de Syriza porte l’espérance du changement pour les mondes du travail et de la culture en Europe. Des ténèbres de l’austérité et de l’autoritarisme à la lumière de la démocratie, de la solidarité et du développement durable. Mais la Grèce est seulement le début du changement qui s’annonce dans le Sud de l’Europe. Nous verrons bientôt comment il arrivera également en Espagne…
Dans nos pays, les promoteurs politiques de l’austérité, de l’insécurité et de la peur, de la corruption et des scandales vont connaître la défaite. Nos peuples tiennent leur avenir entre leurs mains pour ouvrir demain la porte à des dirigeants incorruptibles. Une nouvelle manière de faire de la politique pour se réapproprier un avenir que cette crise nous a bouché. C’est pourquoi la victoire du peuple grec et de Syriza annonce un chemin nouveau et prometteur pour l’Espagne. Le Sud est en marche pour changer l’Europe.
L’Europe n’est plus victime de la crise. La crise s’est terminée là où elle avait commencé : aux Etats-Unis, grâce une politique monétaire et fiscale expansionniste. L’Europe est aujourd’hui victime des politiques d’austérité imposées par les forces conservatrices et par les décisions non solidaires de la chancelière Merkel. La gestion néolibérale de la crise a conduit les pays du Sud à un équilibre politiquement inacceptable et économiquement insoutenable. Nous survivons entre la stagnation et la faible croissance du produit intérieur brut, entre la déflation, une dette élevée, un chômage massif et une pauvreté qui atteint aujourd’hui des niveaux inimaginables.
Parler de sortie de la crise avec des taux de croissance de la zone euro encore très faibles (0,8 % en 2014 et 1,1 % en 2015) peut seulement se comprendre à partir d’une vision de la politique qui ignore les victimes les plus frappées par les politiques d’austérité. Pour cette raison, la lutte de nos peuples pour le changement est la lutte du simple bon sens contre le fanatisme idéologique. C’est la lutte de la dignité contre la servitude.
Pour nous, cette nouvelle normalisation de la précarité et de l’amputation des droits sociaux à la faveur de la crise, et qui est acceptée de manière acritique par les pouvoirs conservateurs, n’est pas acceptable. Elle nous motive pour impulser le changement dont la Grèce, l’Espagne et l’ensemble de l’Europe ont besoin.
La victoire de Syriza sera l’occasion d’un nouveau départ pour la collaboration entre toutes les forces progressistes du Sud européen, en même temps qu’elle constituera un frein aux politiques d’austérité qui sont la cause de la stagnation, du chômage de masse et du surendettement. Ce sera également le premier pas vers la restauration de la sécurité économique, l’élimination des pratiques corrompues qui infectent la politique et la récupération de la dignité de nos pays. Egalement vers le retour au pays de notre jeunesse en exil, cette nouvelle génération d’émigrés.
Dans cette nouvelle phase de la crise, la Banque centrale européenne (BCE) a en main les clés de l’Europe. Une politique d’assouplissement quantitatif est une des mesures nécessaires pour une sortie collective et durable de la crise dans laquelle est plongée la zone euro depuis trop longtemps. Si elle est mise en œuvre, elle sera la bienvenue, même si beaucoup pensent qu’elle arrive bien tard. Pour être efficace, elle devra cependant répondre pleinement à l’esprit du « Nous ferons tout ce qui sera nécessaire » énoncé par Mario Draghi. Cela signifie que le programme de la BCE devra être à grande échelle, sans conditions et sans exceptions. En d’autres termes, il devra bénéficier à tous les pays qui en auront besoin.
Pour autant, la politique monétaire n’est pas, à elle seule, en mesure de sortir l’Europe de la stagnation. Il nous faut d’urgence une politique fiscale qui encourage la croissance et l’investissement ; un New Deal européen qui finance des programmes d’investissement dans des secteurs à haute valeur ajoutée, ainsi qu’un plan de réindustrialisation donnant la priorité aux économies dans lesquelles les taux de chômage sont les plus élevés.
Enfin, il est indispensable d’alléger la charge de la dette de manière coordonnée par la convocation d’une Conférence européenne sur la dette en prenant comme référence la Conférence de Londres de 1953 qui facilita la reprise économique de l’Allemagne après la guerre. Une solution collective et socialement soutenable au surendettement de la zone euro ne doit pas être interprétée par la chancelière Merkel comme une mesure associée au risque moral. Ce devrait être un devoir moral.
Le 25 janvier, l’espérance aura une patrie. Et l’Europe aura une boussole pour le changement.
Source : http://www.medelu.org/Le-Sud-en-marche-pour-changer-l
Illustration : Alexis Tsipras (Syriza)