Non, l’Allemagne n’a pas été contrainte d’importer plus de courant de France pour compenser l’arrêt des réacteurs !
En Europe, les marchés de l’électricité sont interconnectés et des échanges ont lieu en permanence entre les différents pays. En 2012, malgré l’arrêt de 8 réacteurs, l’Allemagne est restée exportatrice d’électricité… et a même plus vendu d’électricité à la France qu’elle ne lui en a acheté, comme le montrent les chiffres du Réseau de Transport d’Électricité ! En effet, le boom des énergies renouvelables a provoqué un afflux important de courant issu du solaire et de l’éolien.
Non, l’Allemagne n’a pas massivement développé le charbon pour sortir du nucléaire !
Attention aux amalgames ! À tort, de nombreux médias français, présentent la situation en Allemagne comme l’opposition des partisans du charbon et du nucléaire. En réalité, ce sont les mêmes grandes firmes électriques (E.On, RWE, Vattenfall…) qui exploitent à la fois les centrales nucléaires et les centrales au charbon. Quant aux citoyens qui souhaitent la sortie du nucléaire, ils se mobilisent aussi pour les énergies renouvelables et contre le charbon et les gaz de schiste.
Pour compenser la capacité de production électrique supprimée en fermant les réacteurs nucléaires, l’Allemagne compte sur une production accrue des énergies renouvelables (60%), sur une réduction des exportations d’électricité (35%) (même si elle reste exportatrice nette) et enfin sur les économies d’électricité (5%).
La décision de sortie du nucléaire ne s’est pas accompagnée de nouveaux projets de centrales au charbon : les seules qui sont entrées en service depuis Fukushima sont celles dont la construction avait déjà commencé des années avant et/ou des installations qui avaient subi des travaux pour émettre moins de gaz à effet de serre.
Non, l’Allemagne ne subit pas une augmentation massive de ses émissions de gaz à effet de serre du fait de la sortie du nucléaire !
En 2011, la fermeture de 8 réacteurs ne s’est pas traduite par une hausse des émissions de gaz à effet de serre. La sortie du nucléaire est à resituer dans le contexte beaucoup plus large de la transition énergétique allemande, qui prévoit des objectifs ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre : 80 % d’émissions en moins d’ici 2050.
Les émissions ont cependant légèrement augmenté en 2012, pour des raisons conjoncturelles qui ne sont pas liées à la politique de sortie du nucléaire, mais découlent de l’état mondial du marché de l’énergie : le boom des gaz de schiste aux USA a réduit la demande en charbon, poussant vers le bas les prix de la lignite, plus émettrice. L’Allemagne reste cependant en bonne voie pour atteindre son objectif de 40% de réduction d’émissions d’ici à 2020. Rappelons par ailleurs que la France, moins ambitieuse, ne compte réduire ses émissions que de 20% d’ici à cette même date… Et un Français moyen consomme plus de pétrole qu’un Allemand ou un Britannique [1] !
Non, les citoyens allemands ne regrettent pas la décision de transition énergétique !
Selon un sondage récent, 77 % des Allemands approuvent la transition énergétique. Les énergies renouvelables sont largement plébiscitées et beaucoup d’Allemands souhaitent qu’elles se développent encore plus. Il faut par ailleurs mentionner qu’en Allemagne, la consommation d’électricité des ménages est inférieure de 27% à la moyenne française !
Par ailleurs, la transition énergétique est un phénomène largement porté par les citoyens, un grand nombre d’entre eux étant désormais producteurs et revendeurs d’électricité. Les coopératives citoyennes de production d’électricité se comptent par centaines.
Si les Allemands soutiennent fortement la transition énergétique, ils sont en revanche très critiques de la nouvelle coalition gouvernementale formée fin 2013, qui pourrait la freiner et réduire les tarifs de rachat des énergies renouvelables.
Non, les énergies renouvelables ne sont pas un fardeau économique pour l’Allemagne !
Les énergies renouvelables bénéficient certes d’un tarif de rachat (qui risque d’ailleurs d’être remis en question). Mais depuis des décennies, elles ont coûté beaucoup moins que les énergies fossiles et nucléaire, massivement subventionnées.
Par ailleurs, leur coût de production baisse de plus en plus et elles permettent de diminuer les importations de combustibles fossiles. Le soleil et le vent n’envoient pas de facture !
Non, la transition énergétique ne mine pas la compétitivité de l’Allemagne !
Toute politique énergétique a un coût, qu’il s’agisse de maintenir le statu quo ou de changer radicalement. Les sommes dépensées pour la transition énergétique ne sont pas une charge, mais de vrais investissements pour l’avenir, qui permettent de diminuer les importations de matières premières, d’éviter des risques et de créer des emplois. Les énergies renouvelables ont déjà créé 380 000 emplois en Allemagne ; selon l’Agence des Énergies Renouvelables, ce chiffre pourrait passer à 500 000 d’ici à 2020.
Malgré un coût de l’électricité plus élevé qu’en France, pas de vague de délocalisations en Allemagne, qui reste la 4ème puissance économique mondiale…
Non, l’intermittence des énergies renouvelables n’est pas une menace pour la sécurité d’approvisionnement !
Contrairement aux craintes souvent exprimées, l’Allemagne n’a pas connu de black-out depuis l’arrêt de 8 réacteurs.
La fermeture progressive des réacteurs allemands et l’arrivée massive d’électricité d’origine renouvelable sur le réseau électrique nécessite de passer à un autre modèle de production d’électricité, reposant sur un plus grand nombre de petites installations de production, variables mais prévisibles. Cette transition nécessite des ajustements mais elle n’est pas insurmontable. Le projet « Kombikraftwerk » (centrale combinée) a montré qu’on pouvait garantir un approvisionnement électrique sûr et 100% renouvelables 24h/24, tout au long de l’année uniquement grâce à une multiplicité d’installations situées dans tout le pays.
Le principal enjeu n’est pas technique, mais économique : mettre fin au monopole des gros fournisseurs capitalistiques pour passer à un système reposant sur une diversité de petits producteurs.