« David Cameron et Barack Obama, lors de leur discussion de samedi, ont jugé que les attaques présumées à l’arme chimique du régime d’Assad ont entériné le conflit dans une nouvelle phase méritant une « sérieuse riposte ». L’Occident pourrait donc déclencher une intervention militaire en Syrie.
Lors d’une conversation téléphonique de 40 minutes, les deux chefs d’États auraient conclu que le régime de Bachar el-Assad était très certainement responsable de l’attaque qui aurait tué près de 1 400 civils à Damas, en milieu de semaine dernière. » … « Le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a déclaré samedi que «toutes les informations dont nous disposons convergent pour dire qu’il y a eu un massacre chimique près de Damas et que c’est le [régime de Bachar el-Assad] qui en est à l’origine. »
Mais… « Avant d’en tirer des conclusions hâtives, nous devrions tenir compte du motif : le régime syrien au pouvoir a toutes les raisons d’éviter le recours aux armes chimiques et biologiques puisque l’utilisation d’ADM précipitera l’évidente action militaire des États-Unis et de leurs alliés. Pourquoi le régime de Bachar el-Assad provoquerait-il des attaques extérieures alors qu’il est en guerre intérieure contre les forces rebelles et étrangères (dont certaines sont rattachées à Al-Qaïda) qui sont, elles, déjà financées et soutenues par les pays occidentaux ? Les États-Unis, leurs alliés et ces mêmes forces d’opposition ont cependant toutes les raisons de lancer les États-Unis dans un conflit ouvert sur le sol syrien. En effet, les États-Unis sont de nouveau résolus à éliminer un gouvernement hostile à l’hégémonie américaine mais sans intervention directe des forces armées américaines, les rebelles ne peuvent espérer gagner cette guerre civile sanglante.
Qui croire ?
Les images de femmes et d’enfants morts ou mourants présentant des signes d’empoisonnement chimique qui sont continuellement diffusées à la télévision ont pour but de révolter l’opinion « Que quelqu’un agisse, et vite ! ». En effet, « les forces navales américaines se rapprochent de la Syrie et le président Obama réfléchit aux choix militaires envisageables pour répondre à l’utilisation présumée d’armes chimiques par le gouvernement d’Assad. »
La prudence peu caractéristique de l’Occident à s’engager plutôt que l’habituel refrain « tirer d’abord, poser les questions ensuite », dénoterait-elle une certaine lassitude due aux leçons tirées en Afghanistan, en Lybie ou encore en Iraq… ? Ou bien est-ce simplement la conséquence de l’alliance de la Syrie et de la Russie qui récuse formellement toute intervention ?
« La première victime d’une guerre, c’est la vérité »
Cette citation, dont la paternité est assez ironiquement controversée, convient tout à fait à la situation syrienne. Chaque camp accuse l’autre de ses propres atrocités. Alex Thompson, journaliste sur la chaîne britannique Channel 4 a d’ores-et-déjà révélé que les rebelles l’avaient piégé pour l’abattre et faire en sorte que le gouvernement semble responsable. Une expérience partagée par d’autres selon les tweets qu’il a reçus.
En Syrie, des atrocités sont commises de tous côtés. Plus de 100 000 personnes ont été tuées et plus d’un million délogées, dont beaucoup d’enfants. Si la communauté internationale veut réellement faire cesser ces horreurs, elle devra suivre la piste empruntée par l’argent pour découvrir qui finance les armes, et forcer les participants à s’asseoir et négocier une solution politique. Plus cette action sera retardée (ou si une intervention militaire est décidée), plus il y aura de groupes impliqués qui riposteront à leur propre vision extrême du monde puisque tout dialogue sensé leur sera devenu impossible.
Et il ne fait aucun doute que le conflit entraînera sur son passage d’autres pays de cette région, comme c’est déjà le cas du Liban.
Traduction de l’anglais: Marion Grandin