En 1966, nous accourons au cinéma pour regarder l’audacieux film de science-fiction de Truffaut : Fahrenheit 451. Ce film est basé sur le roman de 1953 de Ray Bradbury, parlant d’un futur oppressif dans un régime totalitaire, dans lesquels le rôle des pompiers est de brûler tous les livres.
Même si Bradbury a écrit ce roman afin de prévenir des censures sans cesse croissantes qu’imposaient Staline et Hitler ainsi qu’à partir de sa propre expérience du maccarthysme. Ironiquement, ce roman fut dénoncé par plusieurs individus, qui ont exigé que certaines parties du roman fassent l’objet de censure. À cette époque, il semblait absurde d’imaginer que l’état « civilisé » et « démocratique » qui constituait nos pays, se livrer à l’un de ces exercices qui figure allégoriquement dans le livre et le film.
Maintenant, cela est moins certain
Le correspondant Gleen Greenwald du journal britannique The Guardian a été le premier à publier une partie des dossiers divulgués par Edward Snowden. Il a été obligé de détruire les disques durs des ordinateurs contenant des copies de ces documents qui ont révélé la haute surveillance, le plus souvent illégal des citoyens américains et britanniques par leurs gouvernements.
Sous la surveillance des officiels de la GCHQ, l’éditeur du Guardian et un expert en informatique ont physiquement détruit les disques durs contenant le matériel offensant, une action hautement symbolique puisque des copies du matériel en question existent dans d’autres pays.
En parallèle à cela, le partenaire de Glenn Greenwald, David Miranda a été détenu pendant neuf heures et a été interrogé à l’aéroport de Heathrow à Londres, selon une loi appliquée pour les personnes impliquées dans des actes de terrorisme, même si a aucun moment, il a été accusé d’être impliqué dans de telles activités. Son ordinateur et ses clés USB ont été confisqués, car il collabore parfois dans le cadre de son travail journalistique avec son partenaire.
La classe moyenne des Nimbys*, les guerriers écologiques et un parlementaire des Verts peuvent également se faire arrêter
Une étrange alliance des résidents les plus aisés du village anglais de Balcombe dans le West Sussex, des manifestants écologiques expérimentés et un membre du parlement du Parti vert Caroline Lucas se sont rassemblés pour protester contre le forage exploratoire pour du pétrole et du gaz par la compagnie d’énergie Cuadrilla, qui veut initier des extractions par fracturation. Ce système controversé qui pourrait entraîner la contamination de l’eau et déclencher des petits séismes (selon le rapport environnemental du National Geographic). Beaucoup de manifestants ainsi que la membre du Parlement ont été arrêtés en dépit d’avoir utilisé que des méthodes non‑violentes et seront déférés devant la justice. Pressenza a déjà signalé la disparition mystérieuse d’un compte twitter lié à la manifestation anti-fracturation de Balcome, qui a été rapporté plus en détail sur le site d’Occupy London.
Les lettres du Prince Charles aux politiciens ne seront pas rendu publiques
La Grande-Bretagne est une constitution monarchique et la famille royale n’est pas supposée s’immiscer dans le processus politique. Mais l’héritier du trône a écrit de nombreuses lettres aux politiciens et a rencontré à plusieurs reprises des officiels élus. Des tentatives de publier ces lettres sous la Freedom of Information Act (Loi pour la liberté d’information) de 2005, puisqu’il pourrait fournir des preuves que le Prince lobby des ministres avec son opinion personnelle, mais cela a été rejeté par le procureur général.
De la science-fiction dystopique à une technologie effrayante
Bradbury a été crédité d’avoir prédit la télévision à écran plan et la massification ainsi que l’addiction au divertissement. Le livre 1984 d’Orwell nous a laissé avec le classique « Big Brother is watching you » (Nous vous surveillons) qui est proche du progrès de la technologie d’aujourd’hui qui a la capacité de fournir au gouvernement les moindres détails de la vie de ces citoyens. Bien que « Big Brother », nous rappelle plus l’émission cruelle de « téléréalité » que son sens premier.
L’inquiétante érosion des libertés civiles
La liberté d’être informée, le droit à la vie privée, la liberté d’expression et le droit de manifester sont toutes des libertés civiles que la plupart d’entre nous tiennent pour acquis dans nos soi-disant démocraties alors que nous regardons avec répulsion les pays moins « civilisés » ayant des restrictions et des répressions encore plus fortes.
Les choses changent, néanmoins et ceux qui essaient de faire entendre leurs voix contre les minorités qui ont de plus en plus le contrôle et dont le mécanisme affecte tous les états, ne sont pas traitées avec compassion. Le verdict de Bradley Manning sera rendu aujourd’hui. Curieusement, le slogan inspiré de Spartacus utilisé par ses partisans est également une allégorie frappante du processus dans lequel nous sommes impliqués, puisque nous sommes tous, littéralement, Bradley Manning, au bon vouloir (ou non) de l’État.
Dernière nouvelle sur Manning
Bradley Manning a été condamné à une peine de 35 ans de prison et a été exclu de l’armée pour conduite déshonorable. Ceci est la peine la plus sévère jamais donnée à un lanceur d’alertes et c’est sans doute un avertissement à quiconque d’autres qui souhaiterait communiquer des informations non autorisées.
*NdT : Nimby est l’acronyme de « not in my backyard », ce qui équivaut en français à «pas chez moi ». C’est un terme péjoratif décrivant l’opposition des résidents à des projets au niveau local d’intérêts généraux et qui sont considérés par les résidents comme étant nuisants.
(Traduit de l’anglais par Catherine Pageault)