Image : David Andersson
Dans son discours lucide et passionnant qui dura 1h20 devant 2500 personnes dans la salle plénière, le premier jour du Forum Global Media, Chomsky aborda de nombreux thèmes parmi lesquels nous pouvons citer : le modèle alternatif des ‘Commons’, la fausse démocratie et le thème de l’armement dans ses diverses expressions (drones, le danger nucléaire, la politique terroriste d’Obama).
Nous avons demandé aux représentants de l’atelier coordonné par Pressenza et à sa directrice, leurs opinions sur ces thèmes.
Quelles sont tes impressions concernant la manière dont Chomsky traite le thème du modèle alternatif des Commons ?
David Andersson : J’ai apprécié que Chomsky aborde ce thème en y apportant un regard de processus historique et pas seulement celui du présent. Il s’agit d’un thème essentiel, très ample et diversifié parce qu’il englobe ce qui n’est pas public ni privé, quelques exemples dans les services wikimedia, commons, linux, les activités des communautés, des réseaux de réciprocité ; des biens communs tels que l’eau et l’air ; les espaces communs qui ne sont ni publics ni privés.
Ce concept dérange le système parce qu’il ne peut pas être contrôlé, ni lui mettre des limites ou des règles et quand bien même les commons ont aussi des règles, celles-ci sont dynamiques par exemple le cas d’internet lorsqu’il n’est pas contrôlé.
Le processus d’appropriation des biens et des services passe généralement de ce qui est commun puis va vers le public et finit dans le privé.
Ce qui arrive dans la santé ou l’éducation dans plusieurs pays est un clair exemple de ce mécanisme : le premier pas est de transformer un bien ‘commun’ en un bien public, ce qui alors est manipulé par les politiques ; ensuite on le laisse mal organisé pour après le privatiser en le présentant cela comme la solution idéale.
Et les ‘commons’ sont le contraire de cette tendance.
Ce qui se passe en ce moment en Turquie est une démonstration de ce qui arrive quand on tente de s’approprier quelque chose que les gens considèrent profondément comme ‘commun’.
L’axe du discours de Chomsky a été la fausse démocratie. Quel est le point qui t’a le plus touché ?
Roberto Blueh : La manière dont Chomsky présente le thème me semble très intéressante en montrant avec des exemples comment la minorité qui contrôle le pouvoir et la richesse prétend protéger les plus faibles mais en réalité elle ne fait que défendre ses intérêts, et ensuite en arrivant au moment présent, ils appellent cela démocratie.
Aujourd’hui, il est bien évident que les gouvernements font des choses différentes à ce que les peuples veulent, comme on peut le voir dans les cas de l’Espagne, de la Grèce, de la Turquie, …
En tant que porte-parole de ‘Monde sin Guerre et sans Violence’, comment vous semble l’analyse de Chomsky mettant l’emphase sur le thème de l’armement dans ses diverses expressions (drones, le danger nucléaire, la politique terroriste d’Obama).
Tony Robinson : Son point de vue coïncide avec le nôtre. Chomsky voit clairement que le problème vient des gouvernements des Etats- Unis et non pas d’Iran, de Chine ou de Corée.
Il ne s’agit pas seulement du fait d’avoir des armes et la technologie militaire mais essentiellement de l’attitude de fond avec laquelle ils se donnent le droit de faire n’importe quoi pour protéger leurs intérêts tandis que les autres ne peuvent même pas avoir le droit de la possibilité de se défendre.
Comme par exemple l’opération de l’assassinat de Ben Laden au Pakistan démontre l’irresponsabilité du gouvernement d’Obama, qui était conscient du risque de produire une guerre avec un pays qui possède l’arme nucléaire.
Nous aussi, nous considérons que la plus grande menace aujourd’hui est le danger nucléaire.
A la fin, la journaliste qui présentait le discours demanda à Chomsky ce qu’il aimerait que fasse la presse ? Il répondit : ‘qu’elle dise la vérité sur les choses importantes’.
En tant que directrice de Pressenza, comment interprétez-vous la réponse de Chomsky ?
Pia Figueroa : comme une dénonciation de la manipulation médiatique faite à partir d’un point central en Europe. Les media sont aujourd’hui des entreprises journalistiques qui sont la propriété d’énormes et puissants conglomérats économiques. Et en Amérique du Sud, où je vis, elles constituent la principale opposition aux gouvernements progressistes de la région ; il n’y a pas de partis d’oppositions mais des medias d’opposition qui dans une situation de déstructuration politique insistent pour proposer un modèle caduque et inefficace.