Par Philippe Steinier (*)

On aurait pu croire que l’évolution des mentalités et de la société auraient pu être favorables à la reconnaissance officielle de l’assistance sexuelle pour personnes handicapées en France. La récente projection du film « The Sessions » semblait refléter une évolution en matière de prise de conscience quant à cette problématique spécifique. Toutefois, les récents évènements contredisent ce sentiment subjectif et on peut même oser affirmer sans trop se tromper que l’assistance sexuelle à destination des personnes handicapées est presque définitivement (et jusqu’à nouvel ordre) enterrée en France et ce en vertu de l’avis défavorable rendu par le Comité consultatif national d’éthique (CCNE).

Pour rappel, c’est en 2011 que la ministre des Solidarités et de la cohésion sociale du moment, Roselyne Bachelot, saisissait le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) sur la question de l’assistance sexuelle en France (la ministre s’étant d’ailleurs déclarée publiquement et ouvertement opposée à ce type d’assistance sexuelle avant même cette demande d’avis).

Le CCNE vient de rendre ce 11 mars 2013 son avis motivé, un avis qui, de façon assez étrange et illogique est daté du 27 septembre 2012 !

Cet avis, qui s’étend sur 14 pages, a été rendu après audition d’associations représentatives des personnes handicapées ainsi que des porte-paroles du mouvement du Nid qui milite pour une société sans prostitution.

L’avis du Comité consultatif national d’éthique est maintenant officiellement déclaré comme négatif, le Comité s’opposant dès lors à la mise en place de services d’assistance sexuelle en France.

La motivation essentielle repose sur le fait que ce type d’assistance sexuelle rajouterait des frustrations supplémentaires à celles déjà présentes au niveau de la personne moins valide.

En effet pour le CCNE l’assistance sexuelle entraîne des risques importants de dérives chez la personne handicapée qui est à la base plus vulnérable et susceptible d’un transfert affectif envers l’assistant sexuel possiblement source de souffrance supplémentaire.

De plus on ne peut que constater que l’assistance sexuelle est toujours mise en parallèle avec le domaine du proxénétisme ou de la prostitution le CCNE mentionnant d’ailleurs que si une chose est interdite pour tout le monde, pour des raisons éthiques, il semble difficile d’envisager qu’elle soit autorisée dans le cadre d’initiatives individuelles et seulement au profit de certaines personnes.

Aucune évolution n’a été constatée quant à la perception de l’assistance sexuelle pour moins-valides vu que le Comité va dans le sens que celle-ci serait une instrumentalisation du corps d’une personne pour la satisfaction personnelle d’une autre et qu’il vaudrait mieux former les professionnels du secteur médico-social à l’accompagnement des personnes handicapées sur les questions touchant à leur sexualité.

Une notion notion assez surréaliste car le Comité estime que cette formation peut avoir un côté technique, qui permettrait de faciliter l’accès à des moyens mécaniques de satisfaction sexuelle ».

En langage clair on peut envisager la formation à l’utilisation de sextoys sauf que, personne n’a souligné que les demandeurs d’assistance sexuelle présentant un handicap sévère ne pourront pas utiliser ceux-ci ni accéder aux organes génitaux !

Bref, un avis négatif qui, s’il explique et reprend toutes les raisons de ne pas accepter l’assistance sexuelle n’apporte à l’inverse strictement aucune ébauche voire aucune solution au niveau de cette problématique.

Bref, cet avis négatif qui devrait enterrer tout espoir de reconnaissance de l’assistance sexuelle en France dans un futur proche (et même éloigné) réjouira les opposants plus conservateurs à l’inverse de ses partisans considérés comme progressistes.

Quelque soit l’avis des uns et des autres il est un fait commun pour tous, aucune solution ni même ébauche de solution n’a été apportée dans ce domaine et tous les problèmes restent d’actualité.

Vous pouvez consulter et télécharger ICI l’avis numéro 118 au sujet de la vie sexuelle des personnes handicapées – question de l’assistance sexuelle.

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Président association Handimobility. Economiste – Licencié en sciences sociales

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