Le TEM est né au mois de juin dernier d’une idée de quelques amis et un mois plus tard, 50 personnes y participaient. L’un de ses fondateurs est le sociologue Yannis Grigoriou, directeur des Services Sociaux de la Mairie de Volos.
Le TEM, dont la valeur équivaut à un euro, ne s’imprime pas sur du papier. Ceux qui désirent l’utiliser doivent s’inscrire de manière gratuite sur le site internet de troc / échange. Là, ils disposent d’un compte en ligne sur lequel ils ne peuvent accumuler plus de 1.200 TEMs ni en retirer plus de 300 en une fois. Les membres du réseau échangent des biens et des services (cours, visites médicales, gardes d’enfants, etc.) qu’ils peuvent également changer en TEMs, de manière à ce que les participants puissent accumuler du crédit. Quelques magasins acceptent les TEMs sous forme de bons : par exemple, il est possible de payer en TEMs un pourcentage du prix total de l’objet que l’on souhaite acquérir.
**Internet comme outil**
L’utilisation d’Internet a facilité en grande partie l’échange et surtout le contrôle du débit. Jristos, un ingénieur passionné par le logiciel libre et co-fondateur du projet, est le responsable du développement d’un système informatique qui a été conçu sur mesure grâce à des programmes à code ouvert.
Son fonctionnement avancé lui a valu d’être reconnu par les banques anglaises du fait de la forme et de la sécurité avec lesquelles se font les transferts. Meilleures et plus rapides que par n’importe quelle banque sur Internet, les transactions entre vendeurs et acheteurs sont inscrites instantanément sans commissions ni retards, permettant même un découvert sur le compte allant jusqu’à 1.200 TEM.
Puisque le TEM n’existe pas physiquement, les paiements se font de trois manières différentes : par chèque, par un transfert sur Internet ou par son équivalent, un simple SMS. En envoyant un message avec les numéros du donneur d’ordre et du bénéficiaire, ainsi que le montant, le système renvoie immédiatement les mêmes messages en confirmant le transfert et indiquant à chacun le solde restant.
Les réseaux d’échange ou leurs alternatives ont également commencé à agir dans d’autres villes et villages, comme Pieria, Chania, Lesbos, Ierapetra, en Rodopi et Heraklion.
Il existe aussi dans la ville de Patras un réseau qui fonctionne déjà depuis 2009. Il s’appelle Ovolos d’après le nom d’une ancienne monnaie grecque et il se base également sur l’échange de services, en incluant les services médicaux.
L’idée est née en janvier 2009 et la page Facebook grâce à laquelle elle a été rendue publique a reçu rapidement 5000 réponses. Il s’agissait de créer une plate-forme de services internet qui englobe toute la Grèce et qui puisse s’étendre aux Balkans.
**Autres monnaies complémentaires en Europe**
Les monnaies complémentaires peuvent se définir comme les systèmes qui permettent de réorienter les échanges vers la consommation utile, sociale et écologique, tant au niveau individuel que collectif. L’objectif des monnaies complémentaires est de rendre à la monnaie son rôle promoteur d’échanges, poser la question de la signification de ce qui a été échangé et consommé ainsi que favoriser la réappropriation du contrôle de la monnaie de la part des membres du réseau d’échange. Quelques exemples de monnaies complémentaires :
**Le Chiemgauer**: en Europe, un des projets les plus connus est le Chiemgauer, dans la Haute Bavière, à environ 90 kilomètres de Munich. Là, en 2003, un professeur de collège a commencé un projet avec ses élèves pour créer une monnaie locale. Le projet a été mis en fonctionnement un an plus tard et depuis, c’est la monnaie régionale la plus célèbre d’Europe. Sa valeur est en parité avec l’euro (un euro: un Chiemgauer) et aux dernières nouvelles, il y a environ un peu plus d’un million et demi de Chiemgauer dans cette partie de la région (En 2010 les statistiques rapportaient 1.458.119 Chiemgauer en circulation). Son succès se base sur le fait qu’elle ne sert pas à être amassée. Si on ne l’utilise pas pendant 3 mois, elle perd de sa valeur et il faut payer 2 pour cent de chaque Chiemgauer pour le valider et le remettre en circulation.
Le système a été conçu pour créer une relation dans laquelle tous les participants sont gagnants : les ONG, les consommateurs et les entreprises locales, car ce moyen d’échange promeut la production et la consommation locales :
Les ONG achètent 100 Chiemgauers (100€) à 97€ et les vendent aux consommateurs à 100€. Elles gagnent donc 3€ à dépenser dans leurs propres activités. Les consommateurs achètent 100 Chiemgauers à 100€ et les dépensent dans des magasins locaux à leur valeur nominale, en donnant 3 pour cent de leur consommation aux ONG locales sans frais supplémentaires. Les entreprises locales acceptent 100 Chiemgauers et les dépensent dans d’autres entreprises locales ou les reconvertissent en 95€, en payant 5 pour cent de commission. On considère que les 5 pour cent de commission paient le coût de la publicité et les commerces peuvent ainsi attirer plus de consommateurs qui voudraient aider leur communauté.
Le **Toreke** est né en 2010 dans le quartier Rabot-Blaisantvest, de la ville de Gand. Il est distribué en compensation d’activités qui améliorent la vie de la communauté et embellissent le quartier : nettoyer et maintenir les espaces verts, mettre des fleurs à ses fenêtres ou dans les espaces publics, animer des activités sportives, protéger l’environnement, etc. Au départ, les Torekes permettaient le loyer d’un emplacement pour avoir un petit jardin potager familial. Actuellement, on les utilise aussi pour payer dans des magasins affiliés au projet, comme les transports publics, aller au cinéma, etc. Pendant la première année d’utilisation, 40.340 Torekes (équivalents à 4.034 euros) ont été échangés entre 371 participants.
Le **SEL** et le **SOL**: en France, le premier SEL (Système d’Échange Local) apparait en 1994, inspiré des LETS (Local Exchange Trade System), qui sont apparus au Canada en 1983. Aujourd’hui, le pays des Gaulois compte plus de 350 systèmes de troc qui se définissent comme des “groupes de personnes qui pratiquent l’échange de biens, services et connaissances au niveau local”. D’après la charte Esprit du Sel du réseau d’échanges appelée “Selidaires”, un SEL offre la possibilité d’changer d’une autre manière et librement, en privilégiant le lien social plus que le bien recherché, à travers le respect des personnes et la valorisation de la responsabilité de chacun. Pour plus d’informations sur le Sel, lire cet article de Florent Marcellesi sur les « Systèmes de troc et monnaies complémentaires en France ».
Dans ce sens, le SOL, qui fonctionne à Toulouse, Lille, Rennes, Carhaix, Paris, Nanterre, Fontenay-aux-Roses, Grenoble et Val de Drôme, se conçoit comme une “réappropriation démocratique de la monnaie” et cherche à dynamiser “les échanges qui ont du sens” à travers trois objectifs principaux : développer une économie à valeur ajoutée écologique et sociale ; comprendre l’économie comme un moyen et non comme une fin, et reconnaître que chacun peut échanger et créer de la richesse. Le SOL est une monnaie immatérielle. Elle peut être utilisée avec une carte à puce ou à travers Internet, et elle s’exprime par trois instruments financiers différents. Avec le “SOL coopération”, une personne qui achète en euros dans des structures du commerce équitable adhérentes à l’initiative peut accumuler “des points de fidélité” qu’elle pourra ensuite dépenser sur l’ensemble du réseau SOL. Le “SOL affecté” est un outil d’aide sociale : les mutuelles, collectivités locales ou comités d’entreprise peuvent distribuer ces SOL pour que, par exemple, les bénéficiaires du SMIC puissent avoir accès à des modes de consommation alternatifs. Enfin, le “SOL engagement” est “un outil d’échange entre les personnes” qui permet de favoriser le volontariat et la réorientation [réinsertion] des activités vers des milieux sociaux et écologiques. Les volontaires, en contrepartie de leur travail, reçoivent des SOL qui leur permettent d’acquérir des services dans l’esprit de SEL (le temps est la référence de l’échange, 1 SOL = 10 minutes). Par convention, le SOL est égal à 10 centimes d’euros mais à la différence de la monnaie officielle, le SOL est une “monnaie périssable” (ou monnaie de consommation à intérêt négatif) : dans le but de dynamiser les échanges au niveau local, on perd des points en cas de non-utilisation. Sa durée de vie est de trois ans et sa valeur diminue avec le temps : de 10% la première année, 40% la deuxième et 45% la dernière. Pourtant, les SOL ne disparaissent pas puisqu’ils passent du bénéficiaire à un fond commun qui soutient la création de projets solidaires et humanitaires.
**D’autres exemples de monnaies complémentaires (on en trouve des centaines à travers le monde):**
Abeilles, à Villeneuve-sur-Lot, France.
Brixton Pounds, en Angleterre.
Berkshare, à Berkshire, Massachusetts, Etats-Unis.
Calgary Dollars, Canada.
TLALOC, dans la ville de Mexico.
Banco Palmas à Fortaleza, Brésil.
CES en Afrique du Sud.
Hanbat LETS, à Daejeon, Corée du Sud.
Pour en savoir plus :
Source: [http://stasisgrecia.wordpress.com/](http://stasisgrecia.wordpress.com/)
Traduction de l’espagnol : Ségolène Gaschignard