L’organisation se joint ainsi aux nombreux acteurs du Web qui ont décidé de rendre leurs sites inaccessibles, comme le groupe de hacktivistes Parti Pirate, Wikipedia et le réseau social Reddit.
“Nous avons décidé de fermer notre site en langue anglaise pendant 24 heures pour symboliser la chape de plomb qui pourraient s’abattre sur le Web tel que nous le connaissons si SOPA et PIPA étaient adoptées. Ces propositions affecteraient un nombre incalculables d’internautes innocent de toute violation de la propriété intellectuelle, en obligeant notamment un site tiers à bloquer l’accès à d’autres sites soupçonnés de violation du droit d’auteur dont la définition reste vague. Ces deux textes, démesurément répressifs, peuvent conduire à une censure du Net sans précédent et sacrifier la liberté d’expression en ligne au nom de la lutte contre le piratage. Il ne faudrait pas que le coup de grâce aux libertés numériques soit porté par le pays qui a vu naître Internet”, a déclaré Reporters sans frontières.
Et d’ajouter : “De telles mesures discréditeraient les prises de position officielles des États-Unis en faveur de la liberté d’expression en ligne dans le monde. Et affaibliraient considérablement les net-citoyens utilisant les outils de contournement de la censure ainsi que les communautés open source. Nous appelons les députés et sénateurs américains à trouver d’autres moyens pour protéger le droit d’auteur et à rejeter ces textes liberticides”.
Le Protect IP Act (Preventing Real Online Threats to Economic Creativity and Theft of Intellectual Property Act), introduit au Sénat en mai 2011, consacre le filtrage et le blocage de sites portant atteinte à la propriété intellectuelle. Il signifierait la mise en place d’une “muraille électronique”, à la chinoise, alors que les risques de surblocage de contenus sont réels. Les sites collaboratifs, comme YouTube ou Facebook, seraient forcés de surveiller leur contenu sous peine d’être sanctionnés. Les ayant-droits pourraient faire ordonner par un tribunal que les sites juges illégaux ne soient plus référencés par les moteurs de recherche. Les annonceurs publicitaires et les services de paiement en ligne seraient également interdits de collaborer avec ces sites, entraînant de fait leur asphyxie financière. Les outils de contournement de la censure, par ailleurs soutenus financièrement par le Département d’Etat à hauteur de dizaines de millions de dollars, seraient criminalisés, dépouillant ainsi les cyberdissidents de certains pays de mesures de protections vitales.
L’équivalent de PIPA à la Chambre, le Stop Online Piracy Act (SOPA) va encore plus loin, en permettant aux ayant-droits d’exiger le retrait d’un contenu publié en ligne sans passer par un juge.
SOPA et PIPA pourraient ainsi signer “l’arrêt de mort pour les sites Internet”, pour reprendre la formule de l’universitaire américain Mark Lemley. Selon Alexis Ohanian, co-fondateur de Reddit, adopter SOPA et PIPA pour lutter contre le piratage en ligne revient à “essayer de s’en prendre à Ford seulement parce qu’une Mustang a été utilisée dans une attaque de banque”.
Dans une déclaration officielle du 16 janvier 2012, trois conseillers du président Obama en matière de propriété intellectuelle ont affirmé que la Maison blanche s’opposerait à toute législation du droit d’auteur “qui réduirait la liberté d’expression, augmenterait les risques de cybersécurité et saperait les bases d’un Internet mondial, innovant et dynamique”. Si le soutien à ces propositions de loi semble également s’éroder au Congrès, la vigilance reste de mise. Le 18 janvier 2012, une audience sur le SOPA devait se tenir à la Chambre des députés, mais elle a été repoussée à une date encore indéterminée. Le PIPA doit être voté au Sénat le 24 janvier prochain.
Les supporters et les détracteurs de SOPA et PIPA se livrent une véritable bataille rangée. Hollywood et l’industrie du divertissement d’un côté, contre la Silicon Valley, des ONG et des “pères d’Internet” de l’autre, qui dénoncent cette législation comme une grave atteinte à l’innovation et à l’intégrité du Web. Reporters sans frontières avait signé, en novembre 2011, avec une quarantaine d’associations de défense de la liberté d’information et des droits de l’homme, une lettre adressée aux parlementaires américains à l’origine de ces lois.
Le site Blackout SOPA : [http://www.blackoutsopa.org/](http://www.blackoutsopa.org/)
Signez la petition d’EFF: [https://blacklists.eff.org/](https://blacklists.eff.org/)
Sur Twitter, le compte @BlackoutSOPA permet de suivre les évolutions de ce mouvement de protestation, et vous pouvez également relayer le hashtag #BlackoutSOPA.
vidéo de Fight for the future : [http://fightforthefuture.org/pipa/](http://fightforthefuture.org/pipa/)
Infographie : [http://americancensorship.org/infographic.html](http://americancensorship.org/infographic.html)