Pressenza Istambul, 24/04/2010
Au cours de leur sommet à Sirt, en Libye, les dirigeants arabes devaient traiter un agenda chargé centré sur la crise israélo-palestinienne, les défis lancés à la communauté mondiale par Tel Aviv et sa violation progressive du droit international via la construction d’autres colonies dans les territoires occupés et à Jérusalem est, ainsi que le conflit au Darfour, l’instabilité au Yémen, le drame somalien et, par-dessus tout, la nécessité d’adopter des politiques collectives arabes plus cohérentes.
Cependant, ils ont consacré un chapitre important aux problèmes nucléaires.

En fait, les dirigeants de quelque 350 millions de personnes vivant dans la région la plus riche productrice de pétrole, la plus disputée sur Terre, ont sonné l’alarme à la fin de leur 22ème sommet en Libye, appelant à un monde sans nucléaire.

FIN DU NUCLEAIRE, MAINTENANT.

Les dirigeants arabes ont, dans leur déclaration finale au terme de cette réunion de deux jours, spécifiquement “réaffirmé que tous les pays arabes qui sont signataires du traité de non-prolifération nucléaire (NPT) demandent à la communauté internationale de prendre des actions immédiates pour libérer le monde des armes nucléaires.”

La déclaration du sommet et souligné le besoin “de traduire des initiatives internationales visant à éliminer les armes nucléaires du monde, en programmes concrets, contraignants et pourvus d’échéances ”.

LES ATOMES POUR LA PAIX

Cette position concorde à celle de l’Agence Internationale pour l’Energie Atomique (AIEA), qui pour résumer dit : L’énergie nucléaire oui, la prolifération nucléaire non.

Elle correspond aussi à l’intérêt croissant de plusieurs pays arabes, y compris les producteurs de pétrole, dans le développement de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques. Les Etats Unis, le Royaume Uni, la France et la Russie, parmi d’autres pays industrialisés, ont encouragé cette tendance des pays arabes et certains d’entre eux ont déjà convenu d’accords commerciaux importants concernant des installations nucléaires dans plusieurs pays arabes.

Les Emirats Arabes Unis, riches producteurs de pétrole, ont par exemple annoncé en octobre 2009 leur décision de construire des réacteurs nucléaires sur leur territoire. Ceci a lancé une concurrence frénétique bénéficiant d’appuis politiques, entre la France, les Etats Unis, le Japon et la Corée du Sud, pour emporter le marché de 40 milliards de dollars que représente ce projet.
A la même époque, le gouvernement français a promis d’aider le Qatar et le Maroc à lancer leurs propres programmes nucléaires. L’Egypte et la Jordanie vont paraît-il bâtir des centrales nucléaires. L’Arabie Saoudite a aussi annoncé des plans de développement de l’énergie nucléaire à des fins civiles.

Les dirigeants arabes ont aussi souligné que les progrès vers cet objectif “nécessitent aussi, comme première étape, l’universalisation du traité de non-prolifération ”.

Cette forte position arabe fut proclamée quelques jours après l’annonce d’un accord entre les Etats Unis et la Russie pour réduire l’arsenal nucléaire de 30 pour cents, conclu le 8 avril à Prague, et peu avant le sommet sur la sécurité nucléaire de Washington et la conférence de révision de la NPT, du 3 au 28 mai à New York.

En prévision de cette dernière, les déclarations arabes réaffirment “l’importance de respecter les droits des Etats membres du NPT de posséder et développer des technologies nucléaires à des fins pacifiques, rejetant toute restriction à ces droits quel que soit l’argument ”.

ISRAEL NUCLEAIRE

Pour en revenir à la déclaration arabe, les dirigeants arabes ont demandé que le conférence de révision de la NPT “adopte des décisions claires et établisse des mesures pratiques afin de faire du moyen orient une région sans nucléaire ”.
Israël, unique puissance nucléaire du moyen orient avec 200 armes nucléaires, s’est systématiquement refusé à signer le traité de non-prolifération.

A ce sujet, les dirigeants arabes ont averti du fait que “l’insistance d’Israël à refuser de signer le traité de non-prolifération et de soumettre ses installations nucléaires au système complet de garanties de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique, va entraîner la région dans une course aux armements aux conséquences dramatiques ”.

Sur ce point, et confirmant la déclaration arabe, le Jerusalem Post daily a publié le même jour une information selon laquelle le gouvernement israélien ne présentera “aucune concession” au sommet pour la sécurité nucléaire de Washington à propos de sa politique du maintient de “l’ambiguïté” sur ses armes nucléaires, selon un représentant militaire officiel.

ARABES ET CAMPAGNES DANS LE MONDE

Le sujet d’un moyen orient sans nucléaire n’est pas nouveau. En fait, l’Egypte a lancé 36 ans plus tôt une campagne active visant à l’établissement d’un « moyen orient sans nucléaire « .
En 1990, le président égyptien Hosni Mubarak a relativisé l’initiative égyptienne via un nouveau plan plus large visant à déclarer le moyen orient « région sans armes de destruction massive « , y compris les armes nucléaires.

L’initiative égyptienne a reçu le soutien de la plupart des pays arabes et a été réaffirmée par Amre Musa, Secrétaire Général de la ligue des pays arabes, représentant tous les 22 pays arabes, qui continue de répéter: « Il est nécessaire de libérer le moyen orient des armes nucléaires. »

Le soutien arabe à l’initiative pour un moyen orient sans nucléaire s’est renforcé particulièrement dans les pays du Golfe d’Arabie après que les Etats Unis, Israël et l’Europe aient accusé l’Iran de vouloir construire des armes nucléaires.
De plus, au cours d’un sommet à Washington entre Mubarak et le président américain Barack Obama en août 2009, l’Egypte a catégoriquement refusé l’offre américaine d’assurer la défense de la région contre les armes nucléaires via un ‘parapluie nucléaire’ étendu faisant partie d’un plan global de paix au moyen orient.
Ce plan ne spécifiait pas si Israël allait démanteler ses arsenaux nucléaires.

D’un autre côté, les 10 pays arabes situés en Afrique, membre à la fois de la Ligue arabe et de l’Union Africaine, font partie de la zone d’Afrique sans armes nucléaires, entrée en vigueur depuis juillet 2009.
Il s’agit de : l’Algérie, Djibouti, l’Egypte, la Libye, la Mauritanie, le Maroc, la Somalie, le Soudan, le Tchad et la Tunisie.

De plus, certaines personnalités arabes se sont jointes à la campagne mondiale pour l’abolition des armes nucléaires lancée par plus de 100 personnalités internationales, connue sous le nom de ‘Global Zero, pour un monde sans armes nucléaires’.

La reine Noor de Jordanie, par exemple, a mené une campagne active pour l’abolition des armes nucléaires, au sein de l’initiative Global Zero.
A cette occasion, la reine de Jordanie affirmait : « La pure folie de vouloir défendre une nation en détruisant toute vie sur la planète doit apparaître à toute personne capable de pensée rationnelle. La capacité nucléaire doit être réduite à zéro, sur toute la planète et définitivement. Il n’existe aucun autre choix. »

CHŒUR MONDIAL

Pendant ce temps, le monde est témoin d’un nombre croissant de campagnes internationales pour l’élimination de tout armement nucléaire de la surface de la terre.
Ces initiatives vont de la société civile et des organisations de base aux prix nobels et aux maires des villes – comme Tadatoshi Akiba, Maire de la ville de Hiroshima, qui avec Nagasaki continue de souffrir des conséquences atroces du bombardement nucléaire au durant la deuxième guerre mondiale – ainsi que des chefs religieux, parmi tant d’autres.

Parmi eux se trouve Soka Gakkai International – une organisation bouddhiste japonaise comptant 12 millions de membres de par le monde – qui promeut la paix été a lancé une campagne internationale active pour l’abolition des armes nucléaires.

Parmi les nombreuses personnalités internationales appelant à un monde sans nucléaire se trouve Jayantha Dhanapala, qui a présidé à la conférence de révision et d’extension de la NPT en 1995 et était le vice-secrétaire général des Nations Unies pour les questions de désarmement de 1998 à 2003.